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Hémorragies génitales du 1er trimestre
Elles compliquent environ 25 % des grossesses et peuvent être en rapport avec :
- une grossesse extra-utérine (1 %) ;
- une grossesse intra-utérine évolutive avec un hématome décidual (12 %) ;
- une grossesse intra-utérine non évolutive (avortement spontané ou fausse couche) (12 %) ;
- exceptionnellement : lyse d’un jumeau (en cas de grossesse gémellaire initiale), une grossesse môlaire, un cancer du col.
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Conduite de l’examen
L’interrogatoire relève :
- les antécédents (DES, pathologie tubaire, IST, tabac, DIU, malformations utérines) ;
- les signes sympathiques de grossesse : nausées matinales, tension mammaire, etc.
- l’aspect des hémorragies : abondance, couleur ;
- la présence de douleurs pelviennes et leurs caractères : médianes à type de contractions ou douleurs latéralisées, sourdes avec des accès douloureux plus intenses.
L’examen a plusieurs objectifs :
- vérifier l’état général, le pouls, la tension artérielle ;
- vérifier l’abdomen : souple ? indolore ? hauteur utérine ?
- effectuer un examen au spéculum : aspect du col, présence de débris ovulaires ?
- effectuer un toucher vaginal : perméabilité du col, taille de l’utérus, présence d’une masse latéro-utérine, douleur provoquée à la mobilisation utérine, dans un cul-de-sac latéral ou dans le Douglas.
Les examens complémentaires sont :
- le dosage plasmatique d’hCG en cas de doute sur l’état de grossesse ;
- l’échographie pelvienne, au mieux par voie vaginale. Dans une grossesse normale, le sac ovulaire est visible dès 5 semaines d’aménorrhée (SA) sous la forme d’une image liquidienne intra-utérine entourée d’une couronne échogène (le trophoblaste). L’embryon et son activité cardiaque deviennent visibles entre 5,5 et 6 SA. L’échographie précise :
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Orientation diagnostique
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En faveur d’un avortement spontané
Les signes cliniques en faveur d’un avortement spontané sont :
- une disparition récente des signes sympathiques de grossesse ;
- des hémorragies franches, de sang rouge, avec caillots et « débris » ;
- des douleurs pelviennes médianes, intermittentes, à type de contractions, « comme des règles » ;
- un col utérin mou, perméable au doigt ;
- alors que les culs-de-sac sont libres et la mobilisation utérine indolore.
À l’échographie, on retrouve :
- un sac ovulaire intra-utérin bien visible, reconnaissable par sa couronne trophoblastique échogène ;
- mais anormal : embryon sans activité cardiaque ou œuf clair, sans écho embryonnaire, souvent aplati, à contours irréguliers, plus petit que ne le voudrait l’âge de la grossesse.
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En faveur d’une grossesse extra-utérine
Les signes cliniques en faveur d’une grossesse extra-utérine sont :
- des facteurs de risque : tabagisme, antécédents de stérilité, DES, salpingite, chirurgie tubaire, grossesse extra-utérine. Grossesse sous contraception par dispositif intra-utérin ou microprogestatifs, ou obtenue par assistance médicale à la procréation ;
- des hémorragies peu abondantes, noirâtres ;
- des douleurs pelviennes latéralisées, sourdes, avec des accès plus intenses, parfois scapulalgies ou malaises (hémopéritoine) ;
- un utérus moins gros qu’attendu, un col tonique et fermé, une masse latéro-utérine douloureuse ;
- des douleurs provoquées dans un cul-de-sac latéral, dans le Douglas ou à la mobilisation utérine.
À l’échographie, on retrouve :
- un utérus vide, anormal si l’âge gestationnel est de plus de 5,5 SA ou si le taux d’hCG est supérieur à 1 000–1 500 UI/L ;
- une masse latéro-utérine, inconstante, plus ou moins caractéristique :
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En faveur d’une grossesse intra-utérine évolutive
Les signes cliniques en faveur d’une grossesse intra-utérine sont :
- des hémorragies isolées, sans douleurs, souvent récidivantes ;
- un sac ovulaire intra-utérin d’aspect conforme à l’âge gestationnel, avec un embryon vivant présentant une activité cardiaque régulière ;
- des hémorragies en rapport avec un hématome décidual : image liquidienne entre les contours de l’œuf et la paroi utérine. L’évolution est parfois longue mais généralement favorable.
En pratique, il est parfois difficile de différencier avec certitude une grossesse extra-utérine d’une grossesse arrêtée voire d’une grossesse évolutive lors de la première consultation, surtout en cas de terme précoce (4,5–6 SA). Certains proposent de réaliser un nouveau dosage d’hCG 48 h après le premier dosage dans le même laboratoire pour aider au diagnostic : un taux qui double est plutôt en faveur d’une grossesse évolutive intra- et parfois extra-utérine ; un taux qui décroît par deux est plutôt en faveur d’une FCS ; un taux qui stagne est plutôt en faveur d’une grossesse extra-utérine. Si le diagnostic de grossesse extra-utérine est très peu probable et qu’un doute persiste, il est plus prudent de réaliser une nouvelle échographie 5 à 7 jours après le premier contrôle échographique.
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En faveur d’une grossesse molaire (maladie trophoblastique)
Exceptionnelle en Occident, fréquente en Asie du Sud-Est, la grossesse molaire se traduit par :
- des signes sympathiques de grossesse très intenses ;
- un utérus plus gros que ne le voudrait l’âge de la grossesse ;
- des taux plasmatiques d’hCG très élevés.
À l’échographie : l’utérus est occupé par une masse hétérogène, floconneuse, contenant de multiples petites vésicules et il existe deux gros ovaires polykystiques. Il n’y a ni cavité ovulaire, ni embryon visible.
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Conduite à tenir en fonction de l’étiologie
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En cas de GEU
Cf. chapitre « Grossesse extra-utérine ».
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En cas de maladie trophoblastique
Le diagnostic évoqué à l’échographie nécessite une aspiration sous contrôle échographique avec examen anatomopathologique systématique.
Il est nécessaire de suivre la décroissance de la βhCG jusqu’à négativation.
En l’absence de décroissance voire de réascencion, il faudra redouter une môle invasive ou un choriocarcinome.
Une chimiothérapie est alors indiquée après bilan d’extension préalable (échographie hépatique et pelvienne, radiographie pulmonaire et examen vaginal).
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En cas d’avortement spontané du 1er trimestre
Il s’agit habituellement du premier ou, parfois, du second épisode.
Dans tous les cas, prévention de l’iso-immunisation Rhésus si la femme est Rhésus négatif (+++).
Banale pour le médecin, la fausse couche est souvent vécue par la femme comme un traumatisme culpabilisant, source d’inquiétude pour l’avenir. Il est important de consacrer quelques minutes à l’information :
- la cause habituelle (60 % des cas) est une anomalie chromosomique de l’embryon, due au hasard. L’activité physique et la voiture n’y sont pour rien ;
- la fausse couche est un phénomène banal qui concerne 10 à 15 % des grossesses et n’a aucune conséquence sur l’avenir obstétrical.
L’évolution spontanée se ferait vers une majoration des hémorragies et des douleurs, l’ouverture du col, l’expulsion de l’œuf qui est parfois très hémorragique.
Après discussion avec la patiente, il est possible d’envisager l’expulsion de la grossesse arrêtée. Deux méthodes sont disponibles :
- un traitement médical par prostaglandines si l’œuf est de petite taille et les hémorragies peu importantes ;
- un traitement chirurgical dans les autres cas. Ce traitement chirurgical :
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En cas d’avortements spontanés à répétition
La situation est différente des fausses couches spontanées (FCS) habituelles.
Ce terme désigne la survenue d’au moins trois avortements spontanés consécutifs avant 14 SA. Une enquête étiologique devient légitime.
Les causes possibles sont :
- une malformation utérine (plutôt responsable d’avortements tardifs) ; il faut faire une hystérographie ;
- un lupus, syndrome des antiphospholipides ; il faut pratiquer une sérologie lupique et une recherche d’anticoagulant circulant ;
- des causes génétiques : translocation équilibrée chez la femme ou son conjoint ; il faut réaliser le caryotype des deux membres du couple ;
- une endométrite chronique ; il faut effectuer des prélèvements bactériologiques vaginaux et endocervicaux ;
- des causes hormonales et métaboliques (dysovulation, hyperandrogénie, hypothyroïdie, diabète) qui sont classiques mais très controversées ; il faut faire un bilan hormonal et une glycémie ;
- des causes immunologiques : absence d’anticorps cytotoxiques antilymphocytes paternels dans le sérum maternel (cause rare et controversée à rechercher en seconde intention) ;
- inconnues. Le bilan étiologique est souvent négatif.
Un traitement préventif des récidives par aspirine à faible dose et héparine de bas poids moléculaire a été proposé. Ce traitement est efficace en cas de syndrome des antiphospholipides. Sinon, il n’a aucun intérêt. Certains proposent un traitement préventif par aspirine à faible dose misant sur l’effet placebo.
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