Le traitement a pour objectif de prévenir les conséquences de la dénutrition. Il repose sur l’augmentation des apports calorico-azotés et la correction des carences électives.
1. Dénutrition protéino-énergétique
La dénutrition doit être traitée car elle aggrave le pronostic vital : la mortalité est 2 à 4 fois plus fréquente chez les sujets âgés malnutris. Elle aggrave la morbidité infectieuse en raison d’un déficit immunitaire touchant l’immunité humorale et tissulaire. Le déficit musculaire (sarcopénie) est à l’origine de nombreuses chutes chez les sujets âgés. Chez les sujets maigres en particulier, la chute entraîne fréquemment une fracture du col du fémur, d’autant plus facilement que la dénutrition aggrave la déminéralisation osseuse. Elle favorise aussi les troubles psychiques : simple apathie ou véritable dépression, voire même syndrome confusionnel ou démentiel (qui s’amende quand la renutrition devient efficace). La dénutrition aggrave aussi très sensiblement les risques de morbi-mortalité opératoire.
2. Carences en micronutriments
Les carences en vitamines du groupe B (surtout folates) peuvent être source d’asthénie, de troubles psychiques et neurologiques, d’anémies, de déficit immunitaire (B6). Il a été décrit de véritables encéphalopathies carentielles dues à des carences en vitamines B (B1, B2, B12).
La carence en vitamine C aggrave l’asthénie.
La carence en calcium associée ou non à une carence en vitamine D et une activité physique diminuée aggravent l’ostéopénie et se compliquent de fractures ou de tassements vertébraux. Elle nécessite donc une supplémentation systématique, de préférence alimentaire, voire médicamenteuse.
La carence en zinc entraîne une altération du goût et favorise donc l’anorexie. Cette carence, souvent associée à une dénutrition, favorise le déficit immunitaire et retarde la cicatrisation des plaies.
On distingue 3 modalités.
1. Optimisation de l’alimentation
Pour augmenter la prise calorique et azotée, on essaie d’augmenter le nombre des repas (petit-déjeuner, goûter), d’éviter les périodes de jeûne prolongé audelà de 12 heures, de privilégier les produits riches en énergie et en protéines, d’enrichir les aliments avec différents produits de base (poudre de lait, fromage râpé, crèmes etc.), de favoriser les aliments goûteux, de lutter contre l’isolement, d’organiser l’aide aux repas et favoriser un environnement agréable.
2. Compléments nutritionnels oraux
Ce sont des mélanges nutritifs complets administrables par voie orale, hyperénergétiques ou hyper-protidiques, à consommer pendant ou à distance (au moins 2 heures) des repas.
3. Alimentation artificielle (nutrition entérale et parentérale)
Les modalités en sont exposées dans le chapitre 7.
On privilégie la nutrition entérale, qu’il est souvent possible de poursuivre à domicile, avec l’aide d’un prestataire de service spécialisé, après contact direct entre le service hospitalier et le médecin traitant.
1. Vérifier que l’objectif calorico-azoté est atteint
Dans une dénutrition habituelle du sujet âgé, l’objectif est un apport d’environ 35 kcal et 1,2 g de protéines par kilo et par jour.
Le compte alimentaire additionne les apports spontanés et artificiels. En cas de supplémentation par des compléments nutritifs oraux, il faut se méfier que leur prise ne se fasse pas aux dépens de l’alimentation normale spontanée, et reconnaître rapidement une lassitude progressive conduisant à l’abandon de ces produits. En nutrition entérale, vérifier que la quantité prescrite sur 24 h a été effectivement délivrée.
2. Amélioration nutritionnelle
L’évolution nutritionnelle est évaluée sur la clinique (reprise de la marche, poids sans oedèmes), la prise alimentaire spontanée, l’augmentation des protéines circulantes. La pesée doit être effectuée 1 fois par semaine, la prise alimentaire comptée 1 à 2 fois par mois. La surveillance biologique peut être plus espacée. En particulier, l’albuminémie se normalise lentement, et un dosage mensuel est suffisant.
Avant une intervention chirurgicale, une réalimentation bien conduite d’une dizaine de jours est suffisante pour entraîner une chute du taux de morbimortalité même si les marqueurs cliniques et biologiques de l’état nutritionnel ne sont pas encore redevenus normaux.
3. Arrêt de l’assistance nutritionnelle
La durée de l’assistance nutritionnelle (compléments nutritifs ou nutrition entérale) est souvent plus prolongée que chez le sujet non âgé, en moyenne de l’ordre de 2-3 mois. Elle peut être arrêtée si le malade a repris une alimentation couvrant ses besoins caloriques (en pratique supérieure à 30 kcal/kg) et si le processus inflammatoire ou infectieux est contrôlé.
Au décours, le sujet âgé reste à risque de dénutrition et la surveillance du poids et de la prise alimentaire doit être maintenue.
Nutrition de la personne âgée.