2 . 4  -  Techniques particulières

Examen histologique extemporané

Il s’agit d’un examen anatomopathologique pratiqué dès que le prélèvement est effectué, non fixé, pendant une intervention chirurgicale, afin de fournir rapidement au chirurgien un diagnostic susceptible de modifier le déroulement de l’acte chirurgical.

Les motifs les plus fréquents de demandes d’examens histologiques extemporanés sont :

  • déterminer la nature inflammatoire ou tumorale d’une lésion et, en cas de tumeur, sa nature bénigne ou cancéreuse pour déterminer l’importance du geste d’exérèse chirurgical ;
  • s’assurer qu’une biopsie chirurgicale a bien intéressé un territoire lésionnel représentatif de la maladie ;
  • s’assurer que des limites de résection sont saines.

La technique utilise la macroscopie et, le plus souvent, des coupes au cryomicrotome (crystat) et une coloration rapide, ce qui permet un résultat en moins de 30 min (figure 1.14).

Figure 1.14 : Examen histologique extemporané
A. Étude macroscopique du prélèvement frais.
B. Un fragment est prélevé et fixé sur un portoir.
C. Le fragment congelé est coupé dans un cryostat.
D. Coupe de tissu congelé colorée au Bleu de toluidine.

Cependant au cours d’un examen extemporané, la morphologie tissulaire n’est pas d’aussi bonne qualité qu’après une fixation et inclusion en paraffine, en raison de la congélation qui altère la morphologie cellulaire. En outre, pour respecter un délai de réponse court, il n’est pas possible d’examiner en totalité une lésion volumineuse. Le diagnostic fourni par un examen extemporané n’est donc pas aussi fiable qu’un diagnostic histologique conventionnel : il ne doit être considéré que comme un diagnostic de présomption.

Les tissus calcifiés ne peuvent être coupés dans un cryostat et ne peuvent donc pas faire l’objet d’un examen histologique extemporané.

Colorations histochimiques spéciales

Des colorations spéciales ont pour but de mettre en évidence des constituants particuliers des cellules (glycogène, mucus, pigments, etc.), ou de la matrice extra-cellulaire (collagènes, fibres élastiques, amylose, etc.), ainsi que des agents infectieux (bactéries, parasites, champignons). Ces colorations sont très variées (tableau 1.1) et leur mise en Ĺ“uvre rallonge le processus technique (figures 1.15–1.25).

Tableau 1.1. : Lister des colorations histochimiques les plus courantes
Figure 1.15 : Coloration de PAS-bleu Alcian sur les cellules caliciformes mucisécrétantes de la muqueuse intestinale.
Figure 1.16 : Coloration de rouge Congo d’une amylose glomérulaire (lumière non polarisée).
Figure 1.17 : Coloration de rouge Congo d’une amylose glomérulaire : aspect dichroïque vert-jaune des dépôts amyloïdes en lumière polarisée.
Figure 1.18 : Coloration de Perls : surcharge hémosidérinique dans des hépatocytes (granules bleus)
Figure 1.19 : Coloration de Fontana-Masson sur un nævus nævocellulaire cutané
Mélanocytes chargés de mélanine (noire) autour d’une glande sébacée.
Figure 1.20 : Coloration de trichrome de Masson au bleu d’aniline sur tissu hépatique ; coloration bleue du collagène d’un espace porte.
Figure 1.21 : Coloration au rouge Sirius : nodules hépatiques hyperplasiques régénératifs
Figure 1.22 : Coloration de Gomori des fibres élastiques (flèches) d’une artère temporale
Figure 1.23 : Coloration de Weigert des fibres élastiques d’une artère temporale
Figure 1.24 : Coloration de Grocott d’un filament fungique (aspergillus)
Figure 1.25 : Coloration de Whartin-Starry : bactéries du genre Hélicobacter Pylori dans une crypte gastrique, colorées en noir

Histoenzymologie

Certains enzymes peuvent être mis en évidence sur des coupes congelées ou parfois après inclusion dans la paraffine. La coupe est incubée dans un substrat spécifique de l’activité enzymatique recherchée. La réaction libère un produit coloré, ou colorable, qui peut être visualisé au microscope optique. L’application la plus courante est l’étude des biopsies musculaires pour myopathies.

Immunohistochimie

L’immunohistochimie consiste à mettre en évidence divers antigènes (Ag) cellulaires, ou extra-cellulaires, grâce à des anticorps (Ac) spécifiquement dirigés contre eux, sur des préparations cytologiques (immunocytochimie), ou sur des coupes de tissus congelés, ou fixés, et inclus en paraffine. Les Ag recherchés peuvent être des Ag membranaires, cytoplasmiques ou nucléaires, ou des protéines de la matrice extra-cellulaire.

L’immunofluorescence directe est surtout utilisée pour mettre en évidence les dépôts tissulaires d’immunoglobulines et de complément dans les biopsies cutanées et dans les biopsies rénales congelées, observées grâce à un microscope à fluorescence (figure 1.26).

Figure 1.26 : Immunofluorescence sur une biopsie rénale congelée
Mise en évidence de dépôts anormaux de chaînes légères kappa dans les membranes basales des tubes (maladie des dépôts de chaînes légères d’immunoglobulines)

Dans les méthodes immunoenzymatiques indirectes, l’Ac spécifique primaire est déposé sur le tissu, puis il est révélé par un 2e Ac couplé à une enzyme à laquelle on fournit son substrat. Le produit coloré de la réaction enzymatique apparaît au niveau du site des complexes Ag-Ac (figure 1.27).

Figure 1.27 : Mise en évidence immunohistochimique de l’insuline dans un îlot de Langerhans (technique d’immunoperoxydase sur tissu pancréatique fixé et déparaffiné)

L’intensité du signal obtenu après marquage d’une réaction antigène-anticorps dépend du nombre de molécules colorées visibles. Plusieurs mécanismes d’amplification sont possibles, parmi lesquels les méthodes à trois couches, ou l’utilisation de polymères portant plusieurs molécules d’anticorps. L’augmentation du temps d’incubation et le prétraitement des coupes déparaffinées par la chaleur ou des enzymes augmentent aussi l’intensité du signal.

L’immunohistochimie est très largement utilisée avec de multiples indications parmi lesquelles :

  • intérêt diagnostique : classification précise de nombreuses tumeurs par la mise en évidence d’antigènes de différenciation cellulaire, mise en évidence de certains agents infectieux ;
  • intérêt pronostique : mise en évidence de protéines impliquées dans la prolifération cellulaire, ou de produits d’oncogènes ;
  • intérêt thérapeutique : mise en évidence de cibles thérapeutiques, telles que les récepteurs nucléaires aux estrogènes et la protéine Her2 dans les cancers du sein.
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