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Les anomalies de structure impliquent une ou plusieurs cassures chromosomiques suivies d’un recollement anormal. Elles peuvent affecter un, deux voir plusieurs chromosomes. Elles peuvent être équilibrées ou non équilibrées. Les différents types d’anomalies sont les délétions, les duplications, les chromosomes en anneau, les isochromosomes, les chromosomes surnuméraires (chromosome en anneau, isodicentrique) toujours déséquilibrés et les translocations, inversions et insertions généralement équilibrées. La malségrégation de ces dernières lors du processus méiotique peut conduire à l’apparition de formule déséquilibrée.
Elles ont été identifiées avec les premières techniques d’analyse chromosomique : le caryotype standard. Le degré de résolution est égal ou supérieur à 10 mégabases.
Nous nous intéresserons aux anomalies déséquilibrées qui ont toujours un retentissement phénotypique associant un retard mental, une dysmorphie faciale et des malformations viscérales diverses survenues de novo ou par malségrégation meïotique d’une anomalie équilibrée. Les anomalies de structure décrites sont extrêmement variées. Nous choisirons de décrire les aspects cliniques d’anomalies les plus connues et qui doivent être diagnostiquées cliniquement. Seront exclus les isochromosomes en raison de leur rareté pour les autosomes alors qu’ils sont fréquents pour le chromosome X et les duplications bien que nombreuses du fait de la difficulté de reconnaissance clinique.
Nous avons choisi de décrire deux délétions très classiques décrites dès les débuts de la cytogénétique reconnaissables cliniquement. Il s’agit de la délétion de la région télomérique du bras court du chromosome 4 et de la région télomérique du bras court du chromosome 5.
La taille de la délétion est extrêmement variable. Les techniques de cytogénétique moléculaire ont permis de délimiter des régions minimales critiques et d’identifier les gènes candidats pour ces phénotypes. Lorsqu’elles sont de petite taille, ces délétions peuvent ne pas être identifiées sur un caryotype standard, justifiant la réalisation d’une technique de cytogénétique moléculaire ou d’une étude en CGH-array lorsque le diagnostic est évoqué sur des arguments cliniques.
Le syndrome du Wolf-Hirschhorn est une anomalie chromosomique résultant d'une délétion de taille variable de l'extrémité du bras court du chromosome 4 (4p-). Elle a été décrite en 1965 par Wolf et Hirschhorn indépendamment. Cette délétion survient de novo dans 85% des cas mais peut être héritée d'un remaniement parental équilibré. Son incidence à la naissance est comprise à 1/15 000 enfants nés vivants.
Il est cliniquement bien défini et reconnu dans la petite enfance. Les signes constants sont un retard de croissance sévère à début anténatal et une microcéphalie (< 3DS), associée à une dysmorphie faciale.
Cette dysmorphie faciale est très caractéristique. Elle évoque un casque de « guerrier grec » avec un front haut, un hypertélorisme, une hypoplasie orbitaire, une exophtalmie, la glabelle est large avec parfois un hémangiome, les fentes palpébrales horizontales ou obliques en haut et en dehors, un nez aux bords rectilignes et parallèles, un philtrum court. Les anomalies oculaires sont fréquentes avec ptosis, strabisme, nystagmus ou phénomène de Marcus Gunn. La bouche est caractéristique avec une lèvre supérieure fine et des coins tombants, le menton petit. Une fente labiopalatine est fréquemment présente. Des anomalies dentaires sont fréquentes.
Le cou est long, le thorax allongé. Il existe des anomalies des extrémités avec un pouce digitalisé.
Les malformations associées les plus fréquentes sont une fente labiopalatine, des anomalies cardiaques et osseuses (scoliose).
Le retard mental est sévère avec un retard des acquisitions psychomotrices. La marche est acquise en moyenne à l'âge de 4 ans. Le langage reste très pauvre. Une surdité est aussi souvent signalée. Une épilepsie est présente chez 90% des patients. Elle débute chez le nourrisson et peut être sévère. Un aspect particulier du tracé EEG a été décrit.
Le phénotype clinique est plus difficile à reconnaître à l’âge adulte, la dysmorphie faciale étant moins caractéristique. Il a d’ailleurs été reporté sous le nom d’un autre syndrome ; le syndrome de Pitt-Rogers-Danks qui n’est autre que le tableau clinique de l’adulte présentant cette délétion.
Les analyses moléculaires des délétions variables de cette région ont permis d’identifier deux régions minimales critiques pour ce syndrome WHSCR-1 and WHSCR-2. Dans la première région, 3 gènes ont été identifiés et proposés comme candidats, Wolf-Hirschhorn syndrome candidate 1Stec et 2Stec (WHSC1 et WHSC2), Leucine zipper-EF-hand containing transmembrane protein 1 (LETM1). Une deuxième région a été décrite par Zollino et al, WHSCR2 plus distale. La question reste donc à résoudre mais le phénotype semble lié à l’haploinsuffisance de plusieurs gènes contigus.
Le syndrome du Cri du Chat est une anomalie chromosomique résultant d'une délétion de taille variable de l'extrémité du bras court du chromosome 5 (5p-). Cette délétion survient de novo dans 90% des cas mais peut être héritée d'un remaniement parental équilibré. L'incidence à la naissance est comprise de 1/15 000 et 1/50 000 enfants nés vivants.
Son tableau clinique classique est identifiable cliniquement à la naissance. Sa caractéristique clinique la plus remarquable est l’existence d’un cri chez le bébé monochromatique présent à la naissance, évoquant le miaulement d’un chat qui a donné son nom à cette maladie. Ce cri anormal est lié à une anomalie laryngé, il disparait spontanément dans les premières semaines de vie. Ceci oriente vers la recherche des autres signes très évocateurs et constants: une microcéphalie associée à une dysmorphie faciale.
Elle associe une arête nasale large et plate, un hypertélorisme, un épicanthus, une micrognathie.
Ces enfants présentent un retard psychomoteur important. Les malformations sont rares.
A l’âge adulte, le retard mental est sévère. On note une absence de langage avec une compréhension qui semble meilleure. Ils ont une autonomie réduite. La dysmorphie à cet âge se modifie avec un allongement du visage et l’apparition d’un prognathisme.
Cette délétion est caractérisée par une taille très variable d’un patient à l’autre. Les analyses moléculaires ont permis de cartographier cette région chromosomique 5p. Les études de corrélation génotype-phénotype ont montré une importante variabilité clinique et cytogénétique. Une région minimale critique a été établie contenant deux gènes, Semaphorine F (SEMAF) et d-catenine (CTNND2) qui sont potentiellement impliqués dans le développement cérébral. La délétion du gène de la télomérase reverse transcriptase (hTERT) localisé en 5p15.33 pourrait contribuer aux manifestations phénotypiques observées chez les patients.
Le syndrome de Pallister-Killian est une anomalie chromosomique résultant de la présence d’un petit chromosome surnuméraire, formé de 2 copies des bras courts d’un chromosome 12, entraînant la présence de quatre copies de ce bras court. L'incidence annuelle est incertaine et estimée à environ 1/25 000. Cette anomalie a la particularité d’être présente en mosaïque. Une sélection cellulaire i(12p) a été observée in vitro et a aussi probablement lieu in vivo. Le caryotype est 47,XX ou XY,i(12)(p10)/ 46,XX ou XY. Cette mosaïque peut ne pas être mise en évidence dans les lymphocytes, l’anomalie étant alors confinée dans les cellules fibroblastiques. Un caryotype sur biopsie cutanée ou une HIS sur frottis buccal sera nécessaire pour établir le diagnostic. L'isochromosome est en général présent dans 30-100 % des métaphases de fibroblastes. L'hybridation in situ avec des sondes spécifiques de l'ADN du chromosome 12 est de règle aujourd’hui pour confirmer l’origine du chromosome.
L'isochromosome est, dans la plupart des cas, d'origine maternelle. Tous les cas rapportés sont sporadiques.
Le tableau clinique est suffisamment caractéristique pour être réalisé cliniquement dès la période néonatale. Le tableau clinique associe un retard psychomoteur avec une hypotonie et une dysmorphie faciale très caractéristique, un raccourcissement rhizomélique des membres, des mains et pieds petits avec une hypoplasie unguéale.
La dysmorphie faciale comprend des traits grossiers avec un profil aplati, un front haut avec une alopécie frontotemporale, des cils et sourcils clairsemés, des rebords supraorbitaires peu marqués, des fentes palpébrales obliques, un hypertélorisme, une racine de nez plate et élargie, un petit nez avec des narines antéversées, une grande bouche avec des coins bas et une lèvre supérieure proéminente. Avec l'âge, une macroglossie et un prognathisme apparaissent.
Le tableau neurologique est sévère avec une hypotonie marquée présente à la naissance. Des contractures se développent avec l'âge. Par la suite, le déficit intellectuel est très sévère avec une autonomie très réduite. Une épilepsie est fréquemment associée.
De nombreuses malformations congénitales peuvent être présentes, les plus spécifiques étant des anomalies diaphragmatiques et anales. Des anomalies cardiaques, en particulier des communications interventriculaires, sont présentes dans 25 % des cas. Des anomalies de pigmentation cutanée, une surdité sont des signes fréquents.
Certains patients avec un niveau de mosaïcisme plus faible sont cependant moins affectés. Ce tableau clinique peut être repéré pendant la grossesse du fait de l’expression des signes cliniques telles qu'une hernie diaphragmatique, un hydramnios, un hydrops fetalis, des malformations cardiaques ou des membres courts qui conduisent à réaliser une amniocentèse. Ces signes d’appel conduisent à la réalisation d’un caryotype fÅ“tal qui permettra de révéler l’anomalie.
La région chromosomique 15q11q13 est hautement instable et elle est le siège de remaniements génomiques récurrents, déterminant des syndromes cliniques définis, comme celui associé à la présence d’un marqueur chromosomique surnuméraire du à la duplication inversée du chromosome 15 proximal. Le syndrome de duplication inversée 15q11 (inv dup(15) ou syndrome du chromosome 15 isodicentrique (idic(15)), réalise une tétrasomie 15p et une tétrasomie partielle 15q. Le syndrome d'inv dup(15) est déterminé par les remaniements étendus contenant la région critique des syndromes de Prader-Willi/Angelman (PWS/AS). L'incidence estimée à la naissance est de 1/30 000. Le diagnostic repose sur l'analyse cytogénétique standard couplée aux techniques et l'hybridation fluorescente in situ interphasique (FISH), à l'aide de sondes DNA spécifiques du chromosome 15 proximal et de la région critique PWS/AS. L'origine parentale des dup15q11-q13 est très souvent maternelle. Les remaniements étendus avec inv dup(15) intéressant la région critique PWS/ASCR sont sporadiques.
Le tableau clinique est caractérisé par une symptomatologie neurologique sévère et peut-être évoqué cliniquement dans le groupe des enfants présentant une encéphalopathie épileptogène précoce.
Dès la période néonatale, l’enfant présente une hypotonie centrale avec une hyperextensibilité articulaire et une hypersialie. Un contact très pauvre avec l’entourage est remarqué dès cette période. Le retard psychomoteur devient très vite manifeste.
L’épilepsie est pratiquement constante. Elle se manifeste entre l'âge de 6 mois et 9 ans, sous diverses formes de crises souvent rebelles à la thérapeutique. Elle aggrave souvent le déficit intellectuel et a long terme peut être responsable d’une régression des acquisitions motrices. Le déficit intellectuel a comme caractéristique de s’accompagner de troubles autistiques. Le langage expressif est absent ou très pauvre, souvent écholalique. La compréhension est très limitée et contextuelle. L'intention de communiquer est absente ou très limitée. La dysmorphie faciale, quand elle existe, est discrète et les malformations majeures sont rares.
Les remaniements étendus avec inv dup(15) intéressant la région critique PWS/ASCR sont presque toujours sporadiques.
Le syndrome du chromosome 20 est une anomalie résultant de la formation d’un chromosome en anneau. C’est le plus fréquent des anneaux impliquant les autosomes. Il est associé à un tableau clinique identifiable.
Généralement, la constitution d'un anneau s'accompagne de la perte de matériel dans la région subtélomérique d'un ou des deux bras. Les chromosomes en anneau sont instables : au cours de la mitose, l'anneau peut se perdre, ou se dédoubler. Ainsi, les personnes possédant un chromosome en anneau ont un caryotype en mosaïque, avec des cellules normales, des cellules avec le chromosome en anneau, des cellules avec une monosomie, et/ou des cellules avec des anneaux réorganisés ou dupliqués. La proportion de chaque type de cellules peut varier au cours du temps. En ce qui concerne cette anomalie, on distingue aujourd’hui deux groupes de patients ; le premier groupe on n’observe pas de perte des régions subtélomériques des bras courts ou longs et le deuxième groupe dans lequel une perte de la region subtélomérique du bras long et /ou du bras court est observé.
Cliniquement, le syndrome du chromosome 20 en anneau est essentiellement caractérisé par une épilepsie typique et sera reconnu par les médecins épileptologues.
L'épilepsie se traduit par des crises partielles complexes, avec une progression fréquente vers des crises toniques ou tonico-cloniques généralisées. L'épilepsie est quasi systématiquement présente à l'âge de trois ans, mais peut se manifester dès la période néonatale. Les manifestations les plus typiques sont l'épilepsie du lobe frontal et les terreurs et hallucinations ictales. Les crises de panique débutent dans la petite enfance. Chez les jeunes enfants, un tracé d'EEG montrant une activité théta rythmique à ondes lentes avec des pics apparaît sans manifestations cliniques concomitantes (épilepsie électrique inter-ictale). Il prédomine dans la zone frontale. Ces épisodes de mal épileptique non convulsif entraînent une dégradation cognitive progressive qui peut aboutir à un déficit intellectuel plus ou moins sévère. L'épilepsie associée au chromosome 20 en anneau est souvent partiellement ou totalement résistante aux traitements médicaux et chirurgicaux.
Il n'y a pas de dysmorphie caractéristique, bien que macrocéphalie, strabisme, micrognathie, fentes palpébrales anti-mongoloïdes, et anomalies des oreilles aient été rapportés chez certains patients. La croissance pré et post-natale est normale, comme l'est a priori le développement psychomoteur.
Le mécanisme responsable des crises d'épilepsie n'est pas connu, même s'il est possible que deux gènes d'épilepsie (CHRNA4 et KCNQ2) situés dans la région 20q subtélomérique soient impliqués dans la pathogenèse.