Introduction

Les malformations sont extrêmement hétérogènes, de sévérité variable, allant de la simple disgrâce (malformation mineure), sans caractère pathogène, jusqu’aux grandes malformations incompatibles avec la vie (malformations majeures). Elles sont uniques ou multiples, primaires (vraies) ou secondaires. Certaines sont accidentelles et ne se reproduiront pas, d’autres, au contraire, ont un caractère génétique dont il conviendra de préciser la nature pour évaluer les risques de récidive.

1  -  Généralités

1 . 1  -  Définitions

Une malformation (dysgenèse, malformation primaire) est une anomalie irréversible de la conformation d’un tissu, d’un organe ou d’une partie plus étendue de l’organisme, résultant d’un trouble intrinsèque du développement.

Les malformations sont souvent qualifiées de congénitales ou constitutionnelles car elles sont présentes à la naissance. Cette répétition consacrée par l’usage est inutile, toute malformation étant par définition congénitale, qu’elle soit constatée à la naissance ou plus tardivement. En revanche, toutes les anomalies congénitales ne sont pas des malformations stricto sensu. En effet, on oppose aux malformations vraies (ou primaires), les déformations et les disruptions qui sont secondaires à un facteur extrinsèque (malformations secondaires). Cette distinction est importante en raison de ses implications pour le conseil génétique.

À la naissance, des malformations de causes différentes peuvent se présenter sous la même apparence. C’est l’analyse des faits, corrélée avec l’embryogenèse normale, l’enquête génétique et différentes explorations qui pourront permettre de déterminer l’origine exacte des anomalies.
Exemples :

  • une atrésie du grêle peut résulter de mécanismes différents : la grande majorité des atrésies du grêle est sporadique, d’origine ischémique. Néanmoins elles peuvent aussi révéler une maladie récessive autosomique, telle que la mucoviscidose, les sécrétions digestives anormalement épaisses pouvant former un obstacle digestif responsable ensuite d’une atrésie intestinale ;
  • une hydrocéphalie (dilatation des cavités ventriculaires cérébrales) peut être acquise et sporadique (toxoplasmose) ou déterminée génétiquement (transmission récessive autosomique ou liée à l’X).

1 . 1 . 1  -  Malformations vraies (primaires)

Les malformations vraies résultent d’un événement génétiquement déterminé (intrinsèque) pouvant se produire à n’importe quel stade du développement intra-utérin.

Elles peuvent se manifester par des modifications morphologiques (phénotypiques) et/ou des conséquences fonctionnelles. Selon leur gravité, on distingue des malformations majeures, qui compromettent la santé ou la survie, et des malformations mineures, qui correspondent à des variantes anatomiques du normal, sans conséquence sur la survie, facilement réparables et pouvant rester méconnues.

La fréquence des malformations primaires est d’environ 2 % chez les enfants nés vivants, beaucoup plus élevée chez les mort-nés (12–14 %).

Elle est globalement sous-évaluée du fait que les malformations embryonnaires et fœtales ne sont pas toujours prises en compte dans les statistiques et que d’autres malformations peuvent se révéler tardivement ou rester latentes.

1 . 1 . 2  -  Malformations secondaires

Les malformations secondaires résultent d’un facteur extrinsèque perturbant les processus normaux du développement. Il peut s’agir d’une perturbation de la formation normale d’une structure (déformation), ou d’une lésion secondaire d’un organe ou d’une structure déjà formés (disruption : néologisme anglo-saxon).

Une disruption (ou séquence disruptive) est un processus de nature destructrice induisant un défaut morphologique d’origine extrinsèque par perturbation du processus normal de développement (figure 5.1).

Figure 5.1. Processus pathogènes aboutissant aux anomalies congénitales
Il est important d’utiliser chaque terme à bon escient puisque chacun sous-entend une pathogénie précise (d’après JE Dimmick et DK Kalousek Developmental pathology of Fetus & Embryo. Chap. 5 132, 1992, JB LIPPINCOTT COMPANY).

1 . 1 . 3  -  Polymalformations : syndrome - association - séquence

Les polymalformations sont définies par l’association d’au moins deux malformations. Elles peuvent correspondre à trois situations différentes.

  • Une séquence est un ensemble d’anomalies qui sont toutes la conséquence en cascade d’une seule anomalie ou d’un facteur mécanique : exemple de la séquence oligo-amnios ou séquence de Potter, consécutive à un manque de liquide amniotique.
  • Un syndrome malformatif est un ensemble d’anomalies non liées entre elles, dérivant toutes de la même cause et ne correspondant pas à une séquence : exemple de la trisomie 21 dont l’ensemble des malformations réalise le syndrome de Down.
  • Une association est la survenue non fortuite d’au moins deux malformations non reconnues comme séquence ou syndrome : exemple de l’association VACTER, acronyme pour malformations « vertébrales, anales, cardiaques, trachéales, œsophagiennes, radiales et/ou rénales ».


Un sixième des enfants malformés est polymalformé. Les polymalformés représentent 4,5 % des enfants mort-nés et moins de 0,5 % des enfants vivants.

N.B. : sur le plan anatomoclinique, le problème essentiel sera de différencier les associations polymalformatives héréditaires de celles qui ne le sont pas.

 Exemples de syndromes malformatifs.

1 . 2  -  Date de survenue des malformations

Deux moments sont à considérer : celui de la détermination des malformations et celui de leur manifestation.

Moment de détermination

Les malformations vraies sont déterminées avant la fécondation, en péri-conceptionnel ou encore en post-conceptionnel (premières divisions blastomériques). Avant la conception, il s’agit d’anomalies géniques, héréditaires, présentes sur les chromosomes des gamètes des deux parents et transmises selon les lois de Mendel. Au moment de la conception, elles sont en rapport avec des aberrations chromosomiques ou des mutations géniques récentes (de novo). Enfin, les malformations secondaires sont déterminées après la fécondation : embryopathies et fœtopathies.

Moment de survenue

Dans le cas des malformations vraies, leur manifestation, à la période embryonnaire, est décalée par rapport au moment de détermination.
Pour les malformations secondaires, la manifestation est en général contemporaine de l’agression (périodes embryonnaire ou fœtale). De plus, le phénomène pathologique peut se prolonger longtemps après son apparition (y compris après la naissance).

1 . 3  -  Relations entre apoptose et développement

Le phénomène d’apoptose (ou mort cellulaire programmée) n’est pas important seulement en cancérologie ; il constitue aussi un intervenant majeur dans le développement embryo-fœtal. En effet, il est à l’origine de phénomènes aussi importants que la tunnellisation des organes creux (tube digestif) et la séparation des doigts et orteils.

En outre, il est à l’origine de phénomènes pathologiques survenant plus tardivement au cours du développement, comme la mort neuronale précoce au cours de certaines maladies dégénératives (ex : amyotrophies spinales).

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