4 . 3  -  Un instrument d'évaluation doit être validé

Les deux principales qualités recherchées pour un outil d'évaluation sont la validité et la reproductibilité. Un instrument est valide lorsqu'il mesure réellement ce qu'il est prétendu mesurer. Une grille validée ne doit pas être modifiée, ni panachée avec une autre. Il est indispensable qu’une grille soit utilisée en respectant les règles de recueil  des  différentes  variables  et  les consignes d’interprétation des résultats. Une grille d’évaluation de la dépendance ne peut servir qu'à évaluer la dépendance (pour laquelle elle a été conçue) et non autre chose.

Parmi les outils validés, nous présentons en annexes (Annexes 1 à 6) les plus utilisés en France.

Les principes de validation d’un instrument d’évaluation de la dépendance
On distingue la validité de critère et la validité de construit selon qu'il existe ou non un instrument de référence (gold standard).

S'il existe un instrument de référence, la validité de critère est vérifiée en comparant l'instrument testé à celui de référence. Cette validité dépend de la sensibilité, de la spécificité, et de la valeur prédictive positive de l'instrument testé. La sensibilité d'un outil d'évaluation de la dépendance est la pro- portion de sujets classés dépendants par l'outil parmi tous les sujets réellement dépendants. La spécificité est la proportion de sujets classés indépendants par l'outil parmi ceux réellement indépendants. La valeur prédictive positive est la proportion de sujets dépendants classés comme tels par l'outil.

S'il n'existe pas d'outil de référence - c’est le cas de la dépendance - on étudie alors la validité de construit. Pour vérifier ce type de validation, on attend  de  l'instrument  testé  qu'il  fournisse  un résultat identique dans la même situation. Ainsi, dans le cadre de l'évaluation de la dépendance, on peut attendre de l'instrument testé qu'il distingue les populations selon la médicalisation de leur structure d'hébergement : unité de soins de longue durée, section de cure médicale, foyer-logement.
On peut également attendre de l'outil testé qu'il soit corrélé avec une mesure de charge de soins infirmiers. Plusieurs études sont habituellement nécessaires pour prouver la validité de construit d'un outil.

Un  outil  est  reproductible  lorsqu'il  donne  des résultats comparables dans des situations comparables. On distingue les fidélités inter-juges et intra-juges. Pour la fidélité inter-juge, on recherche la concordance des résultats obtenus par deux ou plusieurs examinateurs qui évaluent le sujet avec le même outil. Pour la fidélité intra-juge, ou fidélité test-retest, on recherche la stabilité de la mesure en comparant les résultats de deux évaluations du même sujet, effectuées en deux ou plusieurs temps par le même examinateur.

4 . 4  -  Choix des instruments d’évaluation de la dépendance

Lors d’une évaluation de la dépendance, les instruments d’évaluation validés seront choisis en fonction de la qualité de leur validation et du but de l’évaluation. La détermination des capacités d’un individu pour les gestes courants intéressant le corps  utilisera  l’échelle  des  activités  de vie quotidienne (Activities of Daily Living ADL) (soins corporels, habillement, toilette,  transfert,  continence,  alimentation)  (Annexe  I).  Cette  grille  simple  et rapide à renseigner est bien validée. Elle est considérée comme une référence dans la littérature internationale. Cette grille de plus  prédit  fortement  le  pronostic  en terme de morbi-mortalité. Lors de l’évaluation de la dépendance chez des sujets âgés vivant à leur domicile, il est nécessaire d’évaluer les activités courantes qui nécessitent une utilisation des fonctions cognitives dites instrumentales (calcul, élaboration  de  stratégies  exécutives). L ’échelle des activités instrumentales de la vie quotidienne (Instrumental ADL) (Annexe II) est la plus utilisée. Les activités ainsi évaluées  sont la capacité d’utiliser le téléphone, de faire les courses, de préparer un repas, de faire le ménage, de laver le linge, d’effectuer un voyage ou des transports urbains, de prendre un traitement médicamenteux et de gérer un budget personnel.  Cette  échelle  fait  référence.  Il convient de souligner que le sujet évalue lui-même ses capacités. Une vérification auprès des proches peut être nécessaire, voire une mise en situation (préparation des médicaments, utilisation du téléphone, manipulation de la monnaie). La mise en oeuvre ou l’observation des activités instrumentales permettent de dépister des troubles des fonctions exécutives, parfois premier signe d’une démence dégénératrice de type Alzheimer.

La grille AGGIR (Autonomie Gérontologique Groupes Iso Ressources) (Annexe III) sert à évaluer l’état fonctionnel et à classer les besoins du sujet au sein d’un référentiel à 6 niveaux. Cette grille est utilisée à des fins réglementaires : mise en place de la Prestation Spécifique Dépandance DéfinitionLa prestation spécifique dépendance est une aide destinée à prendre en charge les dépenses liées à la dépendance des personnes âgées à partir de 60 ans.C'est une prestation en nature, c'est à dire directement affectée au financement des dépenses d'aides préalablement définies et distinctes des soins. Elle est attribuée par le département au titre de l'aide sociale.et tarification des institutions.

D’autres grilles ont été proposées pour des utilisations variées, telle que l’évaluation de la charge en soins d’un service ou le suivi d’un sujet. Dans ce cadre on peut citer  celle  de  la  Société  Française  de Gérontologie (Grille de Kuntzmann) ou la grille Géronte.

Annexe I

Echelle des activités de la vie quotidienne

But
Evaluer de manière objective les activités de la vie quotidienne.
Description
L’autonomie pour une activité de vie quotidienne est côté 1. Un score de 6 indique une autonomie complète. Un sujet âgé dont le score est < 3 est considéré comme dépendant.
Remarques
- Simplicité et briéveté de passation
- Très utilisé dans la littérature internationale
- Ne tient pas compte des déplacements
- 20 % des patients restent non classés
Référence
Katz S., Dowtn T.D., Cash H.R. Progress in the development of the index of ADL. Gerontologist 1970 ; 10 : 20-30

Echelle des activités de la vie quotidienne - Indice de KATZ

Annexe II

Echelle des activités instrumentales de la vie quotidienne

But
Evaluer le comportement et l’utilisation des outils usuels.
Description

Pour chaque item, la cotation ne peut être que 0 et 1. Le score est côté de 0 à 5 pour les hommes et de 0 à 8 pour les femmes.
Remarques
- Le  temps  de  passation  est  bref (5 minutes environ)
- Cette échelle demande un apprentissage mais peut être effectuée aussi bien par un médecin, une infirmière, une aide-soignante, qu’un travailleur social. Les informations sont fournies par le patient lui-même si les fonctions  cognitives  sont  préservées, sinon par son entourage.
- Questionnaire adapté aux personnes âgées vivant à leur domicile.
- Parfois, la personne apprécie avec difficulté ses capacités réelles.
- Les items n° 1, 2, 6, 7 permettent de dépister les troubles des fonctions exécutives qui peuvent apparaître de manière précoce dans les démences dégénératives.
Référence
Lawton M., Brody E.M. Assessment of older people : self-maintaining and instrumental  activities  of  daily  living. Gerontologist 1969 ; 9 : 179-186.

Echelle des activités instrumentales de la vie quotidienne - Test de Lawton

Annexe III

Grille AGGIR (Autonomie Gérontologique Groupes Iso ressources)


La grille AGGIR cherche à définir le profil de dépendance d’un sujet âgé donné. La dépendance y est évaluée en terme de niveau de demande de soins requis (appelé “ G roupe  Iso-Ressource  (GIR)”. La  grille comporte 10 items ou “variables discriminantes”. Un algorithme classe les combinaisons de réponses aux variables discriminantes en 6 Groupes Iso-Ressources.

Description

Définitions des variables
Les variables discriminantes se définissent de la manière suivante.
1- Cohérence
Converser et/ou se comporter de façon logique  et  sensée  par  rapport  aux normes admises par la société dans laquelle on vit.
2- Orientation
Se repérer dans le temps, les moments de la journée, dans les lieux et leur contenu.
3- Toilette
Elle concerne l’hygiène corporelle et est renseignée en 2 parties :
- Toilette du haut : visage, face antérieure  du  tronc,  membres  supérieurs, coiffage
- Toilette du bas : régions intimes, membres inférieurs.
4- Habillage
Cette variable comporte l’habillage, le déshabillage  et  est  renseignée  en  3 parties :
- Habillage du haut : vêtements passés par les bras ou la tête
- Habillage moyen : fermeture sur le corps  (boutonnage,  ceinture,  bretelles, pressions, etc…)
- Habillage du bas : vêtements passés par le bas du corps.
5- Alimentation
Cette variable comprend 2 parties :
- Se  servir  :  couper  les  aliments, emplir son verre, etc…
- Manger : porter les aliments à la bouche et avaler.
6- Élimination urinaire et fécale
Assurer l’hygiène et l’élimination avec 2 parties correspondant aux éliminations urinaires et fécales.
7-Transfert,  se  lever,  se  coucher, s’asseoir
Passer d’une des trois positions (couché, assis, debout) à une autre, dans les deux sens.
8- Déplacement à l’intérieur
À l’intérieur de la maison et en Institution au sein du lieu de vie y compris les parties communes.
9- Déplacement à l’extérieur
À  partir  de  la  porte  d’entrée  sans moyen de transport
10-Communication à distance
La communication à distance est définie par ALERTER, c’est-à-dire utiliser les moyens de communication à distance  :  téléphone,  alarme,  sonnette, téléalarme, dans un but d’alerter.

Les modalités des variables discriminantes
A- fait seul, totalement, habituellement et correctement
B- fait partiellement ou non habituellement et correctement
C - ne fait pas

Les groupes Iso-ressources (GIR)
Les groupes iso-ressources correspondent aux profils les plus fréquents d’association de variables.
Le groupe 1 correspond aux personnes les plus dépendantes, alors que le groupe 6 regroupe  les  personnes  qui  n’ont  pas perdu leur autonomie pour les actes discriminants de la vie courante.

Remarque
La grille AGGIR est inscrite dans la loi française (J.O. : n°97-60 du 24 janvier 1997) comme  outil  d’évaluation  de  la  dépendance en vue de déterminer si une personne peut bénéficier et à quel niveau de la Prestation Spécifique Dépendance. Seules les personnes dont le GIR est côté 1, 2 ou 3 peuvent prétendre à la Prestation Spécifique Dépendance.

L’utilisation de la grille AGGIR s’est élargie en pratique et est utilisée, par exemple, pour définir la dépendance de pensionnaires d’une institution ou pour l’appréciation de la charge de travail d’une équipe soignante.

Références
Syndicat  National  de  Gérontologie Clinique. AGGIR Guide pratique pour la codification des variables. Principaux profils des groupes iso-ressources. La revue de Gériatrie. 1994;19:249-259

 LOI no 97-60 du 24 janvier 1997 tendant, dans l'attente du vote de la loi instituant une prestation d'autonomie pour les personnes âgées dépendantes, à mieux répondre aux besoins des personnes âgées par l'institution d'une prestation spécifique dépendance (1).  

Les 10 variables discriminantes du modèle A.G.G.I.R
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