4 - Diagnostic de l’hémochromatose


La découverte du gène HFE a profondément modifié la stratégie diagnostique. Il faut cependant se rappeler que la mutation C282Y à l’état homozygote n’est pas suffisante pour produire la maladie.

On doit différencier deux situations :

4. 1 - Suspicion d’hémochromatose

Le diagnostic est souvent évoqué devant :

La stratégie diagnostique est schématisée sur la figure 15.2.

Fig. 15.2. Diagnostic d’une hémochromatose génétique : arbre décisionnel.
1. Première étape

La première étape consiste à affirmer biochimiquement l’anomalie du métabolisme du fer. Il faut mesurer le coefficient de saturation de la transferrine (CS-Tf), qui constitue le marqueur le plus sensible et spécifique de la maladie (+++). Pour un seuil fixé à 45 %, sa sensibilité pour dépister une hémochromatose primitive est de 81 % chez l’homme et de 48 % chez la femme, et sa spécificité est de 94 % et 97 %, respectivement.

Le dosage de la concentration plasmatique de la ferritine permet d’estimer les réserves en fer de l’organisme. Une valeur supérieure à 300 mg/L chez l’homme et à 200 mg/L chez la femme est en faveur d’une surcharge en fer, mais de fausses augmentations sont observées au cours des pathologies inflammatoires. Par ailleurs, au cours de l’hémochromatose, la ferritinémie n’augmente que tardivement lorsque survient la surcharge hépatique en fer. Son dosage permet d’apprécier le stade évolutif de la maladie (+++). Le risque de cirrhose serait nul tant que la ferritinémie est inférieure à 1 000 mg/L et que les transaminases sont normales.

a. CS-Tf supérieur à 45 %

À cette condition, la suspicion d’hémochromatose primitive est forte. L’élévation de la ferritinémie renforce cette présomption mais sa normalité n’élimine pas le diagnostic (+++).

b. CS-Tf inférieur à 45 %

À cette condition, l’hémochromatose primitive peut être éliminée. La constatation fréquente d’une ferritinémie élevée associée à un CS-Tf bas doit faire évoquer une autre cause de surcharge en fer (cf. tableau 15.I), et en particulier :


2. Deuxième étape


La deuxième étape consiste à rechercher une mutation C282Y ou H63D du gène HFE, par analyse génétique, après consentement écrit du patient.

a. Patient homozygote C282Y ou hétérozygote composite

Si le patient est homozygote C282Y +/+ ou hétérozygote composite C282Y/H63D, le diagnostic d’hémochromatose est acquis (HFE1). La ferritinémie permet d’estimer la surcharge ferrique et d’orienter la prise en charge (tableau 15.IV).

Lorsque la ferritinémie est élevée, il existe un risque de retentissement viscéral et métabolique :

Tableau
Evaluation initiale    Interrogatoire
   Examen clinique
   Bilan martial : CS-Tf et ferritine
Résultats du bilan martial    CS-Tf < 45 %
   Ferritine N
   (stade 0)*
   CS-Tf > 45 %
   Ferritine N
   (stade 1)*
   CS-Tf > 45 % et ferritine élevée
   (stades 2 à 4)*
Bilan à pratiquer    Pas d’examens  
  complémentaires
   Rechercher une atteinte :
   – pancréatique (glycémie à jeun)
   – hépatique (transaminases, échographie)
   – cardiaque (échographie pour les stades 3-4)
   – gonadique (dosage de testostérone chez l’homme)
   – osseuse (ostéodensitométrie si cofacteurs d’ostéoporose) Orienter vers un spécialiste en fonction de la clinique et  des résultats du bilan (en particulier si ferritinémie > 1 000 mg/L)
* Cf. tableau15.VI.
b. Patient hétérozygote simplex ou absence de mutation

Si la recherche de mutation est négative ou si le patient est hétérozygote simplex pour C282Y ou H63D, il faut être très critique vis-à-vis du diagnostic d’hémochromatose.

Il faut se souvenir qu’une élévation du CS-Tf n’est pas totalement spécifique de l’hémochromatose (tableau 15.V). Il faut donc toujours confronter les données clinicobiologiques.

Tableau 15.V.Causes d’élévation du coefficient de saturation de la transferrine
   Hémochromatoses génétiques ou primitives  
   Supplémentations martiales excessives
   Anémies hémolytiques
   Dysérythropoïèses
   Cytolyses majeures (hépatite C)
   Insuffisances hépatocellulaires
   Surcharges en fer secondaires
Si le contexte est très évocateur et qu’il existe une élévation persistante de la ferritinémie, on évoquera une autre forme d’hémochromatose héréditaire (hémochromatose juvénile, mutation du gène du récepteur de la transferrine, cf. tableau 15.II), à rechercher par des tests génétiques de 2eintention. En pareil cas, on proposera le plus souvent une ponction-biopsie hépatique qui pourra donner des arguments en faveur d’une probable hémochromatose héréditaire (index de surcharge ferrique, distribution hépatocytaire du fer).

La biopsie hépatique, autrefois couramment utilisée pour le diagnostic, n’est donc utilisée actuellement que :

4. 2 - Dépistage familial

Le dépistage est proposé de manière systématique chez les apparentés du premier degré. Compte tenu du caractère généralement tardif des manifestations cliniques, il est réalisé chez le jeune adulte. Un bilan martial perturbé conduit d’emblée à la réalisation d’un test génétique pour confirmer le diagnostic.

La normalité du bilan martial n’exclut pas le diagnostic. On peut proposer :


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