2  -  L'examen du malade en ophtalmologie

2 . 1  -  Interrogatoire


L'interrogatoire a pour but essentiel de préciser le trouble visuel :

  • baisse d’acuité visuelle : elle peut intéresser la vision de près et/ou la vision de loin :
    • certaines affections entraînent préférentiellement une baisse d’acuité visuelle de loin (ex: cataracte sénile),
    • d’autres à la fois une baisse d’acuité visuelle de loin et de près (ex: les principales affections de la macula),
    • une baisse de vision de près isolée est due le plus souvent à une presbytie.
    • la baisse d'acuité visuelle peut être permanente ou transitoire : on parle alors d'amaurose transitoire (voir chapitre 12 "Anomalies de la vision d'apparition brutale").
  • sensation de fatigue visuelle (difficultés à soutenir l’attention, ou céphalées sus-orbitaires en fin de journée) : peuvent traduire une insuffisance de convergence.
  • myodésopsies (sensation de "mouches volantes" ou de "corps flottants") et phosphènes (sensation d'éclairs lumineux) sont le plus souvent des signes bénins mais sont parfois des signes annonciateurs de décollement de la rétine.
  • métamorphopsies = déformation des lignes droites qui apparaissent ondulées.
  • héméralopie = gêne en vision crépusculaire ou lors du passage d'un milieu bien éclaire à l'obscurité; principal signe de la rétinopathie pigmentaire.
  • anomalie du champ visuel : il peut s'agir :
    • d'un scotome central ou cæeco-central : tache centrale sombre (scotome central relatif) ou complètement noire (scotome central absolu), associée à une baisse d'acuité visuelle ; un scotome central et/ou des métamorphopsies sont facilement dépistés par les grilles d'Amsler.
    • d'une amputation du champ visuel périphérique qui peut être soit monoculaire : par atteinte rétinienne ou du nerf optique, soit binoculaire, par atteinte neurologique.

Un examen du champ visuel par confrontation permet de dépister un déficit important du champ visuel ; il s’agit d’une méthode de débrouillage grossier par confrontation « au doigt « : l’examinateur et le patient sont face à face, à 50 cms l’un de l’autre, et se masquent chacun un oeil ; l’examinateur compare, en mobilisant son doigt, les limites périphériques du champ visuel du patient avec les siennes. Il s’agit d’un examen grossier, rapide, qui permet de dépister des déficits importants comme une hémianopsie.

Un relevé précis du champ visuel ne peut être cependant être obtenu que par la périmétrie (voir plus loin).

Le mode d'installation des signes doit être précisé (++++) :

  • progressif, il évoque une affection d’évolution lente (exemple : cataracte, métamorphopsies d’apparition progressive évoquant une affection maculaire peu sévère),
  • brutal, il évoque une atteinte sévère nécessitant une prise en charge urgente (exemples : métamorphopsies d’apparition brutale évoquant une forme compliquée de dégénérescence maculaire liée à l’âge, baisse d’acuité visuelle brutale par occlusion artérielle rétinienne ou neuropathie optique).

Attention
Certaines affections sévères ne s’accompagnent d’une baisse d’acuité visuelle qu’à un stade évolué : c’est le cas du glaucome chronique et de la rétinopathie diabétique.

L'interrogatoire veille à caractériser le type des douleurs :

  • superficielles
    • minimes, à sensation de "grains de sable" évoquant une simple conjonctivite,
    • intenses, avec photophobie (crainte de la lumière) et blépharospasme (fermeture réflexe des paupières) évoquant un ulcère de la cornée,
  • profondes :
    • modérées, évoquant une affection inflammatoire intraoculaire
    • intenses, irradiées dans le territoire du trijumeau (exemple : glaucome aigu).

L'existence d'une diplopie (vision double) doit être recherchée;  il peut s’agir d’une diplopie monoculaire ou binoculaire :

  • diplopie monoculaire : diplopie par dédoublement de l’image au niveau de l’oeil atteint, ne disparaissant pas à l’occlusion de l’autre oeil,
  • diplopie binoculaire : n’est présente que les deux yeux ouverts et disparaît à l’occlusion de l’un ou l’autre des deux yeux.

L'interrogatoire précise l'évolution des signes :

  • amélioration spontanée ou avec un traitement local (ex. conjonctivite traitée par des collyres antibiotiques)
  • symptomotalogie stable
  • aggravation :
    • lente, traduisant en principe une affection peu sévère,
    • rapide, signe de gravité +++.

Enfin l'interrogatoire doit recenser les éventuels antécédents oculaires :

  • épisodes analogues antérieurs ?
  • épisodes analogues dans l’entourage ?
  • autres affections oculaires ?
Figure 9 : Grille d'Amsler : sujet normal
Figure 9bis : Grille d'Amsler : scotome central et métamorphopsies
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