4  -  Tumeurs germinales

4 . 1  -  Notions générales

Les tumeurs germinales se développent à partir de cellules germinales primordiales. Ces tumeurs siègent préférentiellement dans les gonades mais peuvent aussi être localisées sur le trajet de migration des cellules germinales lors de l’embryogenèse, le long de l’axe médian du corps : la base du crâne (surtout la région épiphysaire), le médiastin antérieur, le rétro-péritoine et la région sacro-coccygienne.

Les tumeurs germinales sont rares : les tumeurs germinales malignes constituent plus de 95 % des tumeurs testiculaires mais seulement 1 % des tumeurs malignes chez l’homme. Elles sont beaucoup plus rares chez la femme. Elles ont la particularité de survenir chez des patients jeunes, de pouvoir pour certaines être détectées et suivies par des marqueurs sériques et d’être curables même au stade métastatique. En revanche, les tumeurs germinales bénignes (tératomes matures) sont beaucoup plus fréquentes chez la femme, dans l’ovaire.

Les tumeurs germinales sont très variées dans leur différenciation morphologique, reproduisant des structures observables au cours de l’embryogénèse : séminomes (nappes de cellules ressemblant à des gonocytes primordiaux), carcinomes embryonnaires et tératomes (dérivés de structures embryonnaires), choriocarcinome et tumeur vitelline (dérivés de structures extra-embryonnaires) (figure 11.19).

Figure 11.19. Classification des tumeurs germinales

4 . 2  -  Pratique clinique

Tumeurs testiculaires

Elles sont pour 50 % des séminomes et pour 50 % non séminomateuses :

• les seminomes ont un pic de fréquence vers 30 ans et sont curables par chirurgie et radiothérapie ;
• les tumeurs germinales non séminomateuses ont un pic de fréquence à 20 ans, entraînent souvent une élévation de marqueurs sériques (alpha-fœto-protéine dans les tumeurs vitellines et bêta-HCG dans les choriocarcinomes) et sont souvent curables depuis l’utilisation de polychimiothérapies à base de Cisplatine.

Tumeurs germinales ovariennes

Elles sont exceptionnellement malignes (seminomes ou tumeurs non seminomateuses). Par contre on observe fréquemment dans l’ovaire des kystes dermoïdes (kystes emplis de sébum, de poils et cheveux) et des tératomes matures plus complexes qui sont des tumeurs germinales bénignes.

Tumeurs germinales extragonadiques

Toutes les variétés de tumeurs germinales peuvent être observées dans ces localisations. Les séminomes sont plus fréquents dans l’épiphyse, les tératomes dans le rétropéritoine et le médiastin.

4 . 3  -  Classification histopathologique

4 . 3 . 1  -  Séminome

Également appelé dysgerminome (dans l’ovaire) ou germinome (en intracérébral), il est la tumeur germinale présentant la plus grande similitude morphologique avec les gonies (spermatogonies et ovogonies).

Macroscopie : tumeur solide bien limitée, beige, blanc crème (figure 11.20A1 et A2).

Figure 11.20. Séminome testiculaire
A1 et A2. Aspects macroscopiques (pièces opératoires d’orchidectomie pour séminome).
B. Aspect microscopique : nappes de grandes cellules claires au noyau volumineux et nucléolé séparées par un stroma riche en lymphocytes.

Histologie : cellules rondes, monomorphes à cytoplasme clair ou éosinophile à noyau central et nucléolé, associées à un stroma lymphocytaire (lymphocytes T) et histiocytaire (figure 11.20B). Les cellules tumorales expriment la phosphatase alcaline placentaire (PLAP) et le KIT (marqueurs des gonocytes primordiaux), détectables par immunohistochimie.

4 . 3 . 2  -  Carcinome embryonnaire

Il est formé de massifs de cellules embryonnaires à un stade très peu différencié.

4 . 3 . 3  -  Tératomes

Ce sont des tumeurs germinales avec une différenciation somatique, reproduisant des tissus dérivés des 3 feuillets embryonnaires : ectoderme, endoderme et mésoderme.

  • Les tératomes matures sont des tumeurs bénignes, constituées entièrement de tissus adultes, matures. Ce sont les tumeurs germinales les plus fréquentes de l’ovaire (95 % des tumeurs germinales ovariennes), où ils sont souvent dénommés « kyste dermoïde ».
  • Ils sont simples (kyste épidermique, kyste entéroïde) ou complexes associant de multiples formations tissulaires mésenchymateuses et épithéliales plus ou moins organoïdes ou désordonnées (épiderme, annexes pilo-sébacées, cellules adipeuses, muscle lisse et strié, os, cartilage, épithélium respiratoire et digestif, tissu thyroïdien, dents…) (figure 11.21).
  • Les tératomes immatures sont des tumeurs malignes. Elles contiennent des tissus immatures, incomplètement différenciés, ressemblant à des tissus embryonnaires (surtout des structures neuroépithéliales et gliales).
Figure 11.21. Tératome mature
A et B. Aspect macroscopique (cheveux, sébum) de deux tératomes matures ovariens.
C. Histologie : juxtaposition de tissus matures variés (tissu adipeux, pancréatique, cartilage, bronche…).

4 . 3 . 4  -  Tumeur vitelline

Cette tumeur maligne présente la morphologie du sinus endodermique (ou sac vitellin) (figure 11.22). Elle sécrète d’ailleurs de l’alpha-fœto-protéine, qui peut être détectée dans le sérum (marqueur tumoral) et sur coupe histologique par immunohistochimie.

Figure 11.22. A. Aspect microscopique d’ensemble une tumeur vitelline B. Corps de Schiller Duval
(photographie du Pr Mojgan Devouassoux)

4 . 3 . 5  -  Choriocarcinome

C’est une tumeur germinale avec différenciation trophoblastique.

Macroscopie : tumeur solide très hémorragique.
Histologie : il reproduit la structure du placenta avec des cellules cytotrophoblastiques et syncytiotrophoblastiques sécrétant la bêta-HCG (détectée dans le sérum et sur coupe histologique).

4 . 3 . 6  -  Tumeurs germinales complexes

Ces tumeurs sont hétérogènes macroscopiquement (figure 11.23). Elles représentent une situation assez fréquente (40 % des cas environ). La tumeur comporte un mélange de différents types histologiques et on parle alors de tumeur germinale mixte ou complexe (ex : association de tératome immature et de tumeur vitelline).

Figure 11.23. Tumeur germinale complexe du testicule : aspect macroscopique très hétérogène
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