Dossier clinique : 0136 - Auteur : JP. FOURNIER - CHU de Nice

Madame Anne G., 88 ans, est adressée aux urgences par l’infirmière de sa maison de retraite pour une "somnolence anormale" le 21 décembre 2006 à 10h35. Elle est habituellement relativement valide, et prend ses repas avec aide dans le réfectoire de l’établissement. Elle a des antécédents de démence type Alzheimer, d’hypertension artérielle, d’anémie normocytaire et de maladie de l’oreillette. Son traitement habituel associe donépézil (Aricept®), amlodipine (Amlor®), spironolactone, furosémide (Aldalix®), acétylsalicylate de lysine (Kardégic 75®), amiodarone (Cordarone®), et lorazépam (Témesta®). Elle a bénéficié d’un pontage aorto coronarien il y a une vingtaine d’années.
 
Sommaire du dossier 0136

Question 1
L’infirmière d‘accueil note une bradycardie à 40/min et une pression artérielle à 85 – 60 mm Hg. Elle a enregistré le tracé ci-joint qu’elle vous tend. Quelle anomalie clinique allez-vous faire rechercher chez Madame G. ? Justifiez votre réponse.
    Réponse :
    Hypothermie (2) :
    - onde en J d’Osborne (1) (visible en V5 et V6)
    - allongement du PR (1)
    - bradycardie (1)
    À confirmer par la prise de température rectale. Thermomètre tympanique peu fiable dans ce cas.

    Total des points de la question : 5
Question 2
Vous confirmez cette anomalie. Votre examen clinique révèle en outre un score de Glasgow estimé à 12, sans signe de localisation ou méningé. Il existe une pâleur cutanéo muqueuse, donnant un aspect cireux aux téguments. Le visage est bouffi. Les sourcils sont à peine visibles. La pilosité axillaire est quasi absente. L’abdomen est météorisé et sensible dans son ensemble. Elle répond lentement aux stimuli verbaux d’un grognement rauque. L’auscultation pulmonaire révèle des râles bronchique humides diffus. L’auscultation cardiaque ne retrouve que la bradycardie. Quel est votre diagnostic ? Justifiez.
    Réponse :
    Coma myxoedémateux (3) :
    altération de la conscience sans signe de localisation ou méningé (1)
    hypothermie (1)
    bradycardie (1)
    pâleur cutanéo muqueuse (1)
    visage bouffi (1)
    dépilation (1)
    dysphonie (1)
    constipation probable (1) (à vérifier auprès de la maison de retraite)
    prise d’amiodarone (1), survenue en hiver (1) chez une femme âgée (1)
    - rechercher une infiltration des masses musculaires (1), une prise de
    - poids récente (1) (à vérifier auprès de la maison de retraite), des cheveux fins, secs, et cassants (1)
    - rechercher une circonstance déclenchante (1), en particulier infectieuse, iatrogène (lorazépam ?), une exposition au froid (saison)

    Total des points de la question : 18
Question 3
Quels examens prévoyez-vous ? Justifiez votre prescription.
    Réponse :
    Confirmation de l’hypothyroïdie périphérique (amiodarone) (1) : TSH ultra-sensible (élevée) (1), élévation des CPK (1). L’hyponatrémie est fréquente et donc évocatrice ici ; elle est d’interprétation délicate compte tenu du traitement
    • cliché thoracique (1) : inhalation ? (1) troubles ventilatoires ? (1) cardiomégalie ? (1)
    • ionogramme sanguin (1), créatinine plasmatique (1), protidémie (1), glycémie (1), calcémie (1) : état d’hydratation (1), fonction rénale (1)
    • hémogramme – plaquettes (1) : anémie ? hyperleucocytose ? (1)
    • hémoculture (1), BU ± ECBU (1), PCT (1) : infection déclenchante ? (1)
    • TP – TCA – fibrine (1) : hémostase (1)
    • éventuellement : myoglobine : rhabdomyolyse ?

    Total des points de la question : 22
Question 4
Madame G. n’est pas admise en réanimation malgré votre demande pressante. Vous devez la prendre en charge dans l’unité de médecine polyvalente. Quel(s) traitement(s) allez-vous débuter ? (posologies non demandées)
    Réponse :
    • Idéalement en réanimation
    • opothérapie substitutive (2) : - T4 (L-Thyroxine®) ou T3 (Cynomel®) (1) par voie
    orale, sonde naso gastrique ou IV
    hémisuccinate d’hydrocortisone (1)
    • traitement symptomatique :
    sonde naso gastrique (+ contrôle radio) (1)
    O2 selon saturation (1)
    remplissage (1)
    réchauffement externe (1)
    • prévention des complications de décubitus (1) : HBPM si la fonction rénale le permet, sinon héparine non fractionnée (1)
    • protecteur gastrique (1)
    • arrêt du traitement personnel (1)
    • surveillance (1)

    Total des points de la question : 13
Question 5
Après 4 jours d’hospitalisation, sous l’effet de votre traitement, son état s’est transformé. Par contre, l’infirmière qui s’en occupe la trouve dyspnéique. Quelle(s) étiologie(s) discutez-vous a priori à l’origine de sa dyspnée ? (Énumérez sans commentaire)
    Réponse :
    • Embolie pulmonaire (1)
    • pneumopathie d’inhalation (1)
    • encombrement bronchique (1), atélectasie (1)
    • surcharge (1), décompensation cardiaque (1)
    • majoration de l’anémie (chercher un saignement digestif) (1)
    • sepsis (1) : point de départ veineux, urinaire, ou pulmonaire (1)

    Total des points de la question : 9
Question 6
L’hypothèse embolie pulmonaire vous paraît vraisemblable. Quel(s) examen(s) pouvez-vous planifier pour confirmer ou infirmer cette hypothèse ? Discutez pour chacun d’entre eux ses avantages et inconvénients.
    Réponse :
    • Tous les tests utilisables doivent être interprétés en fonction de la probabilité d’embolie pulmonaire estimée à partir de scores (2) : score de Wells ou Geneva (1) ; ces scores incluent entre autres des examens tels que gaz du sang, ECG, cliché thoracique. Une telle approche, initialement réservée aux patients ambulatoires, a été récemment validée chez les patients hospitalisés.
    • aucun examen n’est utilisable isolément (3)
    • D-dimères : par méthode ELISA (1). Facilement disponibles (1). Sensibilité conservée (100 p. cent), par contre très mauvaise spécificité (10 p. cent) : chez une patiente très âgée et hospitalisée (1) : les D-dimères ont peu de chance d’être inférieurs à 500 et donc de permettre d’éliminer le diagnostic (1). Malgré ce, s’ils l’étaient, le diagnostic serait éliminé (1)
    • angioscanner thoracique (3) : modérément invasif (1) (produit de contraste) : rentabilité surtout pour les embolies proximales (1) (< division de 3ème ordre). Positif si caillot(s) au moins segmentaire(s). Un caillot distal isolé ne suffit pas au diagnostic. C’est l’examen le plus décisionnel (1) : si positif : traiter (1) ; si négatif : arrêt des investigations (1). Si non réalisable ou non interprétable : autres
    examens (1) : échographie veineuse, angiographie pulmonaire,… • échographie veineuse (± doppler) : performances conservée chez le sujet âgé (1). Non invasif (1). Valeur que si positif (1) (défaut de compressibilité veineuse). Opérateur et matériel dépendant (1). Apport modéré (+ 0,9 p. cent) si TDM négatif (1)
    • angiographie pulmonaire (1) : très invasif (1). « Gold standard » (1), mais grande variabilité inter observateur pour les embolies distales (1). À réserver aux fortes présomption avec échec des autres tests. L’angio IRM est contre-indiquée par le pontage ancien (1)

    Total des points de la question : 29
Question 7
7- Vous avez opté pour la réalisation d’un angioscanner thoracique. La créatinine de Madame G. était à 150 µmol/l la veille. Quelle(s) précaution(s) devrez-vous prendre pour la réalisation de cet examen ? (posologies non demandées).
    Réponse :
    Hydratation (2) par sérum salé ou bicarbonaté isotonique encadrant la procédure (1) (attention au risque de surcharge)
    • N-acétyl cystéine la veille et le jour de la procédure (1)
    • les autres recommandations - limitation de la quantité de produit de contraste, utilisation de produits non ionisé, hypo ou iso osmolaire, limitation de la répétition des procédures, arrêt de tous les médicaments potentiellement néphrotoxiques (le diurétique a été arrêté à la question 4) ne s’appliquent pas ici ou dépendent du radiologue
    • la clairance est ici supérieure à 30 l/min et autorise donc la réalisation de l’examen, moyennant les précautions décrites.

    Total des points de la question : 4
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