3  -  Signes cliniques

3 . 1  -  Présentation clinique initiale habituelle

Les signes cliniques initiaux habituellement rencontrés sont les suivants :

  • début rapide ou explosif (quelques semaines), « le coup de tonnerre dans un ciel calme » ;
  • syndrome cardinal (polyuro-polydypsie, amaigrissement, polyphagie) ;
  • troubles visuels transitoires (anomalies de la réfraction, constatées surtout dans les jours qui suivent la normalisation glycémique après introduction de l’insuline) ;
  • examen pauvre : fonte musculaire (quadriceps), exceptionnelle hépatomégalie, recherche de signes d’acidose (dyspnée de Kusmall) ;
  • diagnostic par mesure de la glycémie veineuse (souvent franchement élevée) ;
  • autres éléments, tels que la glycosurie massive et surtout la cétonurie (+++) ;
  • révélation possible par une acidocétose inaugurale.


Il faut noter que cette forme de début très classique ne résume pas les modes d’entrée dans la maladie, tels que l’hyperglycémie de découverte fortuite, le diabète gestationnel ou le bilan familial, par exemple. En outre, l’augmentation de l’obésité dans les sociétés industrialisées fait que la maigreur peut être absente.

3 . 2  -  Formes du diabète de type 1

1. Formes particulières

Toutes ces autres formes du diabète de type 1 sont résumées dans le tableau 13.III.

a. Diabète de type 1 lent ou LADA

Le début est tardif et progressif, voisin de celui du type 2, mais les anticorps sont positifs (anti-GAD surtout) et le recours à l’insulinothérapie va s’avérer nécessaire en 2 à 10 ans. Le LADA représenterait jusqu’à 10 % des diabètes apparemment de type 2 (données de l’étude United Kingdom prospective diabetes study [UKPDS]) (++).

b. Diabète cétosique de l’Africain

Il s’agit du diabète cétosique du sujet noir d’origine africaine subsaharienne (antillais, africain, noir américain). Le début se caractérise par une décompensation cétosique, suivie, après normalisation de la glycémie, d’une possibilité d’arrêt de l’insuline dans 50 % des cas. Les épisodes de cétose peuvent se répéter, entrecoupés de phases de rémission. L’obésité est inconstante. Les anticorps spécifiques du diabète de type 1 sont négatifs. Le mécanisme de ce diabète demeure méconnu. Une origine virale a été avancée.

2. Autres cas

Il existe le cas du diagnostic tardif au stade de coma acidocétosique, que l’on devrait ne plus voir.

Il peut s’agir également d’un diagnostic préclinique à l’occasion d’une évaluation du risque au sein des fratries. Le dosage additionnel des anticorps anti-ICA, anti-GAD, anti-IA2 et anti-insuline permet de quantifier le risque présenté par ces populations encore indemnes. Par exemple, la présence de 3 auto-anticorps positifs confère un risque proche de 100 % de développer un diabète dans les 5 ans (++). L’analyse des groupes HLA est d’un moindre intérêt du fait de la fréquence des antigènes de susceptibilité dans la population générale (en revanche, l’identification de gènes protecteurs aurait plus d’intérêt pour le calcul du risque). Cette démarche de dépistage est réservée à des centres de recherche car actuellement aucune immunomodulation préventive ne s’est avérée efficace pour empêcher l’apparition du diabète (immunosuppresseurs, insulinothérapie sous-cutanée ou orale, nicotinamide, vaccination BCG, etc.). Une intervention préventive ne peut donc se concevoir que dans le cadre d’un protocole expérimental.

La « rémission » ou la « lune de miel » du diabète de type 1 est une période qui peut survenir à la suite du diagnostic d’un diabète de type 1 typique. Il est dans ce cas possible d’équilibrer les glycémies avec de très faibles doses d’insuline, voire d’arrêter transitoirement ce traitement. Cette période, qui peut durer quelques mois, traduit la persistance d’une sécrétion insulinique et donc l’existence de cellules bêta fonctionnelles.

3 . 3  -  Affirmer le type 1 (+++)

Le diagnostic peut être clinique si l’hyperglycémie est associée à la triade classique « maigreur/cétose/âge < 35 ans ».

Si un des critères manque, il est préférable de s’aider de paramètres immunogénétiques : auto-anticorps surtout (+++) et, plus accessoirement, le typage HLA. La mesure du peptide C basal ou après stimulation (glucagon ou repas test) est rarement nécessaire, hors protocole de recherche, où la sécrétion endogène résiduelle doit être mesurée.

Si ces marqueurs sont négatifs, il faudra éliminer les autres formes de diabète pouvant ressembler au type 1, tels les Maturity onset diabetes of the young (MODY) 1 et 3, les diabètes secondaires à une mutation du gène de l’insuline, les diabètes mitochondriaux ou le syndrome de Wolfram. L’interrogatoire et l’histoire familiale, ainsi que l’existence de signes associés tels que les « associations illégitimes » permettront d’orienter la demande de confirmation au moyen du diagnostic moléculaire de l’anomalie génétique. Chez le sujet d’âge moyen, il faudra aussi penser aux diabètes secondaires (cancer du pancréas ou pancréatite chronique, en cas d’alcoolisme, nécessitant une imagerie de la glande ou bien encore l’hémochromatose au contexte évocateur).

Il existe le cas particulier du diabète dit « néonatal », apparu de façon aiguë au cours de la première année de vie (et même plus volontiers pendant les premiers 6 mois). Cette forme très rare doit être traitée lors de sa révélation par l’insuline. Elle peut présenter un caractère permanent ou transitoire mais avec réapparition plusieurs années plus tard. L’absence de marqueurs d’auto-immunité doit faire rechercher une mutation des protéines SUR1 ou Kir6.2, constitutives du canal potassique ATP-dépendant de la cellule bêta. Ces diabètes néonatals non auto-immuns peuvent être traités par les sulfamides, permettant un sevrage complet ou partiel de l’insulinothérapie. Il existe aussi des formes liées à une anomalie homozygote du gène de la glucokinase ou à une mutation du gène de l’insuline.

Tableau 13.III.Les autres formes de diabète
   Autres diabètes   Commentaires
   Diabète gestationnel 
   Diabète génétique monogénique   MODY 1-6
   Diabète mitochondrial
   Syndrome de Wolfram ou DIDMOAD (diabète insipide, diabète sucré, atrophie optique, surdité)  
   Atteinte anatomique du pancréas endocrine   Pancréatite chronique (calcifiée ou non)
   Pancréatectomie totale
   Cancer du pancréas
   Hémochromatose
   Mucoviscidose
   Autres diabètes   Commentaires
   Inhibition fonctionnelle de l’insulinosécrétion   Hypokaliémies (diurétiques sulfamides, laxatifs, hyperaldostéronismes, etc.)
   Diabète transitoire induit par un jeûne prolongé avec dénutrition
   Phéochromocytome (rare, l’hypersécrétion de catécholamines entraîne aussi une     insulinorésistance) Somatostatinome (rarissime)
   Diabète du glucagonome (rarissime)   Il s’accompagne de lésions cutanées spécifiques
   Défauts génétiques de l’action de l’insuline : insulinorésistance  primitive profonde  ±acanthosis nigricans   Anomalie ou absence de récepteurs de l’insuline
   Diabète lipoatrophique
   Anomalies primitives post-récepteurs
   Insulinorésistance secondaire   Hypercorticisme (corticoïdes, plus rarement hypercorticisme)
   Acromégalie
   Hyperthyroïdie
Diabètes iatrogènes   Corticoïdes (sous toutes les formes) et immunosuppresseurs (diabètes
   post-transplantation)
   Diurétiques hypokaliémiants, laxatifs
   Progestatifs de synthèse de type norstéroïdes
   Sympathicomimétiques (Salbutamol®)
   Antiprotéases utilisées dans le traitement du Sida Vacor®, pentamidine
   Interféron (discuté)
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