7  -  Contraception et pathologies

7 . 1  -  Contraception et maladie métabolique

L’éthinyloestradiol est associé à des modifications du métabolisme lipidique. Il augmente le HDL-cholestérol et les triglycérides de façon dose-dépendante et modifie la synthèse et la production du LDL-cholestérol en le diminuant. Si la contraception combinée a peu d’effet sur les paramètres lipidiques chez une femme normo-lipémique, elle peut augmenter de façon significative les lipides chez une femme dyslipidémique.
À cause du risque de pancréatite aiguë (très rare), en cas d’ hypertriglycéridémie familiale majeure, il est impératif d’effectuer le premier bilan biologique avant toute prescription pour dépister cette anomalie, qui est une contre-indication à l’utilisation de la contraception oestroprogestative.

7 . 1 . 1  -  Hyper-cholestérolémie

Une recherche systématique de la littérature(cf. note : 44) a identifié une étude cas-témoins qui analysait le risque d’infarctus du myocarde lié à l’utilisation d’une contraception oestroprogestative en fonction de l’existence ou non d’une hypercholestérolémie. L’utilisation d’une contraception oestroprogestative était significativement associée à une augmentation du risque d’infarctus du myocarde chez les utilisatrices avec hypercholestérolémie (RR = 24,7 [5,6 ; 108,5]), par rapport aux utilisatrices sans hypercholestérolémie (RR = 2,0 [1,4 ; 2,8]), et par rapport aux non-utilisatrices avec hypercholestérolémie (RR = 3,3 [1,6 ; 6,8]). Le risque combiné était 4 fois supérieur à la multiplication des risques liés à chacun des deux facteurs de risque.

La prise en charge et la prescription chez les femmes dyslipidémiques va donc varier en fonction des résultats des bilans et conditionne le choix de la génération de l’oestroprogestatif.

Si la patiente présente un taux de cholestérol total supérieur à 3g/L, il existe une contre-indication formelle aux oestroprogestatifs ; on s’orientera donc vers une contraception progestative pure, un DIU ou une contraception mécanique.

Lorsque le bilan revient avec un taux de cholestérol total compris entre 2,5g/L et 3g/L, il faut alors doser le HDL et le LDL.

  • Si le LDL revient avec un taux inférieur à 1,60 g/L et s’il n’y a pas d’autre facteurs de risque (tabac, âge > 35 ans, IMC > 30, antécédents familiaux), la prescription d’un oestroprogestatif est possible avec une surveillance du bilan biologique à 3 mois, 12 mois et 24 mois.
  • Si le LDL est compris entre 1,60g/L et 1,90 g/L, il convient de demander à la patiente d’effectuer 3 mois de régime (accompagné par une prise en charge diététique réelle), et de redoser le LDL après le régime. S’il est devenu inférieur à 1,60 g/L la prescription d’une contraception minidosée est possible mais avec une surveillance mensuelle du bilan. Si le LDL n’est pas repassé sous la valeur seuil de 1,60 g/L, la patiente présente une contre-indication aux oestroprogestatifs.


La prise en charge en fonction des résultats du bilan peut être résumé par le diagramme suivant.

Figure 33 : Diagramme de prise en charge en fonction du bilan cholestérol

7 . 1 . 2  -  Hyper-triglycéridémie

Concernant le dosage des triglycérides, lorsqu’il est supérieur à 2,5 g/L, le risque thrombotique est majeur et cela correspond à une contre-indication à la prescription des oestroprogestatifs. Il convient également d’orienter la patiente vers une prise en charge diététique afin de diminuer les sur-risques liés à la pathologie seule (il existe également un risque de pancréatite aigüe lorsque le taux est supérieur à 10 g/L).

Lorsque le taux des triglycérides revient entre 1,5 g/L et 2,5 g/L, il n’existe pas de consensus. La prescription d’oestroprogestatifs pourrait être envisagée si le taux passe en-dessous de 2 g/L après un régime adapté sous réserve qu’il n’y ait pas d’autres facteurs de risque associés et d’un contrôle du bilan à 3 mois, 12 mois et 24 mois.

Figure 34 : Diagramme de prise en charge en fonction bilan triglycérides

7 . 1 . 3  -  Diabète

7 . 1 . 3 . 1  -  Oestroprogestatifs et métabolisme glucidique

Bien que l’utilisation des contraceptifs oestroprogestatifs puisse entraîner une modification de la tolérance au glucose, la principale inquiétude concerne la pathologie vasculaire associée au diabète et le risque supplémentaire de thrombose artérielle qu’entraîne l’utilisation des contraceptifs oestroprogestatifs.

La nature et la dose du progestatif dans une association oestroprogestative contenant moins de 50 μg d’éthinyl-estradiol semble être le principal responsable de l’effet sur le métabolisme glucidique (modification de la tolérance au glucose avec hyperinsulinisme). L’oestrogène semble moduler l’influence du progestatif. La réduction des doses de progestatifs et d’oestrogène a permis de réduire les effets potentiels sur le contrôle de la glycémie. Il n’est pas démontré que les progestatifs de 3ème génération aient des interférences moindres comparés aux progestatifs de 2ème génération.

7 . 1 . 3 . 2  -  Diabète et choix d’une contraception

Le diabète de type I (diabète insulino-dépendant) est retrouvé chez 0,15% de la population française, la moitié étant diagnostiqué avant l’âge de 20 ans. Outre les effets sur le métabolisme glucidique, le diabète peut entraîner des complications à type de micro-angiopathies (rétinopathie, néphropathie glomérulaire) et de macro-angiopathies (HTA, insuffisance coronarienne). On estime de 25% des femmes diabétiques n’utilisent pas de contraception. La grossesse est cependant associée chez une femme diabétique à des complications maternelles et périnatales (malformations fœtales, MFIU) qui justifient que la grossesse soit programmée, hors la moitié ne l’est pas.
Il a été démontré que les oestroprogestatifs ne changeaient pas l’équilibre glycémique ni les doses d’insuline utilisées.

Ainsi, pour le diabète sans complication vasculaire et s’il n’y a pas d’autres antécédants, l’OMS(cf. note : 41) indique que l’utilisation des oestroprogestatifs ou des progestatifs seuls (microprogestatifs, implants, progestatifs injectables) est possible chez ces femmes, que le diabète soit insulino-dépendant ou non. Quel que soit le type de diabète et son évolution, le DIU au cuivre peut être utilisé sans restriction d’utilisation selon l’OMS et l’Alfédiam. L’OMS indique également que le DIU imprégné au LNG peut être utilisé chez une femme diabétique.

En cas de complication vasculaire du diabète type rétinopathie, néphropathie, ou neuropathie, l’OMS et les AMM françaises contre-indiquent l’utilisation des oestroprogestatifs et des progestatifs injectables. Les microprogestatifs, les implants et le DIU imprégné au LNG peuvent être utilisés, les avantages de la méthode l’emportant en général sur les risques théoriques avérés.

7 . 1 . 3 . 3  -  ATCD diabète gestationnel et utilisation des oestroprogestatifs

L’OMS indique que l’utilisation d’une contraception oestroprogestative (< 35 μg d’éthinyl-estradiol) est possible sans restriction d’utilisation en cas d’antécédent de diabète gestationnel (cela représente entre 3 et 5% de la population). Aucune étude méthodologique de niveau de preuve suffisant n’a permis d’établir une augmentation du risque de développer un diabète non insulinodépendant (de type II) chez les utilisatrices d’une contraception hormonale ayant un antécédent de diabète gestationnel. Il convient tout de même de réaliser un premier bilan avant la prescription de la contraception comportant une glycémie à associée à la détermination du cholestérol total et des triglycérides. La détermination de la glycémie à jeun est renouvelée 3 à 6 mois après le début de la contraception oestroprogestative.

7 . 1 . 4  -  Obésité

L’obésité est définie par un indice de masse corporelle (IMC) supérieur à 30. L’obésité chez les femmes non-utilisatrices d’une contraception oestroprogestative est associée à une augmentation du risque thromboembolique veineux, d’infactus du myocarde et d’HTA.

Pour un IMC >30, l’OMS classe la contraception oestroprogestative combinée (< 35 μg EE) dans la catégorie où les avantages de la méthode l’emportent en général sur les risques théoriques sauf en cas de dyslipidémie associée.

7 . 1 . 5  -  Contraception des femmes à risque de maladie thrombo-embolique veineuses (MTEV)

L’ éthinyloestradiol entraîne une hypercoagulabilité. On estime le risque de thrombose le plus élevé dans le 1er mois d’utilisation.

Les patientes ayant un antécédent personnel d’accident thrombo-embolique veineux ou artériel, des migraines avec aura, une thrombophilie ou présentant un âge supérieur à 35 ans associé au tabac présentent une contre-indication absolue aux oestro-progestatifs.
Les micro-progestatifs restent la contraception de référence. Il faut également être prudent pour les femmes traitées par anticoagulants car il y a une augmentation du risque hémorragique en cas de rupture d’un kyste fonctionnel ovarien. Sa survenue semble être favorisée par les micro-progestatifs.

Lors de la présence d’antécédents familiaux de MTEV, un bilan supplémentaire est préconisé. Il comporte : TP, TCA, antithrombine III, protéine C, protéine S, mutation du facteur II, résistance à la protéine C activée. Cette surveillance biologique fait partie du bilan de thrombophilie.

7 . 1 . 6  -  Contraception et HTA

L’HTA est une contre-indication absolue à l’utilisation des oestroprogestatifs.

7 . 1 . 7  -  Conclusion

  • L’interrogatoire à la recherche d’ATCD personnels et familiaux constitue un élément essentiel de la décision de prescription
  • Le dépistage et l’identification des pathologies pré existantes dans le cadre de cette prescription sont indispensables.
  • La contraception associée à une pathologie sort du cadre du champ de compétence des sages-femmes et doit être prise en charge par un médecin.
Notes
  1. 44 : Tanis BC, van den Bosch MAAJ, Kemmeren JM, Cats VM, Helmerhorst FM, Algra A et al. Oral contraceptives and the risk of myocardial infarction. N Engl J Med 2001;345(25):1787-93
  2. 41 : Organisation mondiale de la santé. Pour un meilleur accès à des soins de qualité en matière de planification familiale. Critères de recevabilité pour l'adoption et l'utilisation continue de méthodes contraceptives. 2nd ed. Genève: OMS; 2002.
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