2  -  Caractéristiques cliniques

L’observation clinique de la lésion, mais surtout l’anamnèse, la reconstitution de son développement et de son histoire sont habituellement suffisantes pour affirmer le type d’anomalie vasculaire rencontrée et écarter le diagnostic de tumeur ou d’anomalie d’autre origine.
Les techniques d’imagerie sont complémentaires : choisies en fonction des arguments de l’examen clinique, elles participent le plus souvent, au moins dans les malformations vasculaires, au traitement et à la surveillance.

2 . 1  -  Hémangiomes infantiles (anciennement « angiomes » immatures)

Dix pour cent des enfants en sont porteurs, soit à la naissance (20 % à 50 % d'entre eux), soit peu de temps après (quelques jours à quelques semaines). Ces hémangiomes sont toujours présents avant l’âge d'un an. La prédominance féminine est nette (trois filles pour un garçon pour les formes banales, sept filles pour un garçon pour les formes graves). À la naissance, la peau peut être normale ou marquée par des taches pâles ou des macules télangiectasiques rouges. L'hémangiome se développe en quelques semaines, s’étendant plus ou moins rapidement, puis il se stabilise vers trois à six mois le plus souvent et jusqu’à l’âge d'un an parfois, avant de se résorber lentement sur plusieurs années. Selon que l'atteinte est superficielle, sous-cutanée ou mixte, on distingue :

  • l'hémangiome cutané pur : c'est la « fraise » tubéreuse, de couleur rouge vif ; plus ou moins saillant et étendu, il peut être localisé, arrondi ou segmentaire, parfois très diffus ;
  • l'hémangiome sous-cutané pur : il se présente comme une masse homogène sous-cutanée chaude, de consistance ferme et élastique, ne pouvant jamais être dépressible, posant parfois des problèmes de diagnostic différentiel avec une malformation lymphatique, une encéphalocèle ;
  • l'hémangiome mixte : forme la plus fréquente, elle associe les deux aspects ; la nappe tubéreuse est soulevée par la composante sous-cutanée.


Les examens complémentaires ont deux indications :

  • l'appréciation de l'extension et du retentissement local ou général de l'hémangiome ;
  • le diagnostic positif dans certaines formes sous-cutanées pures.


La place essentielle revient à l’échographie-doppler couleur : l'hémangiome immature se présente sous la forme d'une masse d’échogénicité variable, mais toujours très hypervascularisée (de multiples artères et veines sont présentes à l'intérieur du tissu tumoral). Le nombre des pédicules est variable, de même que les vitesses systoliques qui sont la plupart du temps très élevées ; la valeur de l'index de résistance est en règle générale assez basse malgré l'absence de shunt artérioveineux. Chez le nourrisson, la présence d'une telle masse permet d’éliminer une malformation vasculaire. Le seul diagnostic différentiel reste celui d'une tumeur maligne vascularisée (le rhabdomyosarcome, par exemple). L'IRM sert à préciser l'extension des hémangiomes volumineux au niveau de la face, de l'orbite, de la base du crâne ou du cou. L'artériographie ne doit plus être réalisée.

Formes cliniques

Des formes cliniques sont distinguées :

  • selon la taille et le volume : 80 % des hémangiomes ont moins de 2 cm de diamètre ; tout peut se rencontrer cependant et des formes étendues mettant en jeu le pronostic vital (insuffisance cardiaque) recouvrent plusieurs territoires anatomiques ;
  • selon le nombre : il n'y a pas de relation entre le nombre d'angiomes et la gravité de la maladie. Unique ou multiple, voire dispersé en miliaire, l'hémangiome crée des tableaux variés. L'association à des hémangiomes viscéraux (sous-glotte, foie) péjore le pronostic ;
  • selon la topographie : la localisation faciale concerne 45 % des nourrissons ; elle engendre des conséquences par son développement, son évolution ou ses séquelles :
    • au niveau des paupières : l'atteinte palpébrale (fig. 11.2) est un exemple où l'intervention doit être précoce. Gênant la vision, soit par appui sur la cornée, soit par occlusion de l'axe visuel, l'hémangiome peut engendrer un trouble de réfraction (astigmatisme) et une amblyopie ;
    • au niveau du nez : l'angiome « Cyrano » (fig. 11.3), caractéristique, nécessite souvent une chirurgie précoce, car la tumeur déplace alors les cartilages alaires. Dans ce cas, l'acte chirurgical est précoce, vers deux à trois ans, et il repositionne éventuellement le squelette cartilagineux nasal ; la prescription très précoce d'un bêtabloquant de type propanolol dès le début des poussées dans les localisations à risque a été un grand progrès : on devrait voir diminuer fortement les indications chirurgicales ;
    • au niveau des lèvres : le caractère infiltrant de l'hémangiome est responsable d'une macrochéilie disgracieuse, de type tumoral protrusif (angiome « tapir »), à la lèvre supérieure, et retentit sur la disposition dentoalvéolaire. En cas d'hémangiome de lèvre inférieure, le poids de la tumeur et l'hypotonie labiale engendrée par l'infiltration musculaire angiomateuse créent une expansion labiale inférieure parfois considérable (fig. 11.4) ; elle ne s'oppose plus à la poussée linguale physiologique et favorise l’éversion alvéolodentaire inférieure ;
    • au niveau du cuir chevelu : la localisation est banale et ne s'associe pas à une localisation intracrânienne ; le risque hémorragique à cet endroit (fontanelle) n'est pas plus important ;
    • au niveau du pavillon de l'oreille : l'obstruction du conduit auditif externe peut perturber l’équilibre des pressions au niveau du tympan (risque d'otite externe) ; l'exposition du cartilage entraîne fréquemment une chondrite.
Figure 11.2. Hémangiome palpébral
Figure 11.3. Angiome "Cyrano"
Figure 11.4. Hémangiome labial inférieur

Formes associées

Le syndrome de Kasabach-Meritt, avec sa thrombopénie majeure, est à tort rapportéà l'hémangiome infantile. Il complique un autre type de tumeur vasculaire infantile, très rare et très différente de l'hémangiome.

Il existe un autre type de tumeur vasculaire dont les caractéristiques cliniques sont similaires, mais qui est présente à la naissance à son volume maximal : c'est l’hémangiome congénital. Il en existe deux types :

  • le RICH (Rapid Involuting Congenital Hemangioma), qui involue rapidement ;
  • le NICH (Non Involuting Congenital Hemangioma), dont le traitement est chirurgical.


Formes évolutives

Si l'involution spontanée en quelques années est la marque pathognomonique de l'hémangiome, tout peut se rencontrer, de la restitution ad integrum sans trace séquellaire jusqu’à l’évolution létale en dépit des traitements.

Deux particularités de la maladie sont notables au niveau de la face : l'hémorragie, la nécrose.

Cinquante pour cent des angiomes immatures superficiels de l'enfant évoluent vers une séquelle minime qui ne nécessite pas de correction. Dans les autres cas, la résorption existe mais des séquelles cutanées et sous-cutanées signent la maladie. Le blanchiment de la peau une modification de la texture des tissus sous-cutanés, donnant une peau inélastique et un résidu fibroadipeux.

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