3 . 3  -  Diagnostic étiologique


La recherche des étiologies très nombreuses est orientée par l’âge de l’enfant : nouveau-né, nourrisson ou enfant de plus de six mois.

3 . 3 . 1  -  Nouveau-né


La laryngomalacie, ou stridor laryngé congénital, est l’anomalie congénitale du larynx la plus fréquente chez l’enfant (75 % des cas). Elle produit, par absence de rigidité, une bascule de l’épiglotte ou surtout des aryténoïdes vers la lumière glottique lors de l’inspiration. Ce phénomène produit un bruit inspiratoire aigu, encore appelé stridor. Moins souvent, le bruit est grave à type de ronflement. Ce stridor peut être permanent ou intermittent. Il apparaît à la naissance ou après quelques jours et peut s’accompagner d’une dyspnée ou de troubles de la déglutition. Il va évoluer dans le temps avec stabilisation vers 4-5 mois et une régression à partir de 6 mois.

Il peut exister une dyspnée chronique, mais on peut aussi observer une poussée dyspnéisante associée à une infection virale des voies aériennes supérieures.

Le diagnostic clinique est confirmé par la laryngoscopie (nasofibroscopie). Les formes dyspnéisantes peuvent justifier une endoscopie laryngotrachéale directe sous anesthésie générale, à la recherche d’un obstacle associé. La majorité des laryngomalacies sont traitées avec simple surveillance et éventuellement traitement d’un reflux gastro-œsophagien associé, en attendant la régression spontanée. Les formes dyspnéisantes chroniques peuvent, si elles retentissent sur la prise de poids, l’hématose, ou si elles sont source d’apnées, bénéficier d’un traitement endoscopique (résection des replis ary-épiglottiques) (figure 2).

Figure 2 : Laryngomalacie chez un enfant présentant un stridor laryngé avec tirage
Noter l’épiglotte repliée sur elle-même et la brièveté des replis ary-épiglottiques réduisant le calibre de la filière laryngée (flèche blanche).

D’autres diagnostics plus rares sont évoqués et recherchés par la laryngoscopie directe (nasofibroscopie ou parfois endoscopie sous anesthésie générale dans un but à la fois diagnostique et thérapeutique) :

  • malformation congénitale (palmure, atrésie, diastème laryngé) ;
  • paralysie laryngée bilatérale (traumatisme obstétrical, malformation basicrânienne, séquelle de lésion infectieuse endocrânienne) ou plus fréquente, dyskinésie laryngée (spasme des cordes vocales en fermeture à chaque inspiration, mimant une paralysie laryngée et pouvant être aussi sévère) ;
  • tumeur congénitale (lymphangiome, kyste).
video 2 : Aspect endoscopique d'une laryngomalacie :
noter l'aspiration des structures muqueuses et cartilagineuses lors de l'inspiration.

3 . 3 . 2  -  Nourrisson de moins de six mois


L’angiome sous-glottique est la lésion la plus fréquente. La dyspnée apparaît après quelques semaines, peut s’aggraver jusqu’à 6 mois, puis se stabilise et régresse après un an. Cet angiome est très fréquemment associé à d’autres angiomes cervicofaciaux.

La nasofibroscopie retrouve une masse sous-glottique, plutôt du côté gauche, dépressive à la palpation sous une muqueuse normale. L’endoscopie sous anesthésie permet de préciser le bilan et de juger de la possibilité d’une simple surveillance. La mauvaise tolérance respiratoire peut nécessiter en phase aigüe un traitement corticoïde par voie générale, rarement une intubation. Le traitement de référence des angiomes sous-glottiques dyspnéïsants est depuis 2009 le propranolol. La corticothérapie au long cours doit être évitée, les traitements endoscopique laser ou chirurgical par voie externe sont réservés aux contre-indications ou inefficacité des béta-bloquants. La trachéotomie est devenue exceptionnelle.

Video 3 : Angiome sous-glottique du nourrisson :
noter le siège sous-glottique et sténosant de la lésion. La trachée est normale sous la lésion. Noter que la lésion est dépressible permettant une intubation orotrachéale si besoin.

3 . 3 . 3  -  Enfant de plus de six mois

3 . 3 . 3 . 1  -  Étiologie principale : les laryngites

  • La laryngite striduleuse survient la nuit, de façon brutale, chez un enfant ayant une rhinopharyngite. Elle s’accompagne d’un cornage mais cède spontanément en quelques dizaines de minutes. Elle peut récidiver et nécessiter alors un traitement préventif des rhinopharyngites à répétition, c’est-à-dire une adénoïdectomie.
  • L’ épiglottite est devenue rare, car il s’agit d’une lésion à hemophilus et la plupart des enfants sont vaccinés. L’obstruction créée par l’augmentation importante du volume de l’épiglotte, s’accompagne d’une dysphagie intense avec hypersialorrhée, d’une dyspnée laryngée d’installation rapide, d’une voix étouffée (couverte), d’une toux claire et de signes généraux marqués chez un enfant de 4 à 6 ans assis dans son lit, tête penchée en avant. L’enfant ne doit pas être allongé. C’est une urgence vitale qui nécessite une hospitalisation en milieu de réanimation sans délai. Le recours à une intubation de courte durée est fréquent. Un traitement médical antibiotique est instauré par voie intraveineuse.
  • La laryngite sous-glottique est la plus fréquente. Elle est liée à un œdème de la région sous-glottique, d’origine virale le plus souvent. Elle s’installe progressivement après une rhinopharyngite, parfois dans un contexte de contage. La dyspnée s’accompagne de modifications du cri et de la voix, avec toux rauque, aboyante. Une décompensation brutale est toujours possible. Le traitement est essentiellement médical et le diagnostic clinique. Le traitement associe des aérosols adrénalinés et/ou avec corticoïdes, à débuter en urgence, voire une corticothérapie administrée par voie parentérale, une oxygénothérapie. En fonction de la réponse au traitement, l’hospitalisation peut être nécessaire (risque de décompensation respiratoire). Il ne faut jamais prescrire de sédatif. Si l’étude des gaz du sang montre une hypoxie et une hypercapnie, une intubation nasotrachéale peut-être nécessaire. La nasofibroscopie n’est nécessaire qu’en cas de doute diagnostique (figure 3).
Figure 3
Aspect endoscopique d’une laryngite sous‐glottique chez un nourrisson.

3 . 3 . 3 . 2  -  Autres causes

  • Le spasme laryngé est dans l’immense majorité des cas un spasme du sanglot, déclenché par une colère ou des pleurs. La dyspnée est brutale, très intense, avec angoisse et parfois cyanose. Le contexte est très évocateur, la dyspnée cède très rapidement et reste bénigne. La perte de connaissance est possible mais brève. Les spasmes laryngés peuvent très rarement être la manifestation d’une hypocalcémie, associée alors à d’autres signes (convulsions, hypertonie).
  • Le corps étranger est relativement rare mais grave, pouvant engager le pronostic vital dès la première phase de l’inhalation appelé « syndrome de pénétration ». La pénétration du corps étranger se manifeste par un accès de suffocation, parfois une cyanose, une toux et une dyspnée. Tous ces signes régressent rapidement pour laisser place à une deuxième phase dite « phase muette ». La troisième phase survient après quelques jours et est marquée par des complications infectieuses bronchopulmonaires. Le diagnostic peut être difficile si le syndrome de pénétration n’a pas été observé par l’entourage. Le diagnostic est aidé par l’imagerie (corps étranger visible, atélectasie pulmonaire partielle, emphysème localisé), mais celle-ci peut être négative. Seule l’endoscopie, le plus souvent sous anesthésie générale, permet à la fois le diagnostic de certitude et le traitement.
  • De nombreuses autres affections peuvent être responsables de dyspnées laryngées chez l’enfant : une laryngite spécifique comme le croup, un œdème après piqûre ou allergie, une brûlure par caustique, un traumatisme du larynx, externe mais surtout interne, iatrogène après intubation, une tumeur bénigne comme la papillomatose laryngée
Video 4 : Aspect endoscopique d'une papillomatose laryngée:
noter dans le film le caractère dyspnéisant de la papillomatose. Le diagnostic doit être fait au stade initial de la dysphonie pour simplifier la prise en charge

3 . 3 . 4  -  Traitement des dyspnées laryngées de l’enfant


Le traitement des dyspnées chroniques dépend de l’étiologie. Dans tous les cas, la recherche d’un reflux gastro-œsophagien et son traitement est utile, car c’est un facteur aggravant fréquent des pathologies laryngées de l’enfant.

En urgence, les dyspnées aiguës par laryngite, angiome sous-glottique, aggravation aiguë sur laryngomalacie, peuvent bénéficier du même type de prise en charge :

  • hospitalisation des dyspnées sévères ;
  • enfant en position demi-assise si l’âge le permet, humidification et réchauffement de l’air ;
  • oxygénothérapie au masque ou lunettes si nécessaire
  • corticothérapie : dexaméthasone 1 ampoule à 4 mg IV, ou 0,5 mg/kg chez l’enfant plus grand, puis relais per os équivalent à 1 mg/kg/j de prednisone ;
  • aérosols de type Bompard associant un corticoïde (soit dexaméthasone 1 ampoule à 4 mg, soit bêtaméthasone, 2 mL = 8 mg), de l’adrénaline à 1/1000, 1 à 2 mL = 1 à 2 mg, compléter avec sérum physiologique à 10 cc ;
  • on peut dans les dyspnées modérées traiter par inhalation de budésonide (Pulmicort) à 0,5, 2 mL = 4 mg, à poursuivre toutes les 8 à 12 h, constituant aussi un relais à la corticothérapie IV ou à l’aérosol de Bompard.
4/5