Ce texte prend en compte l’avis du Conseil supérieur d’hygiène publique de France, section des maladies transmissibles (séance du 27 juin 2003).

1  -  Gale acarienne humaine

1 . 1  -  Définition

La gale humaine est due à la contamination de la peau par un acarien Sarcoptes scabiei, variété hominis.

La réaction de l’organisme contre les sarcoptes et leurs déjections explique la plupart des signes cliniques.

Épidémiologie

Les modalités de la transmission sont étroitement liées aux caractéristiques de l’acarien. C’est un acarien femelle qui est responsable ; celui-ci a une bonne mobilité pour des températures de 25 à 30°C ; il peut se déplacer facilement à la surface de la peau de plusieurs centimètres par heure. Il est tué très rapidement par des températures de 55°C, perd sa mobilité en dessous de 20°C et meurt en 12 à 24 heures. La période d’incubation est de l’ordre de trois semaines ; elle est plus courte en cas de réinfestation. Le cycle parasitaire a une durée de l’ordre de 20 jours mais en règle générale, la population parasitaire est peu importante, de l’ordre de 10 femelles.

La gale est contagieuse et se transmet dans l’immense majorité des cas par des contacts humains directs, intimes et prolongés (cadre familial, couple). Elle est considérée comme une infection sexuellement transmissible (IST).

La transmission indirecte par les vêtements ou la literie est plus rare sauf dans les formes hyperkératosiques.

Elle peut survenir par épidémies dans les collectivités médicalisées et foyers de personnes âgées, dans les milieux sociaux défavorisés ou dans une population aux moyens de défense amoindris (spontanément ou par un traitement local et/ou général).

1 . 2  -  Diagnostic

1 . 2 . 1  -  Forme typique

La forme typique comporte les signes suivants :

  • un prurit diffus à recrudescence nocturne, épargnant le visage. Il a souvent un caractère conjugal ou familial ;
  • des lésions cutanées non spécifiques fréquentes, dues au grattage, et dont la topographie est évocatrice :
    • espaces interdigitaux,
    • face antérieure des poignets,
    • coudes et emmanchures antérieures,
    • ombilic,
    • fesses,
    • face interne des cuisses,
    • organes génitaux externes chez l’homme,
    • mamelon et aréole mammaire chez la femme ;
  • des lésions plus rares, spécifiques , à rechercher systématiquement :
    • les sillons scabieux (Figure 1) : ces lésions sinueuses, de quelques millimètres de long, correspondent au trajet de l’acarien femelle dans la couche cornée de l’épiderme. Ils sont surtout visibles entre les doigts et sur la face antérieure des poignets. Ils peuvent être mis en évidence par coloration à l’encre. Chaque sillon contient les œufs pondus et à l’une des extrémités peut se trouver une discrète surélévation correspondant à la position de l’acarien femelle (éminence acarienne),
    • les vésicules perlées : ces petites élevures translucides reposant sur une base érythémateuse, siègent surtout dans les espaces interdigitaux,
    • les nodules scabieux : il s’agit de papulo-nodules rouges ou violacés, prurigineux, parfois excoriés, siégeant surtout sur les régions génitales de l’homme (Figure 2).
Figure 1 : Gale : sillon scabieux
Figure 2 : Gale de l’adulte : chancre scabieux et lésions excoriées du voisinage

1 . 2 . 2  -  Formes cliniques

1 . 2 . 2 . 1  -  Gale du nourrisson

Elle est particulière par l’existence de :

  • vésiculo-pustules palmaires et plantaires ;
  • nodules scabieux périaxillaires (Figure 3) ;
  • et l’atteinte possible du visage.
Figure 3 : Gale du nourrisson : nodules scabieux périaxillaires

1 . 2 . 2 . 2  -  Gale disséminée inflammatoire

Caractérisée par le caractère profus et étendu de l’éruption cutanée, (y compris le dos), elle est la conséquence d’un diagnostic tardif, parfois d’un déficit immunitaire (infection par le virus de l’immunodéficience humaine en particulier), ou de traitements inadaptés (corticothérapie locale ou générale).

1 . 2 . 2 . 3  -  Gale hyperkératosique (dite « norvégienne »)

Le terrain est particulier : immunodéprimés ou sujets âgés en collectivité.

La contagiosité est majeure en raison d’une prolifération parasitaire intense.

Le prurit est le plus souvent discret, voire absent.

L’aspect est particulier : atteinte de tout le corps y compris le visage, le cuir chevelu et les ongles, voire érythrodermie avec zones hyperkératosiques.

1 . 2 . 2 . 4  -  Gale des « gens propres »

Elle est trompeuse car pauci-lésionnelle. Il faut y penser devant tout prurit diffus persistant. Le diagnostic repose sur l’anamnèse et la recherche de lésions spécifiques.

1 . 2 . 2 . 5  -  Formes compliquées

Il peut s’agir :

  • d’une surinfection avec impétiginisation des lésions ; tout impétigo de l’adulte doit faire rechercher une gale ;
  • d’une eczématisation : secondaire à la gale ou à son traitement ;
  • de nodules post-scabieux : lésions papulo-nodulaires prurigineuses rouges ou cuivrées pouvant persister plusieurs semaines après un traitement efficace. Leur siège est ubiquitaire. Ils ne contiennent pas de sarcopte et sont d’origine immuno-allergique.

1 . 2 . 3  -  Diagnostic positif

Le diagnostic est, avant tout, clinique et repose sur l’anamnèse (prurit familial à renforcement nocturne) et l’éruption cutanée de topographie évocatrice. Il n’y a pas de signe biologique spécifique.

La mise en évidence de l’acarien est difficile
en dehors des formes profuses et hyperkératosiques. Il faut gratter un sillon avec un vaccinostyle, recueillir le matériel de ce sillon en prélevant, si possible, l’éminence acarienne. L’examen au microscope permet de voir les œufs ou l’acarien adulte femelle.

1 . 2 . 4  -  Diagnostic différentiel

Il convient d’éliminer les affections prurigineuses généralisées :

  • la pédiculose corporelle qui se caractérise par un prurit généralisé, notamment du dos, et des lésions de grattage chez des sujets à l’hygiène très défectueuse. Les poux responsables sont facilement retrouvés dans les vêtements ;
  • les gales d’origine animale qui donnent chez l’homme un prurit avec des lésions excoriées, mais pas de sillon. Le diagnostic est fondé sur la notion de présence d’animaux d’élevage ou domestiques au contact du malade ;
  • les prurits métaboliques (cholestase, insuffisance rénale…), le prurit lié à un éventuel lymphome, le prurit en relation avec la sécheresse cutanée, qui comportent surtout des lésions de grattage mais ni sillon, ni topographie particulière.

1 . 3  -  Traitement

1 . 3 . 1  -  Traitement général

Il s’agit de l’ivermectine : 200μg/kg per os en prise unique (sécurité d’emploi non établie chez l’enfant de moins de 15 ans).

1 . 3 . 2  -  Traitements locaux

Tableau 1 : Traitements locaux

Il faut traiter toutes les régions du corps y compris le cuir chevelu et le visage s’il y a un doute sur leur atteinte.

1 . 3 . 3  -  Indications

1 . 3 . 3 . 1  -  Au niveau individuel

Il faut traiter simultanément le sujet parasité et toute personne ayant eu un contact intime avec le malade.

En cas de gale commune, à domicile, il faut prescrire un traitement local ou per os (facilité, nombre de personnes important).

En cas de gales profuses, il faut :

  • isoler le malade ;
  • prescrire un traitement per os (± local) ;
  • avoir une définition large des sujets contacts ;
  • prescrire une antibiothérapie en cas d’impétiginisation.


Il faut traiter à nouveau :

  • les sujets ayant des signes cliniques spécifiques et/ou un examen parasitologique positif 8 à 15 jours après le traitement ;
  • certaines gales profuses ;
  • (les nodules post-scabieux ne constituent pas une indication).

1 . 3 . 3 . 2  -  Au niveau environnemental

  • Laver les vêtements, draps, serviettes (si possible en machine).
  • Pas de désinfection de l’environnement.
  • Décontamination des lieux de vie à envisager en cas de gale profuse.

1 . 3 . 3 . 3  -  Au niveau de la collectivité

  • Stratégie de prise en charge en concertation avec les autorités sanitaires.
  • Traiter au minimum toutes les personnes en contact et au maximum toutes les personnes vivant, travaillant ou visitant l’institution (traitement per os).
  • Prévenir les familles.
  • Enfants : éviction jusqu’à 3 jours après le traitement (gale commune) et jusqu’à négativation de l’examen parasitologique pour les gales profuses.
Aller plus loin

Devant un prurit persistant (8 à 15 jours après le traitement), penser à :
  • une irritation par le traitement ;
  • un eczéma de contact ;
  • une acaraphobie ;
  • aux autres causes de prurit ;
  • un échec du traitement de la gale : diagnostic établi en présence de lésions cliniques évocatrices et/ou d’un examen parasitologique positif.

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