2  -  Prévention


La prévention repose sur la détection des facteurs de risque et des lésions précancéreuses.

2 . 1  -  Facteurs de risque

Les facteurs de risque sont :

  • l'alcool et le tabac : l'association des deux constituant indéniablement un facteur de risque majeur (cf. encadré et tableau 6.I) ;
  • les irritations chroniques de la muqueuse : qu'elles soient mécaniques, par frottement sur une dent délabrée, une prothèse mal ajustée, ou par morsures répétées, ou qu'elles soient également thermiques (rôle de la chaleur des cigarettes, d'une alimentation brûlante) ;
  • les états carentiels ;
  • les terrains immunodéprimés (greffés, VIH, etc.).


La prévention est affaire d’éducation du public et de politique de santé.

Tableau 6.I Risque relatif de cancers buccopharyngés en fonction de la consommation d'alcool et de tabac
       Alcool*
       0    11,5      11,5–42,5      42,5  
Tabac**          0    1    1,4    2,6    2,3
   < 20    1,5    1,7    1,7    4,1
   20–39      1,2      3,2    4,5    9,6
   ≥ 40    2,4    3,2    8,2    15,5
* En g par jour. ** En cigarettes (= 1 cig) par jour. D'après Rothmann K, Keller A. J Chron Dis, 1972 ; 25 : 711.
  • Le tabac agit :
    • par brûlure chronique
    • par ses composants toxiques (nicotine)
    • par ses composants cancérigènes (hydrocarbures)
  • L'alcool agit, semble-t-il :
    • par action irritante locale directe par l’éthanol (directement proportionnelle à la prise d'alcool)
    • par la dégradation des moyens hépatiques, notamment, de résistance aux agressions externes et aux carences nutritionnelles (avitaminose A)
    • par son rôle de solvant des substances cancérigènes du tabac
  • D'après J.-L. Lefèbvre, L. Adenis. Rev Prat, 1995 ; 45 (7) : 818-24.

2 . 2  -  Lésions précancéreuses

Les lésions précancéreuses précèdent dans environ 10 % des cas la lésion cancéreuse. On distingue les lésions muqueuses blanches (le plus souvent) et rouges.

Lésions muqueuses blanches

Leucoplasie, ou leucokératose

La leucoplasie (fig. 6.1) se caractérise par une plage blanchâtre, souple, ne se détachant pas au grattage et correspondant histologiquement à une accumulation de kératine (hyperkératose) en surface. Plus ces leucoplasies paraissent inhomogènes, plus elles sont suspectes.

Figure 6.1 : Leucokératose

Lichen buccal

Non tant le lichen plan typique, qui peut évoluer vers la chronicité ou même la guérison, que le lichen érosif (fig. 6.2) ou atrophique qui évolue par poussées. La survenue d'un placard érythémateux, irrégulier, parsemé de ponctuations grisâtres, adhérentes, fines et serrées est très évocatrice de cancer.

Figure 6.2 : Lichen buccal plan érosif de la joue

Candidose chronique

Une candidose chronique (fig. 6.3), notamment dans ses formes hyperplasiques, voire pseudo-tumorales, est à surveiller.

Figure 6.3 : Mycose linguale

Papillomatose orale floride

Parfois dénommée kératose villeuse maligne, la papillomatose orale floride (fig. 6.4) se présente sous la forme de touffes de fines villosités plus ou moins allongées, de couleur blanche ou rosée. Cette tumeur est extensive, très récidivante. Son diagnostic nécessite souvent trois ou quatre prélèvements successifs et très profonds. L’évolution vers un carcinome verruqueux est quasi inéluctable.

Figure 6.4 : Papillomatose orale floride

Lésions muqueuses rouges, ou érythroplasies de Queyrat

Les lésions muqueuses rouges, ou érythroplasies de Queyrat (fig. 6.5), sont moins fréquentes mais plus inquiétantes que les lésions blanches. Ce sont des plaques rouges souvent étendues, restant superficielles, d'aspect veloutéàbords irréguliers. L’épithélium est atrophique et recouvre un réseau vasculaire télangiectasique. La lésion intraépithéliale précancéreuse correspond à une dysplasie sévère ou carcinome in situ. Dans 50 % des cas, cette lésion intraépithéliale est déjà associée à un carcinome épidermoïde infiltrant.

Figure 6.5 : Érythroplasie de Queyrat
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