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La corticothérapie locale, introduite en thérapeutique en 1952, a représenté une révolution thérapeutique, qui s’est rapidement accompagnée de la synthèse de nouveaux dérivés de plus en plus actifs.
Des dérivés halogénés ont été synthétisés à partir de 1953, et de nouveaux sels à partir de 1960. Les actions anti-inflammatoire et antiproliférative sont principalement utilisées en thérapeutique, mais d’autres actions biologiques existent.
La bonne pénétration de ces molécules et leurs activités font qu’elles peuvent générer des effets secondaires. Il convient donc de connaître leurs indications et contre-indications. Il faut choisir le corticostéroïde en fonction de son niveau d’activité, de la qualité de son excipient et d’un éventuel additif.
Mécanismes d’action
Le corticostéroïde (CS) traverse la membrane cytoplasmique par diffusion simple et se lie à un récepteur spécifique. Ce complexe récepteur-CS va traverser la membrane nucléaire et, par interaction avec un site receveur nucléaire chromatinien, agir sur l’ADN et modifier l’expression du gène. Il induit ainsi une modification de la transcription. L’affinité d’un CS pour le récepteur varie d’une molécule à l’autre et différents gènes sont impliqués. Les effets sont donc fonction des gènes influencés et des cellules qui expriment des récepteurs différents, donnant ainsi une variété d’effets. En particulier, les CS inhibent la synthèse de l’IL-1 et augmentent celle de la lipocortine. Celle-ci inhibe la phospholipase A2, laquelle fait libérer de l’acide arachidonique à partir des phospholipides membranaires. L’action sur d’autres cytokines est probable, dont le TNF. Les CS sont donc anti-inflammatoires, immunosuppresseurs et antimitotiques. Cependant les CS ont des actions suppressives sur la sécrétion d’autres cytokines pro-inflammatoires. Relation structure-activité Le noyau de base est le cortisol. Il a été modifié pour améliorer la sélectivité, la biodisponibilité et l’activité. Sélectivité Elle cherchée à augmenter les actions anti-inflammatoire et antiproliférative, mais ceci accroît le risque systémique. La liposolubilité augmente en masquant les sites OH et en introduisant une longue chaîne carbonée latérale. Biodisponibilité Elle dépend de la pénétration cellulaire de la molécule, en fonction de sa liposolubilité. La biodisponibilité varie selon la nature de l’excipient. Le propylène glycol permet une dissolution complète de la molécule, donc une bonne diffusion. Activité Elle est due à la liaison (affinité) aux récepteurs. Une haute affinité implique un effet local plus important. Elle est estimée d’après le test de vasoconstriction. En clinique, c’est l’association biodisponibilité-activité qui est responsable de la puissance des CS. La comparaison test clinique/test de vasoconstriction a montré une bonne corrélation dans l’ensemble. Les CS sont ainsi classés en 4 niveaux d’activité (Tableau 1). Dans cette classification, il existe des différences selon la nature de l’excipient. Une augmentation de concentration veut rarement dire une augmentation automatique d’activité, et l’équivalence dans un même groupe est grossière. Actions biologiques Elles ont été étudiées sur de nombreux modèles, animaux et humains avec comme corollaire l’étude des effets secondaires. Vasoconstriction Une vasoconstriction durable des vaisseaux dermiques s’observe après occlusion du site d’application. Ce phénomène est à la base d’un test, utilisé pour étudier la puissance des CS locaux. Il existe une corrélation assez correcte avec l’activité anti-inflammatoire mais pas toujours avec l’effet antimitotique. Ce test est utilisé actuellement avec la préparation commerciale. Il existe de faux effets positifs avec les excipients hydratants de la couche cornée. La température ambiante modifie aussi les résultats. Effet anti-inflammatoire Le CS diminue l’érythème et l’œdème de toute cause d’inflammation (action non spécifique). Les cibles sont multiples : leucocytes, macrophages, médiateurs chimiques endogènes. C’est l’effet thérapeutique le plus recherché. Les tests ont porté sur différents modèles expérimentaux ou in vivo (eczéma de contact, papule histaminique). Certains modèles ne sont pas reproductibles. D’autres paramètres peuvent être étudiés comme la molécule, sa concentration dans la préparation, le site d’application, l’excipient ou le degré d’occlusion sur la vitesse d’absorption percutanée. Effet antimitotique (ou antiprolifératif) Il s’agit d’une action non spécifique sur le cycle cellulaire avec diminution de synthèse des macromolécules. Au niveau épidermique, les CS ont un effet atrophiant. La cicatrisation épidermique est diminuée chez l’animal. La diminution du nombre des mélanocytes aboutit à une hypopigmentation. Au niveau dermique, les CS les plus forts inhibent la croissance des fibroblastes et diminuent la synthèse de collagène. Les fibres élastiques et les protéoglycanes sont également altérés. Les dendrocytes du derme papillaire (facteur XIII+) sont diminués de taille, sont moins dendritiques et secondairement réduits en nombre. L’atrophie graisseuse se voit surtout après injection in situ . Effet immunosuppresseur Certains mécanismes ont été vus lors de l’effet anti-inflammatoire. Les CS diminuent aussi les cellules de Langerhans (population CD 1+, DR+) et réduisent leur capacité de présentation de l’antigène. Cette action rapide (24h) est restaurée en 14–21 jours. Actions minéralo- et glucocorticoïde L’effet sur l’axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien se mesure par la diminution du cortisol plasmatique. Cet effet est exceptionnellement symptomatique. Tachyphylaxie ou tolérance aiguë En clinique, elle se révèle par la résistance (tolérance) au traitement lors d’applications prolongées et ininterrompues. Elle a été étudiée par différents tests. Un corticoïde ayant un index de vasoconstriction fort entraînera une tachyphylaxie plus rapide et plus durable qu’un CS d’index de vasoconstriction inférieur. Un même CS utilisé à deux concentrations différentes montre que plus la concentration est élevée, plus rapide sont le début et le développement de la tachyphylaxie. Pénétration percutanée et absorption Elles nécessitent un relargage à partir de la préparation en quantité suffisante. Les voies de pénétration principales sont transépidermique et transfolliculaire. De nombreux facteurs influencent la pénétration. Peau Tous les sujets dans les mêmes conditions n’absorbent pas la même quantité (influence individuelle). L’absorption au niveau de l’avant-bras est de 1 %, du cuir chevelu 4 %, du front 7 %, des grandes lèvres 8 %, du scrotum 36 %. L’absorption dans les plis est importante (influence anatomique). La pénétration par la couche cornée est un phénomène de diffusion passive. Elle représente le facteur barrière principal par son contenu lipidique et son épaisseur. La pénétration est diminuée aux paumes et aux plantes. La pénétration est augmentée dans les dermatoses érythémato-squameuses (dermatite atopique, psoriasis universalis), mais est normale dans le psoriasis en plaques. La membrane des kératinocytes jouerait un rôle, expliquant la nécessité du caractère lipophile d’une partie de la molécule. Excipient Un CS est plus absorbé dans une pommade que dans une crème. L’absorption, donc la puissance est augmentée avec le propylène glycol, l’acide salicylique, l’occlusion (application sous un film plastique). Les liposomes augmentent la concentration du CS dans l’épiderme et le derme. Concentration L’augmentation de concentration du principe actif entraîne une augmentation d’activité mais de façon non proportionnelle. Occlusion L’occlusion augmente l’humidité locale, la surface par plissement de la couche cornée. Elle multiplie l’absorption par 10. Âge L’absorption est supérieure chez l’enfant et le sujet âgé. Chez l’enfant, le rapport surface/poids est élevé. Effet réservoir Il y a une accumulation des CS au niveau de la couche cornée. Ce phénomène existe pour tous les corticoïdes locaux, sauf l’hydrocortisone. Il est responsable d’un relargage progressif. |
Elles dépendent d’un diagnostic précis, de la force du CS à utiliser, de la durée présumée du traitement.
Type de l’affection
En pratique, c’est l’état de la peau à traiter qui détermine le choix : caractère exfoliant, ou humide.
La sélectivité du corticoïde intervient pour un effet anti-inflammatoire (choix d’un CS non fluoré), ou antiprolifératif (=fluorés). En cas de dermatose chronique, il faut débuter par le corticoïde le plus fort capable de contrôler les symptômes. On adapte ensuite la force du CS selon la réponse, ou aux poussées.
Surface
Une grande surface augmente les risques d’absorption et d’effets systémiques.
Siège
L’épaisseur de la couche cornée ne semble pas jouer dans la réponse thérapeutique.
Âge
La prescription diffère selon l’âge .
Surinfection
L’infection ne doit pas faire retarder un traitement par CS. Une antibiothérapie générale est préférable à une association CS-antibiotique topique. En cas de maladie cutanée avec colonisation bactérienne inapparente cliniquement (dermatite atopique), un traitement anti-infectieux préparatoire est discuté.
Le risque infectieux est augmenté par l’occlusion.
Il dépend de la nature et du siège des lésions.
La crème a des indications très larges. La pommade est utilisée pour des dermatoses sèches, hyperplasiques, kératosiques : son effet occlusif augmente l’hydratation et la pénétration. Le gel est utile pour les lésions suintantes.
La pommade est à éviter dans les plis. Le gel est d’emploi plus cosmétique. La lotion est adaptée aux régions pileuses. Le spray peut s’utiliser sur les muqueuses.
La dose à ne pas dépasser est de 30g/semaine de produit fini de classe 2, en entretien.
Une application par jour suffit en général avec arrêt progressif, soit par espacement des applications, en alternant le CS avec sa base éventuellement, soit en utilisant un CS de niveau inférieur, en se reportant à la classification. Certains prescripteurs utilisent deux applications par jour.
L’inefficacité progressive après plusieurs semaines de traitement sur des dermatoses chroniques doit faire arrêter les corticoïdes et reprendre le traitement après quelques jours par un autre corticoïde fort (un faible entraînant également ce phénomène mais avec une activité moindre). Il faut éventuellement rediscuter le diagnostic.
L’occlusion est à réserver aux lésions épaisses, résistantes, de surface limitée. C’est un traitement moins confortable, plus ou moins facile à appliquer.