1 - Méthodes de recensement des mouvements fœtaux
2 - Classification des mouvements fœtaux
3 - Variation de l'activité motrice fœtale
L'étude des mouvements fœtaux a une longue histoire.
Au IVème siècle avant JC, Hippocrate a soutenu que les premiers mouvements fœtaux apparaissaient 70 à 90 jours après la conception.
Ambroise Paré, en 1534, a été le premier
à affirmer que “si ni la main du chirurgien ni la mère
ne peuvent sentir bouger l'enfant, celui-ci est mort”.
Toujours au XVIème siècle, VESALE a étudié les
mouvements respiratoires déclenchés par l'asphyxie chez un fœtus
de chien. Ses travaux furent poursuivis par BECLARD en 1813,
MINKOWSKI en 1938 et DAWES en 1970.
Depuis une vingtaine d'années, un regain d'intérêt s'est manifesté pour les mouvements fœtaux. Des équipes israéliennes, britanniques, scandinaves, canadiennes et françaises se sont intéressées à la valeur pronostique du recensement des mouvements fœtaux.
En Allemagne et aux États-Unis, des études ont été faites sur l'activité motrice fœtale objectivée par échographie, d'une part, et sur le retentissement de ces mouvements sur le rythme cardiaque fœtal enregistré par cardiotocographe, d'autre part.
En 1977, SADOVSKY [34] a établi une relation entre le compte quotidien des mouvements fœtaux et le pronostic obstétrical. BENHAMOU [4] a constaté, par la statistique, le peu de valeur à accorder à la subjectivité des mères françaises.
Des recherches ont alors été menées pour permettre un recensement objectif des mouvements. COLETTE a proposé un appareil permettant un recensement objectif des mouvements fœtaux : le Tococinon™.
1 - Méthodes de recensement des mouvements fœtaux
Méthodes subjectives
Méthodes de WOOD [53]
Après instructions et informations précises, la mère
doit compter et noter le nombre de mouvements fœtaux pendant trois périodes
de vingt minutes chaque jour à partir de la 32ème semaine d'aménorrhée
:
- 20 minutes le matin au réveil en restant allongée,
- 20 minutes après le déjeuner,
- 20 minutes le soir au coucher.
Pour les auteurs, au delà de 20 minutes les patientes sont pour la plupart fatiguées et les résultats ne sont plus significatifs. Chaque patiente a été munie d'une horloge et d'un compteur digital sur lequel elle a appuyé à chaque mouvement ressenti.
Mobilogramme fœtal d'EHRSTRÖM [14]
Étude du comptage quotidien des mouvements fœtaux, en fonction des semaines d'aménorrhée (entre 22 et 44 semaines). Le comptage a été réalisé sur une période de 12 heures. Les hoquets fœtaux ont été exclus et la patiente a été autorisée à décider elle-même ce qu'était un mouvement du fœtus.
Dès les premiers mouvements fœtaux ressentis, la mère a
dû les compter pendant trois périodes d'une heure, chaque jour
:
- 1 heure le matin,
- 1 heure le midi,
- 1 heure le soir.
Le total des enregistrements était multiplié par quatre pour
obtenir un chiffre sur douze heures.
Charte “Cardiff count to ten” de PEARSON [30]
De la 32ème semaine d'aménorrhée au terme, la mère
devait compter les mouvements chaque jour, en commençant à heure
fixe (neuf heures du matin) et noter sur une grille de surveillance l'heure
à laquelle elle avait perçu dix mouvements.
Si moins de 10 mouvements avaient été perçus sur 12 heures,
le nombre exact de mouvements devait être noté. Si cela, s'était
renouvelé deux jours consécutifs, la mère devait consulter
en urgence pour des examens complémentaires.
“Fetal movement charts” de VALENTIN [46]
De la 28ème semaine d'aménorrhée au terme, les patientes
devaient compter les mouvements fœtaux chaque soir pendant quinze minutes
après le coucher et reporter ce nombre sur une grille spéciale.
Après les cinq premiers jours de recensement, le nombre moyen de mouvements
fœtaux était calculé pour chaque patiente. Le seuil d'alarme
est fixé à 30 % de ce nombre moyen. La patiente devait consulter
en urgence si ce seuil était atteint deux soirs consécutifs.
Comptage des mouvements fœtaux par des observateurs (WOOD) [53]
Cette méthode est réalisée avec l'aide du médecin
qui plaçait sa main sur l'abdomen de la patiente allongée en
décubitus dorsal pendant vingt minutes, tandis que celle-ci comptait
les mouvements fœtaux.
Les résultats montraient qu'en règle générale le
nombre de mouvements fœtaux perçus par la mère était
inférieur à celui noté par l'observateur.
Valeur du recensement subjectif des mouvements fœtaux
De nombreuses études objectives ont montré que 82 à 87
% des mouvements visibles sur les tracés cardiotocographiques ou en
échographie sont effectivement perçus par la mère, après
apprentissage [41].
Deux facteurs essentiels interviennent dans la perception maternelle :
- le nombre de segments du corps fœtal participant au mouvement plus
le nombre est important, meilleure est la perception maternelle,
- la durée du mouvement : plus la durée du mouvement est longue,
mieux il est perçu.
RAYBURN [31] a pu établir une correspondance entre la sensation maternelle
et le type de mouvement visible en échographie (tableau 1).
Tableau 1 : correspondance entre la sensation maternelle et le type de mouvement visible en échographie (d'après RAYBURN [31])
Description
par la gestante |
Durée
du mouvement |
Vigueur
du mouvement |
Mouvement
réel en échographie |
“Retournement” "Étirement" |
Soutenu 3-30 secondes |
Vigoureux |
Rotation
du corps entier |
"Coup
de pied" "Sursaut" |
Courte 1-15 secondes |
Vigoureux |
Mouvement
isolé du tronc ou d'un membre |
"Tremblement" "Faible coup""Hoquet" |
Rapide < 1 seconde |
Faible |
Mouvement
de haute fréquence d'un membre ou de la cage thoracique |
Le niveau intellectuel et le facteur de personnalité jouent un grand
rôle dans l'interprétation et la sensation des mouvements fœtaux
[50].
Les primipares et les femmes entre 20 et 35 ans s'observent mieux que les
multipares, les adolescentes et les femmes de plus de 35 ans.
La sensibilité maternelle est étroitement liée au psychisme
et au désir de coopération avec le médecin [46].
Des erreurs par excès sont possibles chez certaines jeunes femmes qui
peuvent comptabiliser les déplacements passifs du fœtus, voire
les contractions physiologiques de BRAXTON-HICKS [46].
Pour BENHAMOU [4], seules 30 % de la population des femmes françaises
sont capables de faire un compte correct des mouvements, 10 % étant
trop inquiètes et 60 % trop insouciantes.
L'intérêt des différentes méthodes de recensement
subjectif des mouvements fœtaux est le dépistage et le diagnostic
de l'hypoactivité fœtale, qui se rencontre principalement en cas
de malformations et de souffrance fœtale [32].
Méthodes objectives
FEMO : Enregistreur de mouvements fœtaux de SADOVSKY [35]
Appareil composé de 2 capteurs avec un matériau piézo-électrique
très sensible.
Le capteur "piézo" transformait les forces de tension perpendiculaires
en de faibles signaux électriques qui étaient amplifiés
puis enregistrés. Il était sensible à des forces de tension
rapides et relativement insensible aux mouvements lents. La plupart des mouvements
fœtaux, surtout les coups de pied qui sont rapides, étaient captés
de façon suffisante alors que les mouvements respiratoires et les contractions
utérines, plus lents, ne l'étaient pas.
L'appareil enregistrait 90,4 % des mouvements fœtaux.
Son principal inconvénient étaient de ne pas pouvoir être utilisé en ambulatoire et donc de mobiliser femme et équipe médicale à l'hôpital.
Indications retenues par SADOVSKY :
- vérification des mouvements fœtaux en cas de doute sur la fiabilité
des rapports de la patiente,
- vérification du signal d'alarme (moins de 3 mouvements par heure),
surtout dans les grossesses à risques,
- utilisation pour l'expérimentation et la recherche.
Electromyographie (GRANAT) [18]
Utilisation de 4 grosses électrodes Beckman à chlorure d'argent
fixées sur l'abdomen maternel pour enregistrer les mouvements fœtaux
et de 2 électrodes placées sur la face antéro-interne
d'une cuisse de la patiente pour enregistrer les mouvements maternels.
2 enregistrements à 10 et 15 heures, durant 2 à 3 heures chacun.
Méthode très fiable mais purement expérimentale.
Son emploi comme examen de routine était impossible, nécessitant
l'immobilisation de la patiente et d'un observateur 4 à 6 heures par
jour.
Transducteur a bobine mobile d'ADLER [1]
Utilisation d'un transducteur passif pour la détection des mouvements
fœtaux. Une bobine mobile, placée dans un champ magnétique,
provoquait un courant induit. Le transducteur convertissait la force perpendiculaire
créée par les mouvements fœtaux en courant induit par la
bobine. Le courant ainsi obtenu était proportionnel à la fréquence
ou à la vitesse du mouvement, ce qui permettait la détection
des mouvements rapides, sans détection des mouvements lents, des contractions
utérines ou de la respiration maternelle.
Examen simple et routinier, utilisable en ambulatoire.
Doptone
L'application d'une sonde de type Sonicaid FM2 sur l'abdomen d'une patiente
permet de distinguer les sons provenant :
- de l'activité du cœur fœtal,
- des vaisseaux du fœtus,
- des vaisseaux de la mère,
- du placenta,
- des mouvements fœtaux (son facile à identifier, car unique bref
et de grande intensité).
WHEELER a montré la bonne corrélation entre les mouvements fœtaux
détectés par les signaux Doppler et les mouvements visualisés
par l'échographie (95 %) [51].
Cardiotocographe
Les pics uniques ou répétés qui apparaissent sur la ligne
d'enregistrement de la tonicité utérine correspondent aux mouvements
fœtaux mais aussi au rire, à la toux et aux mouvements maternels.
Par ailleurs, plus de la moitié des mouvements fœtaux sont oubliés
par le cardiotocographe.
Échographie
Cette méthode a été la plus utilisée pour l'étude
de l'activité fœtale. Elle a permis une étude qualitative
et quantitative des mouvements fœtaux.
Son emploi en pratique quotidienne est difficile, la patiente doit être
disciplinée et se déplacer chaque jour, elle immobilise un matériel
coûteux et du personnel qualifié et exige l'occupation d'une
salle d'échographie, en général utilisée dans
les services hospitaliers pour les consultations systématiques ou les
diagnostics d'urgence.
Profil biophysique fœtal
Les progrès de l'échographie d'une part, et la nécessité d'un examen fiable et reproductible permettant la surveillance du bien-être fœtal dans les grossesses à risques, d'autre part, ont permis le développement d'un test diagnostique : le profil biophysique [3,7].
Paramètres étudiés dans le profil biophysique
“Non stress test"
Enregistrement de l'activité cardiaque fœtale par le cardiotocographe.
Les accélérations du RCF associées aux mouvements fœtaux
sont le reflet d'une bonne oxygénation fœtale.
Mouvements fœtaux
Ils sont observées par l'échographie en temps réel. Ils sont en relation avec les cycles éveil-sommeil. Leur diminution est un bon prédicteur de souffrance fœtale [22,24,34]
Mouvements respiratoires
Ils sont également observés par l'échographie en temps réel. Le fœtus sain présente des mouvements respiratoires pendant 30 à 40 % du temps. La périodicité de ces mouvements est également liée aux cycles éveil-sommeil.
Tonus fœtal
C'est le plus subjectif des paramètres biophysiques. Il est juste le
reflet de la vigueur et de la coordination du mouvement fœtal. Il est
apprécié en échographie par un mouvement brusque en extension
d'un membre ou du tronc avec retour en flexion (attitude normale au repos).L'ouverture
et la fermeture d'une main sont également considérées
comme un tonus normal.
En cas d'asphyxie, le tonus fœtal diminue par une atteinte des mouvements
différenciés et coordonnés [24].
Quantité de liquide amniotique
La diminution de la quantité de liquide amniotique appréciée
par l'échographie (citerne inférieure à 1 cm dans 2 plans
perpendiculaire [8, 21], peut être le reflet :
- d'anomalies congénitales,
- d'anomalies fonctionnelles comme une hypoxie chronique (retard de croissance
intra-utérin, post maturité). Dans l'hypoxie chronique, la diminution
de la quantité de liquide amniotique peut précéder l'altération
des autres paramètres biophysiques.
Grade placentaire
Il ne s'agit pas d'un paramètre biophysique mais certains auteurs, comme VINTZILEOS [48], ont suggéré son insertion dans le score du profil biophysique, un grade élevé étant un facteur péjoratif (grade III ou IV).
"Score de MANNING"
La façon la plus courante d'établir le score biophysique a été résumé dans le tableau II [23].
Tableau II : score biophysique fœtal
Paramètres
|
Critères
de normalité |
Présent |
Absent
|
NST |
=
2 accélérations du RCF = 15 battements par minute et = 15 secondes sur une période de 20 minutes |
2 |
0 |
Mouvements fœtaux |
=
3 mouvements isolés des membres ou du tronc sur une période
de 30 minutes. (les épisodes de mouvements actifs continus sont considérés comme un seul mouvement) |
2 |
0 |
Mouvements
respiratoires |
=
1 épisode de 30 secondes de mouvement respiratoire sur une période
de 30 minutes |
2 |
0 |
Tonus fœtal |
=
1 épisode d'extension avec retour en flexion d'un membre ou du
tronc ou d'ouverture et de fermeture d'une main sur une période
de 30 minutes |
2 |
0 |
Quantité
de liquide amniotique |
=
1 citerne de liquide amniotique = 1 cm dans 2 plans perpendiculaires |
2 |
0 |
Un score de :
- 8 à 10 est normal (1 seul critère absent),
- 6 est suspect (2 critères absents),
- 0 à 4 est anormal (3 à 5 critères absents).
Application clinique du profil biophysique
La fréquence des tests dépend de la situation clinique et peut varier d'une évolution quotidienne à une évolution hebdomadaire. Dans une grossesse à risque une fréquence de deux évaluations du profil biophysique par semaine associées à un compte maternel quotidien des mouvements fœtaux semblent suffisantes.
La durée de l'examen est d'environ 30 minutes :
- 20 minutes pour le NST,
- 10 minutes pour l'examen échographique.
L'échographie permet également le dépistage des anomalies
fœtales et l'évaluation du grade placentaire. L'observation des
mouvements fœtaux se fait dans un plan longitudinal, ce qui permet de
visualiser les mouvements des membres, du thorax, de l'abdomen, et aussi les
mouvements respiratoires.
La quantité de liquide amniotique est appréciée par la
citerne de liquide la plus volumineuse qui se trouve généralement
vers les membres. Il est important de bien garder la sonde échographique
à angle droit avec les contours utérins et de mesurer la citerne
de liquide dans deux plans perpendiculaires.
La conduite à tenir en fonction du score a été établie
de la façon suivante (tableau III) :
Tableau III : score biophysique fœtal : interprétation et conduite à tenir
Score |
Interprétation |
Conduite
à tenir |
10 |
Enfant
normal faible risque d'asphyxie chronique ou d'infection |
Répéter
le test une fois par semaine, 2 fois dans les grossesses de diabétique,
les DT, toutes les 48 heures dans les RPM |
8 |
Enfant
normal faible risque d'asphyxie chronique ou d'infection |
Répéter
le test une fois par semaine, 2 fois dans les grossesses de diabétique,
les DT ;toutes les 48 heures dans les RPM. L'oligoamnios est une indication
d'accouchement |
6
|
Suspicion
d'asphyxie chronique ou d'infection |
Répéter
le test dans les 4 à 6 heures. L'oligoamnios est une indication d'accouchement |
4
|
Suspicion
d'asphyxie chronique ou d'infection |
Si
= à 36 semaines et clinique favorable : accouchement. si < à 36 semaines et L/S = 2 répéter le test dans les 24 heures. Si = 4 : accouchement |
0-2 |
Forte
suspicion d'asphyxie chronique ou d'infection |
Prolonger
le test sur 120 minutes, si le score est toujours = 4 : accouchement |
- Quand
le score est normal (8 à 10 en l'absence d'autres raisons cliniques,
l'expectative est indiquée,
- Quand le score est suspect (6), une nouvelle évaluation du profil biophysique
doit être répétée dans les 24 heures. Si le score
est toujours suspect, l'attitude interventionniste est indiquée,
- Quand le score est anormal (0 à 4) et que le fœtus est viable,
l'accouchement est indiqué (déclenchement, césarienne).
Les avantages du profil biophysique sont les suivants :
- il peut être effectué par du personnel spécialement entraîné
dans un temps maximal de 30 minutes,
- son utilisation dans le diagnostic des souffrances fœtales diminue le
nombre de faux positifs et il a un taux de faux négatif bas (< à
1 ‰) comparable à celui du test à l'ocytocine,
- il peut être largement appliqué,
- l'assurance du bien être fœtal dans les grossesses à risque
permet une thérapeutique conservatrice et évite une intervention
trop précoce et les risques associés d'induction manquée,
de prématurité iatrogène et d'un taux accru de césarienne,
- il permet une bonne surveillance des grossesses de diabétiques, des
dépassements de terme et des ruptures prématurées des membranes
pour prévenir l'infection,
- dans les grossesses dites normales, le profil biophysique peut être
utilisé en complément du compte maternel des mouvements fœtaux,
dès qu'une anomalie apparaît.
Les inconvénients du profil biophysique sont les suivants :
- il faut un personnel entraîné et disponible,
- il occupe un matériel onéreux et des locaux pendant des périodes
prolongées.
Tococinon™
Un capteur constitué par une céramique piézo-électrique a permis par des techniques ultra sonores classiques (effets Doppler - Fizeau) d'obtenir un signal électrique basse fréquence. Le signal a été d'abord analysé puis traité et mis en forme. A l'issue de ce traitement, le signal se présentait sous forme d'impulsion, chaque impulsion correspondant à un mouvement du fœtus. Seules des secousses conscientes de la paroi abdominale (toux, rire) ou le pouls aortique pouvait produire un effet analogue. L'absence des unes, le filtrage de l'autre ont permis de ne garder que les signaux utiles.
Schéma de principe de l'appareil.
Le nombre des mouvements
fœtaux a été visualisé sur un afficheur à cristaux
liquides en fonction du temps, permettant une rapide évaluation de l'activité
fœtale.
Le poids et les dimensions du Tococinon™ ont permis un transport facile,
sa robustesse a permis une utilisation aisée par une personne peu avertie.
Le fonctionnement a été rendu possible sans fil, l'énergie
nécessaire étant fournie par batterie rechargeable ayant une autonomie
supérieure à 1 heure. L'appareil a été commercialisé
par la société Prothia sur le nom Tococinon™ Prothia 9 :
réf TP9.
Fiabilité
La comparaison du nombre de mouvements fœtaux enregistrée par le
compteur de mouvements fœtaux au nombre de mouvements fœtaux observés
par échographie a montré un niveau de précision de 94 %
pour le Tococinon™[9].
Le taux de fausses réponses et celui des oublis n'a pas dépassé
2 %, ce qui est suffisant pour les applications cliniques.
Tococinon™ utilisé seul : hyper et hypoactivité fœtale en fin de grossesse
Une étude rétrospective portant sur une série continue
de 570 gestantes entre 37 et 42 semaines d'aménorrhées a permis
de définir l'hypo et l'hyper activité fœtale en fin de grossesse
[19].
L'hypoactivité est défini par un nombre de mouvements inférieur
à 10 pour une durée d'enregistrement de 40 minutes.
L'hyperactivité est défini par un nombre de mouvements supérieur
à 400 pour une durée d'enregistrement de 40 minutes.
Lorsqu'il existe une perturbation de l'activité motrice fœtale s'impose
la recherche d'une étiologie et le recours aux autres examens complémentaires
(enregistrements cardiotocographiques, échographie).
Un schéma de surveillance par le Tococinon™ a pu être proposé.
Intégration du recensement sur le tracé cardiotocographique.
La surveillance cardiotocographique simple d'un fœtus a permis le plus
souvent son extraction avant qu'il n'est succombé in utero, mais des
échecs du simple enregistrement ont été notés [17].
Pour la surveillance hospitalière des grossesses à risques nous
avons considéré qu'il fallait un test simple, rapide et sans risque,
qui permette avec une seule observation quotidienne d'obtenir des renseignements
fidèles, interprétations faciles pour obtenir un diagnostic rigoureux
et si possible avec un caractère prédictif.
Accélération du rythme cardiaque fœtal et mouvements fœtaux.
Une étude réalisée sur 90 patientes a permis de retenir
le paramètre suivant [26].
Nombre de mouvements fœtaux associés
aux accélérations du RCF sur nombre total de mouvements fœtaux.
L'interprétation de ce taux a été défini de la manière
suivante :
- rassurant, pourcentage supérieur à 50 %,
- suspect, pourcentage compris entre 40 et 49 %,
- inquiétant, pourcentage inférieur à 40 %.
La surveillance quotidienne noté sur une feuille de surveillance a été confiée aux sages femmes pour les hospitalisées et les consultantes. Le délai prédictif varie de 24 à 72 heures et permet d'optimiser les conditions de la naissance (déclenchements, césariennes programmées), en particulier dans les hypertensions gravidiques, les diabètes, les retards de croissance et les ruptures prématurées des membranes.
Une étude portant sur 209 grossesses à haut risque nous a permis
de définir les différents critères statistiques de ce test
[39] :
- taux de faux positifs : 13 %,
- taux de faux négatifs : 5 %,
- sensibilité : 92 %,
- spécificité : 89 %,
- valeur prédictive positive : 87 %,
- valeur prédictive négative : 95 %.
L'utilisation de ce paramètre dans les dépassements de terme est
discutable en raison de la rapidité d'évolution inopinée.
Entre 28 et 33 SA la variabilité du rythme cardiaque fœtale est
faible et le nombre de faux positifs est plus importants. Pour éviter
cet écueil, ils nous a paru nécessaire de définir pour
cette période, l'accélération du rythme cardiaque fœtal
par une amplitude d'au moins 8 bpm et d'une durée d'au moins 8 secondes.
Ce paramètre a pu être défini par une étude réalisée
sur 152 tracés échographiques enregistrés à titre
systématique entre 28 et 33 SA chez des patientes ne présentant
aucune pathologie.
Tococinon™ intégré
L'intégration du Tococinon™ dans un cardiotocographe a pu être
réalisée par la firme COROMETRICS™.
Cette appareil est un Corometrics 145 avec Toconinon™ intégré
(l'appareil a été commercialisé par la société
Prothia sous la référence TP10). Il enregistre le rythme cardiaque,
l'activité utérine et marque les mouvements fœtaux sur la
ligne inférieure du tracé cardiotocographique.
Cet appareil de poids et de dimension faibles, d'utilisation simple, permet
une interprétation aisée du tracé cardiotocographique,
le recensement du nombre de mouvements fœtaux et un calcul facile du pourcentage
de mouvements fœtaux associés aux accélérations du
rythme cardiaque sur le nombre total de mouvement fœtaux.
2 - Classification des mouvements fœtaux
Classification de TIMOR-TRITSCH [43]
Mouvements respiratoires
L'élasticité thoracique permet la dépression correspondant au gonflement de l'abdomen avec l'abaissement du diaphragme. Il n'y a pas de changement du volume fœtal ni de déplacement dans la cavité amniotique. Dans les conditions physiologiques, la durée moyenne d'un mouvement respiratoire du fœtus est de 0,4 à 1,2 seconde. Chez le fœtus normal, les mouvements respiratoires se font à glotte fermée. Chez le fœtus hypoxique, ce réflexe est absent et, lors des efforts inspiratoires de grande amplitude ("gasps") il y a une inspiration massive de méconium avant l'accouchement [20].
Les différents types de mouvements respiratoires fœtaux et leurs caractéristiques sont les suivants :
Mouvements respiratoires rapides et réguliers
- sont observables dès la fin du premier trimestre,
- représentent 30 % des périodes respiratoires en fin de grossesse
et tendent à être très réguliers après la
36ème semaines [12],
- augmentent de fréquence 2 à 3 heures après les repas
maternels ou après ingestion de 50 g de sucre.
"Gasps" isolés (ou sanglots)
Le "gasp" est défini physiologiquement par la mise en œuvre de muscles respiratoires accessoires [53]. Leur fréquence est de 1 à 4 par minute. Ils ne représentent que 1 à 5 % des périodes respiratoires chez le fœtus normal.
Trains de "gasps" en rythme rapide
Ils proviennent d'un état d'asphyxie fœtale, leur fréquence est alors de 10 à 20 par minute [44, 45].
Apnée
Sa fréquence est très variable. Sa durée peut être
de 2 heures chez le fœtus normal [28].
Le mécanisme responsable de l'alternance de phase d'apnée et des
mouvements respiratoires est inconnu.
Certains facteurs sont connus pour stimuler ou inhiber les mouvements respiratoires.
Facteurs stimulant les mouvements respiratoires :
- l'hypercapnie,
- les psychoanaleptiques,
- la caféine,
- la nicotine,
- la stimulation tactile et douloureuse,
- la compression transitoire du cordon ombilical.
Ces deux derniers facteurs peuvent expliquer la fréquente association
des mouvements respiratoires et des contractions utérines (pendant ou
immédiatement secondaires à une contraction) observée par
MANNING [23].
Facteurs inhibant les mouvements respiratoires
Ce sont :
- l'hypoxie,
- l'acidose,
- les tranquillisants,
- les analgésiques,
- l’hypoglycémie peut-être.
Mouvements d'enroulement du fœtus
C'est un mouvement soutenu d'enroulement du fœtus sur lui-même, qui est associé à un déplacement de tout le corps fœtal. Sa durée moyenne est de 14 secondes.
Mouvements simples
Ils sont brefs et aisément palpables. Ils sont généralement
associés à un déplacement visible de la paroi abdominale
maternelle.
Ils correspondent aux coups de tête, coups de pied ou coups de poing.
Leur durée moyenne est de 3 secondes.
Mouvements de grande intensité
Ils sont brefs, aisément palpables, et parfois visibles. La mère les qualifie de rapides comme des coups de pied et ils sont ressentis dans tout l'abdomen sans pouvoir être localisés facilement. Leur durée est d'environ 0,12 à 0,4 seconde.
Classification de PATRICK [29]
- Mouvements d'étirement,
- Mouvements d'enroulement,
- Mouvements isolés des membres.
Classification de BERNADI [5] et WITTMANN [52]
- Mouvements puissants et soudains, avec déplacement du corps,
- Mouvements lents, sans déplacement du corps,
- Hoquet (mouvements fœtaux spasmodiques très brusques, réguliers,
sur une période de plusieurs minutes).
Classification simplifiée selon EHRSTRÖM [15]
- Mouvements puissants et soudains, avec déplacement du corps,
- Mouvements lents, ne touchant que les membres du fœtus, sans déplacement
du corps.
3 - Variation de l'activité de l'activité motrice fœtale
Activité motrice et âge gestationnel
La dynamique embryonnaire et fœtale obéit à certaines lois. La mise en place des possibilités de mouvements du fœtus débute avec le myotome somitique et l'ébauche des membres. Ensuite, l'arc réflexe médullaire commence la véritable hiérarchisation avec une activité désordonnée et faible. Avec le mésencéphale apparaît la commande intrinsèque simple mais répétitive. Avec le télencéphale, la commande provoque le geste et son harmonie, la sensorialité permet la réponse à certains stimuli [10].
L'apparition de l'activité fœtale suit un ordre chronologique qui
a pu être étudiée par l'échographie. VAN DONGEN [47]
a étudié l'activité motrice fœtale pendant le premier
trimestre et en a fait une description détaillée, déterminant
l'âge gestationnel par la longueur "tête-fesse".
- A partir de 7 semaines et demie, l'embryon présente
de très fins mouvements vibratoires à l'un de ses pôles.
Il mesure environ 10 mm,
- A la 8ème semaine, on observe des mouvements ondulatoires
entrecoupés de longue période d'inactivité. Il mesure 12
à 22 mm,
- A la 9ème semaine, on observe des mouvements convulsifs
de tout le corps. L'embryon mesure 20 à 30 mm et repose encore au fond
du sac gestationnel,
- A partir de 10 - 12 semaines, alors que sa taille est de
30 à 65 mm, l'embryon se déplace dans le sac gestationnel qu'il
occupe en grande partie avec les jambes à demi fléchies.
A cette période, trois types de mouvements sont observés, entrecoupés
de phases de sommeil plus ou moins longues, pouvant durer jusqu'à 5 minutes
et demi :
- mouvements très importants de tout le corps, pouvant durer plus de
7 minutes, puis l'embryon retourne toujours dans la partie la plus basse du
sac,
- coups de pieds sporadiques, suffisamment forts pour bouger tout le corps et
déplacer l'embryon,
- hoquets, poussées violentes et régulières du tronc, qui
affectent surtout le thorax, sans déplacement de l'embryon, elles sont
inconstantes.
A 14 semaines, il existe une coordination : le fœtus suce son pouce.
A 21 semaines, la formation des structures nerveuses s'achève. La synchronisation des mouvements apparaît (tableau IV).
Tableau IV : types de mouvements fœtaux en fonction de l'âge gestationnel
Semaines d’aménorrhée |
Types
de mouvement |
7
|
Fins
mouvements vibratoires |
8
|
Mouvements
ondulatoires entrecoupés de périodes d’inactivité |
9
|
Mouvements
convulsifs de tout le corps, embryon reposant au fond du sac gestationnel |
10-12 |
Embryon
nageant dans le liquide amniotique, mouvements très important de tout le corps, mouvements de flexion-extension des membres, hoquet inconstant |
13-14 |
Mouvements
respiratoires, déglutition débutante, réponse aux stimuli mécaniques, Succion du pouce |
18-19 |
Respiration
et déglutition simultanées |
20-21
|
Mouvements
des doigts, des paupières et de la bouche |
26-28 |
Mouvements
du tronc ou de la tête aux stimuli sonores |
La mère commence à ressentir les premiers mouvements fœtaux entre la 18ème et la 22ème semaine d'aménorrhée, les multipares les ressentent souvent plus précocement que les primipares. D'après EDWARDS [13], les mouvements se développent en 3 phases (tableau V).
Tableau V : résumé de la cinétique des mouvements fœtaux selon EDWARDS
Périodes |
Durée |
Caractéristiques |
1.
Période initiale |
15-30
jours |
0
à 1 mouvement fœtal pour 100 minutes |
2.
Période “d'accélération” |
75-100
jours |
Augmentation
progressive de 2 à 10 mouvements fœtaux pour 100 minutes |
3.
Période de “décélération” |
15
derniers jours avant le début du travail |
Diminution
progressive des mouvements fœtaux |
La plupart des auteurs ont montré une augmentation progressive des mouvements de la 20ème à la 32ème semaine d'aménorrhée pour atteindre un maximum entre la 29ème et 38ème semaine [15, 27, 35]. Des études ont montré qu'il n'y avait pas de diminution significative des mouvements au cours de la semaine précédant l'accouchement [11, 40].
Notion de "MAS" ("Movement alarm signal")
Selon les études [6, 30, 33, 37] le seuil d'alarme varie de moins de
10 à moins de 180 mouvements fœtaux sur 12 heures avec le Tococinon™.
Pour THACKER [42], la valeur prédictive de ce test est pauvre pour les
tests positifs (taux de faux positifs supérieur à 50 %) mais la
valeur prédictive négative est rassurante et la spécificité
du test supérieure à 90 %.
La diminution du nombre des mouvements fœtaux peut donc indiquer un risque
pour le fœtus mais nécessite impérativement des examens complémentaires.
Facteurs influençant les variations de l'activité motrice fœtale
Il existerait 2 pics d'activité l'un le matin vers 7 heures et l'autre le soir, entre 21 heures et 1 heure avec un minimum vers midi.
Il ne semble pas exister de différence significative du nombre des mouvements entre les deux sexes.
Poids fœtal
Les fœtus présentant un RCIU important bougent moins que les autres
[31, 38, 40].
Les petits fœtus non pathologiques
bougent plus que les gros fœtus.
Pendant toute la période où le tracé cardiotocographique est évocateur de sommeil fœtal, on observe une relative immobilité du fœtus avec cependant l'apparition quasi constante de mouvements isolés. Les périodes d'inactivité fœtale correspondant au sommeil dépassent rarement 35 minutes pour un fœtus normal en fin de grossesse.
Rythme cardiaque fœtal
SADOVSKY [36] a montré qu'il existait une corrélation entre les mouvements fœtaux et les accélérations du RCF (supérieures à 15 bpm, durant au moins 15 secondes). Le fœtus sain bougeait au moment des accélérations. Cette constatation a été le point de départ du travail sur les accélérations du RCF et les mouvements fœtaux recensés par le Tococinon™ [26] qui a abouti à la définition du taux :
Nombre de mouvements associés aux accélérations du RCF
Nombre total de mouvements
qui est normal au dessus de 50 %, suspect entre 40 et 49 % et pathologique en
dessous de 40 %.
L'influence des contractions utérines est très variable en fonction du fœtus. En règle générale, elles stimulent le fœtus jusqu'à un certain seuil au delà duquel le fœtus ne réagit plus, seuil de 3 contractions sur 10 minutes [40].
Les mouvements fœtaux sont augmentés par le stress maternel.
Ils ne sont pas modifiés par l'ingestion d'alcool et l'administration
de tocolytiques.
Ils diminuent chez les fumeuses, avant ou après absorption de sédatifs
barbituriques, tranquillisants [31, 40].
Stimulations externes
L'activité fœtale peut être stimulée par des facteurs
extérieurs : stimulation sonore, palpation du pôle céphalique
ou ébranlement du fond utérin [49], éclairage brutal par
des lampes de 250 watts, stimulation lors de l'amniocentèse ou par les
ondes ultrasonores d'un examen Doppler pulsé [40].
La stimulation sonore par mise en place d'un électro-larynx artificiel
sur l'abdomen maternel en regard du pôle céphalique fœtal
semble être la méthode la plus efficace [2]. Très récemment,
ELLER a montré que l'effet de la stimulation sonore était identique
qu'elle soit appliquée au niveau du pôle céphalique ou du
pôle caudal [16].