- Pré-requis et Objectifs
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Cours
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Contenu
- 1 - États précancéreux et phase initiale du cancer
- 2 - Phase locale du cancer : l'invasion
- 3 - Phase générale du cancer : la métastase
- Points essentiels
- Version PDF
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Contenu
- Evaluations
- Annexes
La progression tumorale dépend du pouvoir prolifératif et du pouvoir métastasiant.
Après une phase locale, les métastases (du grec métastasis : déplacement) font toute la gravité de la maladie cancéreuse.
Les métastases sont des foyers cancéreux secondaires, développés à distance de la tumeur primitive, et dont la croissance est autonome, indépendante de celle de la tumeur primitive.
Le moment d’apparition des métastases dans l’histoire naturelle d’un cancer est variable :
Elles vont souvent de pair avec la résistance au traitement.
Une très faible proportion des cellules tumorales circulantes est capable de former une métastase : moins d’une sur 10 000 cellules tumorales qui quittent la tumeur primitive échappe au système de défense de l’organisme et fonde une nouvelle tumeur.
Du fait de leur hétérogénéité génétique et phénotypique, les diverses cellules cancéreuses d’une même tumeur ont des capacités métastatiques variables : l’histoire naturelle d’un cancer comporte une sélection positive de sous-clones cellulaires à capacité métastasiante.
Que ce soit par voie sanguine ou lymphatique, les cellules cancéreuses qui quittent le foyer tumoral initial doivent franchir des étapes successives : chaque étape représente un obstacle que seul un petit nombre de cellules cancéreuses ayant réussi à s’adapter à un nouvel environnement réussiront à franchir.
Ces différentes étapes sont (voir figure 9.5) :
C’est une étape limitante qui met en jeu les molécules d’adhésion (perte de l’ancrage cellulaire), les protéases extra-cellulaires (dégradation de la matrice extra-cellulaire), et des facteurs de mobilité.
L’environnement joue un rôle majeur : stroma réaction et mise en place de l’angiogenèse, prérequis indispensable à la progression tumorale.
Il s’agit du passage dans le courant sanguin ou lymphatique. Il se fait soit au sein de la tumeur dans les petits vaisseaux induits par l’angiogenèse qui sont très perméables, soit en périphérie de la tumeur dans les petits vaisseaux lymphatiques. Le passage des membranes basales vasculaires fait intervenir les processus déjà décrits pour l’invasion locale de la tumeur primitive.
Survie dans la circulation
Dans la circulation les cellules cancéreuses ne prolifèrent pas. Elles doivent résister à des agressions mécaniques : pression sanguine, élongation et friction dans les capillaires.
Elles ont tendance à s’agréger pour résister aux agressions (emboles néoplasiques).
De plus, les cellules cancéreuses sont en contact avec les cellules circulantes du système immunitaire (natural killer, lymphocytes T cytotoxiques) qui lysent une grande partie d’entre elles. L’agrégation plaquettaire parfois induite au contact des cellules tumorales pourrait les protéger des agressions mécaniques, les isoler des cellules cytotoxiques et favoriser leur adhésion aux parois vasculaires.
Des agrégats de cellules tumorales se bloquent dans les petits capillaires (figure 9.6).
Les mécanismes impliqués semblent proches de ceux mis en jeu lors de l’extravasation des leucocytes dans les sites inflammatoires :
L’invasion est un phénomène actif complexe par lequel les cellules tumorales qui ont quitté la circulation sanguine envahissent les tissus. C’est une étape limitante et peu de cellules y parviennent. Un écosystème favorable est indispensable à leur survie et à leur prolifération :
À ce stade, la majorité des cellules cancéreuses meurent par apoptose, certaines restent en dormance (pas de prolifération, pas d’apoptose) ou donnent des micrométastases indétectables (équilibre entre prolifération et apoptose). Seule une minorité de cellules donnera naissance à des métastases actives détectables.
Comme au sein de la tumeur primitive, la stroma réaction et l’angiogénèse vont pouvoir jouer leur rôle. Des cellules tumorales pourront à leur tour s’échapper et former ailleurs de nouvelles métastases (figure 9.7).
La fréquence des métastases varie selon les individus et le type de prolifération. Il n’y a jamais de métastases de gliomes (système nerveux central), les métastases des carcinomes cutanés sont rares. À l’inverse, les mélanomes et certains carcinomes bronchiques sont fréquemment l’objet d’une dissémination métastatique.
Leur délai d’apparition est également très variable. Différents mécanismes sont proposés pour expliquer ces différences.
La capacité d’une tumeur à faire des métastases est un caractère secondairement acquis par mutation et/ou réarrangement chromosomique. Les gènes impliqués sont encore mal connus.
Les défenses cellulaires anti tumorales sont assurées essentiellement par :
Les mécanismes d’échappement de la réponse immunitaire anti-tumorale sont nombreux, dont par exemple :
Ces pertes cellulaires peuvent être le fait :
La migration de cellules tumorales à distance du foyer primitif peut se faire par plusieurs voies, dont l’importance relative dépend beaucoup du type tumoral. Les principales voies sont lymphatiques et sanguines, mais il peut également exister une diffusion par des cavités naturelles de l’organisme (séreuses, bronches, voies urinaires, canaux biliaires, canal rachidien…).
C’est la voie la plus fréquente de dissémination des carcinomes, mais peut se rencontrer également au cours des sarcomes (figure 9.8).
La métastase ganglionnaire se fait selon le drainage ganglionnaire normal de la région atteinte. Exemple : ganglions axillaires pour un carcinome mammaire du quadrant supéro-externe, ou ganglions inguinaux pour un mélanome de la face interne de la cuisse.
Le premier relais ganglionnaire du drainage lymphatique est appelé ganglion sentinelle. Depuis quelques années, des protocoles de traitement de certaines tumeurs consistent à prélever le ganglion sentinelle, puis à ne faire de curage ganglionnaire que si celui-ci est envahi par la tumeur (cf. Métastase ganglionnaire).
La poursuite, de proche en proche, de l’invasion des lymphatiques aboutit au déversement des cellules cancéreuses dans la circulation générale par le canal thoracique. Une étape intermédiaire fréquente est la présence d’un ganglion sus-claviculaire gauche (appelé ganglion de Troisier), dernier relais avant la circulation générale, et qui signe ainsi une diffusion prochaine à tout l’organisme du processus cancéreux.
Les cancers les plus lymphophiles sont les carcinomes, en particulier les cancers du sein, de la thyroïde, du col utérin, et les mélanomes.
La lymphangite carcinomateuse est une dissémination abondante et diffuse de cellules malignes dans les capillaires lymphatiques d’un organe entier (souvent le poumon). On l’appelle carcinomateuse car ce mode d’extension concerne essentiellement les carcinomes en particulier mammaires.
Les cellules cancéreuses, soit après passage par la voie lymphatique, soit directement par effraction de la paroi vasculaire sanguine, pénètrent les petits vaisseaux sanguins et sont entraînées par la circulation vers les organes qui filtrent le plus gros volume de sang.
Cette effraction est d’autant plus facile que les vaisseaux du stroma ont une paroi mince et qu’il existe, dans certaines tumeurs (sarcomes), des lacunes vasculaires bordées de cellules tumorales. La diffusion par voie sanguine est commune aux sarcomes, aux carcinomes et aux mélanomes.
La localisation des métastases hématogènes dépend du mode de drainage veineux de l’organe atteint par la tumeur, et du premier filtre capillaire à travers lequel passe le sang en aval. On distingue schématiquement 3 types de migration :
Toutefois la localisation des métastases dépend également d’autres facteurs que le flux sanguin. En effet, certains organes, tels les os et les ovaires, qui ne sont pas des « filtres sur la circulation » comme le poumon et le foie sont pourtant souvent siège de métastases. À l’inverse certains organes très vascularisés, tels le muscle strié, la rate et la thyroïde, ne sont presque jamais sièges de métastases.
Parmi les autres facteurs impliqués, notons l’importance de l’adressage (homing) dû à l’expression par les cellules tumorales de molécules d’adhérence qui leur permettent de se localiser spécifiquement dans certains tissus. Il est également probable que le micro-environnement spécifique à chaque tissu est plus ou moins favorable à la croissance des cellules tumorales.
Ces affinités reposent au moins en partie sur les interactions de chimiokines et de leurs récepteurs.
L’existence de masses tumorales multiples dans le poumon ou le foie est un argument macroscopique pour suspecter le diagnostic de métastases, alors qu’une masse tumorale unique évoque plutôt une tumeur primitive. La probabilité de l’un ou l’autre diagnostic (métastase versus tumeur primitive) repose alors sur des notions d’incidence respective de ces tumeurs selon le siège, sur des données cliniques et des données d’imagerie (ex : chez un adulte, les tumeurs primitives osseuses sont moins fréquentes que les métastases osseuses). Le plus souvent, c’est finalement l’examen anatomopathologique qui détermine la nature primitive ou secondaire d’une tumeur (tableau 9.1).
Foie
Poumons
Os
Cerveau
Essaimage direct par une cavité naturelle
Il peut se produire lorsqu’une tumeur maligne s’étend jusqu’à cette cavité comme les cavités pleurale ou péritonéale, les espaces méningés, les voies urinaires, les canaux biliaires ou une cavité articulaire.
Exemples : extension péritonéale d’un carcinome ovarien, extension ovarienne d’un adénocarcinome gastrique : tumeur de Krükenberg.
Cet essaimage peut également se faire par la rupture de la tumeur dans une cavité (ex : rupture d’un sarcome digestif dans la cavité péritonéale).
Par rapport à la tumeur primitive la morphologie peut être :
Une métastase peut survenir au cours de la surveillance évolutive d’une tumeur connue.
À l’inverse, la découverte d’une ou plusieurs métastases peut être révélatrice d’un cancer. Dans ce cas, la localisation et l’analyse histologique peuvent orienter la recherche de la tumeur primitive, dont l’identification est souvent utile pour les choix thérapeutiques. L’immunohistochimie est parfois également utile.
Exemples :