2  -  En l'absence de facteurs d'orientation, quel bilan paraclinique de première intention proposer ?

Démarche diagnostique initiale devant une stérilité du couple

À l'issue de cette première consultation, des éléments permettent parfois une orientation plus spécifique des explorations complémentaires. Lorsqu'aucun facteur d'orientation n'est mis en évidence, un bilan de première intention est proposé.

2 . 1  -  Pour apprécier le versant féminin

2 . 1 . 1  -  Une courbe ménothermique

La courbe ménothermique doit être réalisée sur au moins 2 cycles. Pour être interprétable, la température basaleDéfinitionBasal : Terme médical indiquant la valeur de référence par rapport à laquelle on mesure une inconnue. doit être prise dans des conditions précises : toujours avec le même thermomètre, toujours par la même voie (auriculaire, rectale, buccale, axillaire…), le matin au réveil, avant de mettre le pied par terre.

Il convient de disposer de feuilles adaptées avec une échelle bien lisible au dixième de degré, entre 36° et 37°. Il faut noter sur la feuille, la date et le jour du cycle, les prises thérapeutiques, les phénomènes pathologiques intercurrents qui peuvent modifier la température (phénomènes inflammatoires, nuit agitée…).

Normalement, pendant les jours qui suivent les règles, la température basale se maintient aux environs de 36,5°. Puis de façon brutale la température monte : c'est le décalage post-ovulatoire. L'ovulation est repérée comme étant le point le plus bas avant l'ascension de la courbe. Suit un plateau thermique de 12 à 14 jours. Puis la température retombe la veille ou le premier jour des règles (cf. courbe ci-après).

Courbe ménothermique normale

En cas de dysovulationDéfinitionOvulation irrégulière., la montée thermique se fait sur plusieurs jours et le plateau thermique est instable, inférieur à 10 jours. Une anovulationDéfinitionAbsence d'ovulation lors d'un cycle. se remarque par une absence de décalage thermique.

L'établissement de cette courbe présente trois intérêts : caractériser les troubles du cycle, fixer certaines explorations dans le cycle et suivre les effets de certains traitements médicaux.

2 . 1 . 2  -  Une hystérosalpingographie

L'hystérosalpingographieDéfinitionExamen de la cavité utérine et des trompes qui ne sont pas visibles sur des radiographies standards. Cet examen est très utile dans les bilans de stérilité, d'infections répétitives, de saignements génitaux, de douleurs… Elle recherche des anomalies telles qu'une tumeur, un fibrome ou un rétrécissement des voies génitales. (voir hystérosalpingographie) est indispensable dans le bilan de stérilité. Elle se réalise en première partie de cycle, après les règles et en dehors de tout contexte infectieux. Il convient de vérifier l'absence d'allergie à l'iode, sinon une préparation spécifique est nécessaire. Dans cette population à plus haut risque infectieux, de nombreux médecins réalisent cet acte sous couverture antibiotique de principe pour éviter l'apparition d'une salpingite au décours de la radiographie. Elle permet d'apprécier :

Hystérosalpingographie normale
Malformation de la cavité utérine (utérus cloisonné)
Hydrosalpinx G
  • la perméabilité tubaire, c'est-à-dire le constat d'un brassage péritonéal (visualisation du produit de contraste dans la cavité péritonéale) et non la seule visualisation des trompes.

 Blanc B, Cravello L, Bretelle F, Roger V., Hystérosalpingographie. Encyclopédie Médico-Chirurgicale : Gynécologie. 1999; 68-A-10.

2 . 1 . 3  -  Un bilan hormonal de base

En dehors d'un signe d'appel clinique particulier (hirsutisme, aménorrhéeDéfinitionAbsence des règles, de menstruation. Le plus souvent, la grossesse en est la cause. Dans les autres cas, l'aménorrhée peut être l'unique symptôme d'une pathologie ou au contraire, un parmi de nombreux autres. La recherche de la cause d'une aménorrhée nécessite rarement des examens nombreux. La prise en charge thérapeutique est parfois plus délicate.-galactorrhée…), le bilan hormonal comporte l'évaluation au troisième ou au quatrième jour du cycle de FSH, LH et estradiolDéfinitionEstradiol ou œstradiol : Dérivé naturel du métabolisme du cholestérol (via la testostérone), et d'intérêt vital pour le maintien de la fertilité et des caractères sexuels secondaires chez la femme. plasmatiques. Une FSH élevée (supérieure à la moyenne plus 2 DS pour le laboratoire et souvent le seuil de 10 UI/l est retenu) et/ou une estradiolémieDéfinitionEstradiolémie ou œstradiolémie : taux d'estradiol. majorée (75 pg/mL) signent, même en dehors de tout trouble patent clinique du cycle menstruel, une accélération de la maturation ovocytaire. Alors des tests hormonaux plus sophistiqués seront prescrits pour tenter de déterminer le pronostic fonctionnel.

2 . 2  -  Pour apprécier le versant masculin

Un spermogrammeDéfinitionExamen médical au cours duquel on analyse le sperme d'un homme, généralement dans le cadre d'un bilan de stérilité d'un couple. et un spermocytogrammeDéfinitionSpermocytogramme ou examen cytologique des spermatozoïdes : Examen qui se pratique sur des cellules fixées sur lame de microscope, après coloration. Plus que le spermogramme, au-delà des anomalies physiques et externes du spermatozoïde, il s'attache à détecter les anomalies intracellulaire du gamète, et en particulier du noyau dont certaines caractéristiques – au moyen de certaines colorations – peuvent être observées au microscope. Cet examen permet notamment de détecter une éventuelle tératospermie. : ils doivent être effectué dans de bonnes conditions : après 3 à 5 jours d'abstinence et au laboratoire de biologie. Une anomalie de la spermatogenèseDéfinitionProcessus de production des spermatozoïdes, qui a lieu dans les tubes séminifères des testicules. Elle englobe les phénomènes qui, des spermatogonies (cellules souches diploïdes (2n chromosomes)), aboutissent aux spermatozoïdes (gamètes mâles haploïdes (n chromosomes)). doit être confirmée sur 2 prélèvements à 3 mois d'intervalle, en raison d'une part de la grande variabilité des paramètres spermatiques et d'autre part du cycle de la spermatogenèse (74 ± 4 jours).

 Amara El-Hamzaoui S, Dikoumba A., Spermogramme et spermocytogramme. Revue Française des Laboratoires. 2005 Jan;2005(369):29-34.

 Devaux A., Valeurs limites du spermogramme : comment les interpréter ? Quelle conduite adopter ? Gynécologie Obstétrique & Fertilité. 2010 Jan;38(1S1):H16-H17.

 Robin G, Boitrelle F, Leroy X, Peers MC, Marcelli F, Rigot JM, Mitchell V., Bilan d'une azoospermie et évaluation histologique de la spermatogenèse. Annales de Pathologie. 2010 Jun;30(3):182-195.

Tableau
Paramètres spermatiques Valeur normale Pathologie
Volume de l'éjaculat 2 à 6 mL HypospermieDéfinitionÉjaculation de sperme de volume inférieur à 2 ml chez l'homme. ou hyperspermieDéfinitionÉjaculation de sperme de très grande quantité, soit plus de 6 ml. Elle peut être la conséquence d'une abstinence sexuelle trop longue ou de lésions infectieuses des glandes annexes et en particulier des vésicules séminales.
Leucocytes < 105 / mL LeucospermieDéfinitionPrésence anormale de polynucléaires (globules blancs) pouvant signifier un état inflammatoire infectieux. Elle est caractérisée par la présence de leucocytes dans le spermogramme à des concentrations supérieures à 1 million / ml de sperme. La leucospermie est généralement sous-évaluée ; elle atteint des niveaux élevés chez 20 % des patients stériles.
Concentration en spermatozoïdes > 2X107 / mL OligospermieDéfinitionOligospermie ou oligozoospermie : Présence de spermatozoïdes en quantité anormalement faible (moins de 20 000 000 spermatozoïdes par millilitre de sperme).
AzoospermieDéfinitionAbsence totale de spermatozoïdes dans le sperme. Elle peut être soit excrétoire (c'est-à-dire due à une obstruction quelconque sur les canaux transportant le sperme) soit sécrétoire (c'est-à-dire due à un problème de formation des spermatozoïdes) au niveau des tubes séminifères. C'est une cause de stérilité. si absence
Mobilité normale à 1 heure > 60 % AsthénospermieDéfinitionAbsence de mobilité ou faible mobilité des spermatozoïdes.
Pourcentage de formes mortes < 30 % NécrospermieDéfinitionNécrospermie ou nécrozoospermie : Présence d'un très grand nombre de spermatozoïdes morts (plus de la moitié) dans le sperme de l'homme. On la détecte grâce à un examen médical appelé spermogramme effectué après prélèvement par masturbation. La nécrospermie est généralement due à la présence d'une infection ou à des problèmes oxydatifs.
Pourcentage de formes anormales < 70 % TératospermieDéfinitionTératospermie ou tératozoospermie : Présence de moins de 30 % de spermatozoïdes de forme typique dans le sperme (seuil de normalité de l'OMS).

 Guichaoua MR, Geoffroy-Siraudin C, Mercier G, Achard V, Paulmyer-Lacroix O, Metzler-Guillemain C., Aspects génétiques de la tératozoospermie. Gynécologie Obstétrique & Fertilité. 2009 Jun;37(6):540-545.

 Huyghe E, Izard V, Rigot JM, Pariente JL, Tostain J. Évaluation de l'homme infertile : recommandations AFU 2007. Progrès en Urologie. 2008 Feb;18(2):95-101.

 Marcelli F, Robin G, Rigot JM., Prise en charge de l'infertilité masculine. Progrès en Urologie. 2009 Apr;19(4):260-264.

 Ravel C, Berthaut I, Siffroi JP., Infertilités masculines. Encyclopédie Médico-Chirurgicale : Endocrinologie – Nutrition. 2009; 10-032-E-10.

 Robin G, Marcelli F, Mitchell V, Marchetti C, Lemaitre L, Dewailly D, et al., Pourquoi et comment réaliser un bilan d'hypospermie ? Gynécologie Obstétrique & Fertilité. 2008 Oct;36(10):1035-1042.

 Schlosser J, Nakib I, Carré-Pigeon F, Staerman F., Infertilité masculine : stratégie de la prise en charge. Encyclopédie Médico-Chirurgicale : Urologie. 2007; 18-760-A-12.

 Schlosser J, Nakib I, Carré-Pigeon F, Staerman F., Infertilité masculine : bilan. Encyclopédie Médico-Chirurgicale : Urologie. 2006; 18-760-A-11.

 Vendrely E, Merviel P., Stérilité et hypofertilité masculines. Encyclopédie Médico-Chirurgicale : Endocrinologie – Nutrition. 1998; 10-032-E-10.

Une spermocultureDéfinitionExamen d'aide au diagnostic de certaines infections (induisant ou non à un problème de fertilité masculine). Elle accompagne ou suit généralement un spermogramme ou spermocytogramme qui sont des examens de première intention qui peuvent aussi être complétés d'examens visant à apprécier les fonctions fécondantes du spermatozoïde, ou celles impliquées dans la motilité nécessaire à la traversée des voies génitales féminines. La spermoculture guide le choix de l'andrologue vers une thérapeutique antibiotique. Une spermoculture négative ne garantit pas l'absence d'infection surtout en présence d'une leucocytose. complète l'examen, à la recherche de germes banals. La recherche de chlamydiae trachomatisDéfinitionBacille de Gram indéterminé, parasite intracellulaire obligatoire. Cette bactérie est responsable de l'urétrite à chlamydia (ou chlamydiose), maladie sexuellement transmissible qui est la plus fréquente en France (50 fois plus fréquente que la gonorrhée, elle même plus fréquente que la syphilis). Son réservoir est strictement humain. Il existe 15 sérotypes, possédant un tropisme tout particulier pour les muqueuses génitales et oculaires. (voir chlamydia trachomatis et chlamydiose) est plus volontiers effectuée sur les urines, par technique PCR sur le premier jet.

 Discamps G., La spermoculture. Revue Française des Laboratoires. 1995 Oct;1995(278):61-62.

2 . 3  -  Pour apprécier le couple

Un test de HühnerDéfinitionTest de Hühner ou test post-coïtal : Test évaluant la qualité de la glaire cervicale et son « hospitalité » vis-à-vis des spermatozoïdes, afin de savoir si elle est à l'origine de l'infertilité. Il consiste à observer au microscope le comportement des spermatozoïdes contenus dans la glaire cervicale, après un rapport sexuel en période pré-ovulatoire, c'est-à-dire quelques jours avant que ne se produise l'ovulation. L'état de la barrière cervicale est ainsi décrit en termes fonctionnels, ce test servant de révélateur de la bonne relation entre la glaire et les gamètes mâles. Il s'agit d'un examen non-douloureux, de première intention au côté du spermogramme et du spermocytogramme. :

Ce test, aussi appelé test post-coïtal, apprécie le comportement des spermatozoïdes dans les sécrétions génitales féminines. Il est effectué en phase immédiatement pré-ovulatoire, lorsque la glaire est la meilleure possible, après 2 à 3 jours d'abstinence et 8 à 12 heures après le rapport sexuel. Il faut préciser à la patiente qu'elle ne doit faire aucune toilette vaginale après le rapport. Après mise en place du spéculum, la glaire est prélevée dans l'endocolDéfinitionPartie interne du col de l'utérus permettant de faire communiquer l'exocol (partie externe du col) et l'endomètre (couche de cellules recouvrant l'intérieur de l'utérus). L'endocol et l'exocol sont séparés entre eux par une région de jonction où s'effectuent les frottis de dépistage du cancer du col de l'utérus.. Les caractéristiques de la glaire et l'aspect du col sont appréciés, permettant l'établissement du score d'InslerDéfinitionBarème de résultats du test de Hühner. Noté sur 12, il est nul entre 0/12 et 3/12, insuffisant ente 4/12 et 7/12, bon entre 8/12 et 10/12, excellent entre 11/12 et 12/12. Le score d'Insler mesure l'ouverture du col, l'abondance, la clarté, la filance et la cristallisation de la glaire.. Il doit être noté avec précision et être supérieur à 10/12 : si la glaire est insuffisante ou de mauvaise qualité, on peut tenter une amélioration par l'apport exogène d'œstrogènes pendant 8 jours en début de cycle.

Le nombre et la motilitéDéfinitionCapacité physiologique (flagelles, pattes, ailes, muscles, etc.) à effectuer des mouvements. Ne pas confondre avec mobilité, qui désigne la facilité à se mouvoir : en effet un animal peut être doué de motilité – par exemple avoir des pattes – et être très peu mobile – par exemple les paresseux ; autre exemple : autre exemple : la motilité de l'estomac, qui effectue des mouvements pour brasser le bol alimentaire, mais reste bien évidemment totalement immobile. des spermatozoïdes sont appréciés sur plusieurs champs à l'aide d'un microscope à contraste de phase, à l'objectif 40.

À l'issue de ce premier bilan, l'ensemble des examens est satisfaisant et une orientation thérapeutique est proposée. Soit une anomalie est détectée, qui peut générer des examens de deuxième intention : échographie pelvienne, cœlioscopieDéfinitionCœlioscopie ou laparoscopie : Technique chirurgicale mini-invasive de diagnostic (cœlioscopie proprement dite) et d'intervention (cœliochirurgie) sur la cavité abdominale, de plus en plus utilisée sur l'appareil digestif (chirurgie viscérale), en gynécologie, et en urologie. Elle fait partie des techniques d'endoscopie chirurgicale. (voir cœlioscopie et examen cœlioscopique), hystéroscopieDéfinitionExamen permettant de visualiser directement la cavité utérine (l'intérieur de l'utérus) à l'aide d'un appareil optique appelé hystéroscope. On peut ainsi explorer le canal cervical, la cavité utérine et sa muqueuse, l'endomètre, et l'origine des trompes (les ostiums uterinums). Par défaut, le mot « hystéroscopie », sans autre précision, sous-entend l'hystéroscopie diagnostique. Lorsque cette méthode est utilisée pour pratiquer dans le même temps une intervention chirurgicale dans l'utérus, on parle alors de « chirurgie hystéroscopique ». (voir hystéroscopie), biopsie d'endomètreDéfinitionMuqueuse interne de l'utérus., bilan hormonal dynamique… chez la femme, examens spermiologiques (marqueurs séminaux, anticorps anti-spermatozoïdes, étude de la réaction acrosomiqueDéfinitionRéaction caractérisée par la fusion des enveloppes externes de la tête du spermatozoïde : membrane plasmique et membrane acrosomique externe. Cette fusion aboutit à la fenestration puis à la disparition de ces membranes, libérant le contenu de l'acrosome et permettant la mise en contact direct de la membrane acrosomique interne avec la zone pellucide.…), bilan hormonal, échographie scrotale et/ou prostatique… chez l'homme.

 Zorn JR., Place actuelle du test de Hühner dans l'exploration de la stérilité conjugale. Gynécologie Obstétrique & Fertilité. 2006 Feb;34(2):142-146. 

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