Dans 0,5 à 1 % des traitements par HNF et plus rarement sous HBPM, l’héparine peut entraîner une thrombocytopénie immunologique. Le système immunitaire produit des anticorps dirigés le plus souvent contre le complexe héparine-facteur 4 plaquettaire (F4P). Les anticorps se lient aux plaquettes qui sont fortement activées, s’agrègent et libèrent des microparticules, riches en phospholipides procoagulants. Les plaquettes, recouvertes d’anticorps, sont ensuite éliminées, ce qui explique la thrombopénie. Les anticorps activent aussi les monocytes et les cellules endothéliales qui synthétisent le facteur tissulaire et libèrent également des microparticules procoagulantes. Il en résulte une agrégation intravasculaire des plaquettes et une activation systémique de la coagulation avec risque élevé de thromboses artérielles et veineuses (présentes dans un cas sur deux). Ce tableau clinicobiologique survient typiquement entre le 5e et le 21e jour d’un traitement par héparine (au sens large). Il doit être évoqué devant toute chute des plaquettes de plus de 50 %. Le risque de thrombopénie induite par l’héparine (TIH) survient plus fréquemment avec les HNF qu’avec les HBPM, et est actuellement considéré comme inexistant avec le fondaparinux. Le diagnostic doit être confirmé dans tous les cas par la mise en évidence d’anticorps anti-FP4 en ELISA, et/ou par des tests fonctionnels montrant l’activation des plaquettes en présence d’héparine. La thrombocytopénie s’associe à un risque élevé de thromboses artérielles et veineuses, ce qui justifie l’arrêt immédiat du traitement en cours par l’héparine et nécessite la prescription d’un traitement antithrombotique de substitution. Deux molécules peuvent être utilisées dans cette indication : le danaparoïde de sodium (Orgaran®) et la lépirudine (Refludan®). Sous ce traitement antithrombotique, la surveillance sera clinique (bonne évolution avec amélioration des thromboses, en l’absence de toute nouvelle manifestation thrombotique voire hémorragique) et biologique (surveillance de la numération plaquettaire, surveillance de l’efficacité de l’antithrombotique de substitution).
Le dépistage de cette complication repose sur la numération des plaquettes chez tout patient traité par une HNF et sous HBPM. Cela suppose une numération plaquettaire avant l’instauration du traitement par héparine. Selon les recommandations actuelles, la surveillance de la numération plaquettaire est indispensable lorsque l’héparine est utilisée en curatif, et, pour le préventif, en situation postopératoire, et ce à raison de deux numérations plaquettaires par semaine pendant 3 semaines puis d’une numération plaquettaire hebdomadaire, jusqu’à l’interruption du traitement. Hors chirurgie, en préventif, cette surveillance peut être proposée, notamment dans des situations jugées à risque.
Un traitement prolongé de plusieurs mois peut entraîner une ostéoporose. Le phénomène semble plus fréquent et important avec l’HNF qu’avec l’HBPM.