Il faut bien distinguer les corps étrangers superficiels et les corps étrangers intraoculaires (CEIO), de pronostic tout à fait différent.
Corps étranger superficiel
Mécanisme Conjonctivite Kératite superficielle par corps étranger sous-palpébral: toujours penser à retourner la paupière supérieure (++). Corps étranger cornéen : directement visible | Corps étranger intraoculaire (CEIO) Mécanisme Porte d’entrée : sclérale (hémorragie sous-conjonctivale) ou cornéenne Trajet visible : cristallinien et/ou irien Corps étranger visible : iris, cristallin, angle irido-cornéen, vitré, rétine (visible en l’absence d’hémorragie intravitréenne) |
1. Diagnostic évident
→ Corps étranger superficiel
En faveur d’un corps étranger superficiel plaident :
• les circonstances de suvenue, en particulier meulage ;
• des symptômes unilatéraux :
- soit à type de conjonctivite : démangeaisons sans baisse d’acuité visuelle, hyperhémie conjonctivale prédominant autour ou en regard du corps étranger, larmoiement
- soit à type de kératite superficielle : douleurs superficielles et photophobie, cercle périkératique
A l’examen, le corps étranger est souvent visible, cornéen superficiel (c’est notamment le cas des « grains de meule », très fréquents) ou conjonctival ; ailleurs, il est masqué sous la paupière supérieure : toujours penser à retourner la paupière supérieure à la recherche d’un corps étranger sous-palpébral.
Le pronostic est favorable avec un traitement qui associe ablation à l’aide d’une aiguille à corps étranger et pansement occlusif pendant 24 à 48 heures, associé à un traitement local antibiotique.
→ Corps étranger intra-oculaire
Il existe parfois un tableau évocateur :
2. Diagnostic délicat
Le diagnostic de corps étranger intraoculaire est cependant souven tmoins évident si :
• le traumatisme initial n’a pas été remarqué par le patient,
• aucune porte d’entrée n’est retrouvée,
• ne sont visibles ni le trajet de pénétration ni le corps étranger.
3. Examens complémentaires
Dans tous les cas, à la moindre suspicion de corps étranger intraoculaire, doivent être pratiqués des radiographies de l’orbite de face, de profil, et en incidence de Blondeau ; elles confirment la présence d’un corps étranger dans l’orbite ; elles constituent un document médico-légal.
Lorsque l’examen radiologique a confirmé le diagnostic de corps étranger de situation orbitaire, doit être pratiquée avec précaution une échographie B : elle permet de localiser avec précision le corps étranger et de confirmer sa situation intraoculaire ; elle permet de plus ce visualiser des corps étrangers non radio-opaques (CEIO non métalliques).
La localisation peut encore être effectuée par examen tomodensitométrique , notamment si l’on ne dispose pas d’échographie B oculaire ; l’IRM est par contre contre-indiquée en raison du risque de mobilisation d’un corps étranger aimantable durant l’examen.
4. Complications précoces des corps étrangers intraoculaires
Elles peuvent révéler un CEIO méconnu, mais peuvent également survenir même après le traitement correctement conduit d’un corps étranger diagnostiqué lors du traumatisme :
• endophtalmie (infection intraoculaire) : complication très grave, pouvant aboutir à une cécité complète.
• décollement de la rétine (DR) , de pronostic moins sévère mais réservé (les résultats du traitement chirurgical des DR secondaires à un CEIO étant moins bons que les résultats du traitement des DR spontanés et des DR secondaires à une contusion oculaire).
• cataracte traumatique , dont le pronostic peut être favorable par un traitement chirurgical en l’absence de lésions associées (notamment rétiniennes) ayant un retentissement visuel.
5. Complications tardives
Nous ne ferons que les mentionner :
• ophtalmie sympathique : uvéite auto-immune sévère de l’oeil controlatéral, survenant de quelques semaines à plusieurs années après le traumatisme initial.
• sidérose et chalcose : atteintes rétiniennes toxiques très sévères survenant plusieurs années après un CEIO méconnu, ferrique (sidérose) ou cuivrique (chalcose) : cette dernière s’accompagne typiquement d’un anneau cornéen de Kayser-Fleisher (identique à celui que l’on observe dans la maladie de Wilson).