5  -  Traitement

5 . 1  -  Moyens thérapeutiques médicamenteux

Il s’agit d’une étape souvent décevante pour le clinicien et surtout pour le malade ! Les moyens thérapeutiques sont médicamenteux ou non. Les guérisons ou les améliorations spectaculaires durables sont inhabituelles. Faute de traitement curatif, le seul but de la prise en charge consiste à améliorer le confort somatique (avant tout diminuer la douleur) et psychologique. Le caractère fluctuant des symptômes et un fort effet placebo (voisin de 40 %) rendent difficile l’appréciation de l’efficacité des médicaments, que seuls des essais thérapeutiques randomisés contre placebo et en double aveugle peuvent évaluer.

En pratique clinique, si l’efficacité à court terme de certains médicaments se vérifie souvent, son maintien à long terme est plus aléatoire. La meilleure thérapeutique reste finalement l’écoute du patient et une discussion renouvelée lors des consultations, l’amenant à comprendre l’origine de ses symptômes.

5 . 2  -  Médicaments à effet antalgique

Antispasmodiques

Ils demeurent le traitement de première intention même si les essais cliniques n’ont pas constamment observé une supériorité thérapeutique par rapport au placebo. Parmi les antispasmodiques, la mébévérine, le bromure de pinavérium et la trimébutine se sont révélés supérieurs au placebo. Certains antispasmodiques sont associés à des anxiolytiques. Le phloroglucinol est surtout employé pour traiter les accès douloureux paroxystiques avec la recherche d’une dose minimale efficace.

Pansements gastro-intestinaux

Ils font partie des moyens médicamenteux possibles même si leur efficacité réelle demande à être confirmée.

Médicaments agissant sur la sensibilité viscérale

Cette approche pharmacologique est la plus récente et la plus prometteuse, depuis la démonstration d’une hypersensibilité viscérale chez plus de 50 % des malades souffrant d’un SII.

L’utilisation d’antidépresseurs tricycliques, à faibles doses, apporte chez certains malades un bénéfice réel, avec des effets secondaires limités. L’effet symptomatique des inhibiteurs de la recapture de la sérotonine demeure peu documenté.

1. Médicaments régularisant le transit

Laxatifs


Ils cherchent à favoriser le transit et/ou à ramollir les selles pour faciliter leur expulsion. Les laxatifs osmotiques à base de polyéthylène glycol (Forlax, Movicol, Transipeg) ou de sucres (Duphalac,  Importal) sont les plus employés. Cette dernière classe, comme les mucilagineux à base de gomme (Spagulax, Transilane) peut majorer la sensation de ballonnement abdominal.

Anti-diarrhéiques

Il s’agit essentiellement d’opiacés synthétiques type lopéramide (Arestal,  Imodium) qui agissent en inhibant la motricité et en augmentant la capacité du tube digestif à stocker les liquides.

2. Traitement du ballonnement abdominal

Aucun médicament n’a fait la preuve de son efficacité sur ce symptôme. Un essai thérapeutique peut être fait avec des médicaments contenant des agents comme le charbon ou le polysilane, non toxiques et peu onéreux.

5 . 3  -  Utilité d’un régime ?

Il n’existe aucun argument formel pour proposer d’exclure tel ou tel type d’aliment pour soulager les symptômes. L’enrichissement en fibres a comme seul effet d’améliorer une constipation, sans modifier la douleur. Aux doses efficaces (15 g de fibres par jour), cet enrichissement peut avoir des effets délétères très nets avec une majoration du ballonnement abdominal. Il convient donc d’être prudent dans les recommandations diététiques et encourager un régime le plus large possible afin d’éviter notamment un régime d’exclusion, trop strictement suivi par des malades obsessionnels et aboutissant à des troubles nutritionnels.

5 . 4  -  Médicaments agissant sur la flore

Cette option thérapeutique est en cours d’évaluation. Le recours à des probiotiques est une piste actuelle dont l’intérêt demande à être confirmé. L’utilité de proposer un traitement antibiotique à certains malades est très débattue.

5 . 5  -  Prise en charge psychologique

Dans cette maladie multifactorielle, où le système nerveux central joue un rôle important, notamment dans la genèse de l’hypersensibilité, cette approche ne peut être négligée. Ses résultats sont très mal évalués mais quelques essais suggèrent qu’elle pourrait augmenter le nombre de malades améliorés par le traitement médicamenteux. L’hypnose, la relaxation, la sophrologie, des entretiens avec un(e) psychologue, la participation à un groupe de parole pour verbaliser les difficultés émotionnelles et/ou affectives, sont autant
d’alternatives.

Des anxiolytiques ou des antidépresseurs, à doses faibles peuvent être utiles pour leurs effets psychologiques cette fois et non antalgiques.

5 . 6  -  Indications thérapeutiques

L’important est d’écouter et de rassurer le patient, en lui faisant comprendre qu’il est cru malgré l’absence de données objectives et que ses symptômes (notamment sa douleur) sont perçus comme bien réels. Les antispasmodiques et un traitement des troubles du transit correspondent, pour l’instant, au schéma thérapeutique de première intention, qui peut être suffisant. L’arrivée des médicaments à action sensitive viscérale pourra modifier cet état de fait.

Chez les malades ayant des symptômes anciens, chez ceux exposés régulièrement à des stress psychologiques (notamment dans leur travail) et ceux ayant dans leur histoire des événements de vie majeurs douloureux, ce traitement de première intention est transitoirement efficace. Chez de tels malades, chez qui la symptomatologie correspond souvent à une demande d’aide pour un important mal de vivre, une prise en charge psychologique et le recours à des antidépresseurs ou des anxiolytiques, sont alors nécessaires.

(1)  Recommendations for the clinical management and treatment of chronic constipation in adults.
(2)   An Evidence-Based Position Statement on the Management of Irritable Bowel Syndrome.

Conclusion

La connaissance de la physiopathologie du SII a progressé, notamment avec l’exploration possible des voies de la sensibilité viscérale. La prise en charge actuelle du SII repose sur la qualité de la relation médecin-malade et sur quelques médicaments réellement efficaces. Le développement de médicaments agissant sur la sensibilité viscérale et le recours à une prise en charge comportementale dans les cas les plus sévères de SII, sont deux évolutions importantes.

5/5