L’arthrose est caractérisée par une dégradation du cartilage associée à des remaniements de l’os sous-chondral, une production d’ostéophytes et des épisodes limités d’inflammation synoviale. C’est donc une maladie de l’articulation et pas seulement une maladie du cartilage (figures 5.1 et 5.2).
Tout dépend, bien sûr, du stade de la maladie. Il semble que l’on puisse la diviser en trois stades qui se succèdent, sachant
que sur une surface cartilagineuse, les lésions ne sont pas forcément toutes au même stade évolutif. Cette distinction est donc forcément caricaturale.
a. Stade initial
Au stade initial, le cartilage est oedématié. Cette réponse à l’agression initiale du tissu peut être assimilée à une tentative de réparation du cartilage, sous l’effet de facteur de croissance chondrocytaire, qui va échouer pour des raisons encore mal comprises. Il y a surproduction de protéoglycanes qui entraînent une hyperhydratation néfaste, aboutissant au ramollissement du cartilage. Il est possible que la dissociation précoce des fibres collagènes liée à ce phénomène soit un point clef dans la physiopathologie de la maladie.
Très rapidement, s’installe une synthèse défaillante avec des protéoglycanes de taille inférieure et synthèse d’un néocollagène (de type I), dont les propriétés biomécaniques sont moins bonnes.
Cette activité anabolique va également se traduire par la production d’ostéophytes sous l’influence de facteurs de croissance tels que le
TGFb. L’os sous-chondral riche en facteurs de croissance pourrait jouer un rôle dans la tentative de réparation des lésions cartilagineuses.
b. Stade intermédiaire
Le stade 2 est caractérisé par l’apparition de fissures superficielles. Le premier phénomène est une hyperactivité catabolique du chondrocyte (destruction autocrine) et, par intermittence, de la membrane synoviale qui largue des enzymes et des cytokines délétères dans le liquide synovial (destruction paracrine). La destruction de la matrice est le fait d’enzymes protéolytiques (métalloprotéases et agrécanases) et glycolytiques produites sous l’effet de cytokines pro-inflammatoires. L’hyperactivité enzymatique déborde les capacités d’inhibition des inhibiteurs enzymatiques.
Le second phénomène est une sidération des capacités anaboliques du chondrocyte. Certaines cytokines (IL-1 et TNF, par exemple) commandent l’inhibition de la synthèse des composants naturels du chondrocyte.
Le troisième phénomène est un défaut comportemental de la cellule. Le chondrocyte peut se différencier en un fibrochondrocyte synthétisant des composants normalement absents ou présents en faible quantité : néocollagène de type I, versicane, fibronectine et autres protéines non collagéniques. Par ailleurs, il existe un réenclenchement du cycle de maturation cellulaire qui amène à une prolifération du chondrocyte puis à son hypertrophie et enfin à sa mort par apoptose.
Finalement, défaut de réponse anabolique, déséquilibre entre enzymes et leurs inhibiteurs, mort cellulaire par nécrose ou par apoptose du chondrocyte s’additionnent et contribuent à la dégradation de la matrice extracellulaire. Cette
matrice, par ailleurs de mauvaise qualité, résiste moins bien aux pressions cycliques, ce qui autoentretient la maladie.
c. Stade final
À un stade avancé, la destruction gagne les couches profondes mettant à nu l’os sous-chondral.
Il persiste des chondrocytes hypertrophiques, ou en voie d’apoptose, ainsi qu’un tissu fibrocartilagineux.
Beaucoup d’inconnues persistent quant au rythme de la destruction et à ses variations spatio-temporelles. L’activation de la membrane synoviale, par les débris du cartilage et/ou les microcristaux libérés dans la cavité synoviale, pourrait contribuer à la chondrolyse. De même, les altérations de l’os sous-chondral contribuent également à pérenniser la maladie.
L’activation du chondrocyte est extrêmement complexe ; elle résulte de différents médiateurs : cytokines, phospholipides membranaires, monoxyde d’azote (NO), dérivés oxygénés. Une fois activé, le chondrocyte va lui-même produire en excès ces médiateurs pro-inflammatoires. Cependant, on ignore pourquoi certaines arthroses sont peu évolutives et pourquoi certaines sont, au contraire, très rapidement destructrices.