Dossier clinique : 0103 - Auteur : C Pulcini - Faculté de médecine Nice

Mr L., 66 ans, se présente en urgence au cabinet de son généraliste pour fièvre et frissons apparus brutalement la veille au soir. L’interrogatoire ne trouve aucun signe fonctionnel associé. Il n’existe pas de notion de contage, ni de contact avec des animaux. On ne note pas de voyage récent à l’étranger. Cet ancien kinésithérapeute à la retraite présente comme principaux antécédents : un diabète de type 2 devenu insulino-requérant, un surpoids, et un remplacement aortique par une prothèse mécanique il y a 5 ans pour un rétrécissement aortique calcifié serré, associé à un pontage aorto-coronaire. Il n’a pas d’allergie connue. Son traitement comporte : Préviscan® (fluindione), Vasten® (pravastatine), Triatec® (ramipril), Mixtard® (mélange d’insulines rapide et intermédiaire).
 
Sommaire du dossier 0103

Question 1
Quels sont les principaux points de votre examen physique ?
    Réponse :
    - prise des constantes : température (2) (fièvre ?), pouls (2), tension artérielle (2) (signes de choc ?), fréquence respiratoire (1) , SaO2
    - recherche de signes de choc (2) : marbrures, obnubilation…
    - recherche d’un foyer infectieux (2) : auscultation cardiaque (2) à la recherche d’un souffle, signes d’insuffisance cardiaque, auscultation pulmonaire (1) à la recherche de râles, inspection du revêtement cutané, examen abdominal, examen du pharynx, toucher rectal (1) à la recherche d’une prostatite, recherche d’un syndrome méningé ; bandelette urinaire (1)
    - recherche de complications de la fièvre : signes de déshydratation, déséquilibre du diabète (glycémie capillaire (2))

    NB : la bandelette urinaire n’a malheureusement pas été réalisée chez ce patient.

    Total des points de la question : 18
Question 2
Le médecin généraliste préfère hospitaliser le patient. Justifiez cette décision.
    Réponse :
    2 raisons d’hospitaliser ce patient :
    - une formelle : déséquilibre du diabète (5)
    - de plus, patient porteur d’une prothèse valvulaire cardiaque (3) : nécessité de rechercher une infection bactérienne devant toute fièvre.

    Total des points de la question : 8
Question 3
Quels sont les premiers examens complémentaires que vous demandez dans le service hospitalier ?
    Réponse :
    - bilan biologique : NFS plaquettes (1), TP INR (1) TCA, ionogramme sanguin (1), glycémie (1), créatininémie (1), bilan hépatique (1) (ASAT, ALAT, phosphatases alcalines), CRP (1)
    - en urgence : hémocultures (5) , BU ± ECBU (3)
    - radiographie pulmonaire (2) de face debout

    Total des points de la question : 17
Question 4
Débutez-vous une antibiothérapie ? Justifiez votre réponse.
    Réponse :
    Non (2) , je ne débute pas d’antibiothérapie en urgence car :
    - je n’ai pas de diagnostic (3)
    - et le patient ne présente pas de signe de gravité (3) : pas de sepsis sévère / choc septique, pas de neutropénie, pas d’asplénie

    Total des points de la question : 8
Question 5
Quel est votre diagnostic ?
    Réponse :
    Prostatite (3) aiguë (1) bactériémique (1) à entérobactérie (2) (probablement E. coli)
    -
    - NB :
    - on aurait pu évoquer ce diagnostic au préalable devant une BU positive, et demander un examen direct de l’ECBU en urgence
    - l’absence de leucocyturie est classique (mais rare) chez le patient diabétique (et chez le neutropénique)
    - il ne s’agit pas d’une cystite ! la pyélonéphrite est très rare chez l’homme. Il faut toujours évoquer une prostatite devant une infection urinaire chez l’homme, car cela conditionne la durée de traitement. Un traitement de durée insuffisante prédispose à l’évolution vers une prostatite chronique, et donc à un risque de récidive majeur des épisodes infectieux.
    - La prostatite aiguë est une cause classique de fièvre nue chez l’homme.
    - Les facteurs favorisant l’apparition d’une prostatite chez ce patient étaient : probable adénome de prostate vu l’âge, diabète, et boissons en quantité insuffisante.

    Total des points de la question : 7
Question 6
Quels sont les principes de l’antibiothérapie ?
    Réponse :
    Antibiothérapie :
    - Urgente (1)
    - active sur les entérobactéries (1)
    - bactéricide (1)
    - à bonne diffusion intra prostatique (1) et à élimination urinaire sous forme active (1)
    - monothérapie (1) car pas de signe de gravité
    - céphalosporine de 3ème génération injectable IV (pas IM car AVK) : ceftriaxone ou céfotaxime (3)
    - ou fluoroquinolone (3) per os (1) (en l’absence de prise récente de ces molécules) : ofloxacine ou ciprofloxacine ou lévofloxacine
    - en l’absence de contre-indication
    - relais ensuite per os par fluoroquinolone ou cotrimoxazole en fonction de l’antibiogramme
    - durée prolongée 3 à 6 semaines (2)

    NB :
    - la prise récente de fluoroquinolones est un facteur de risque d’acquisition de résistance. Il vaut donc mieux éviter de donner des fluoroquinolones en probabiliste dans ces conditions.
    - Ne pas oublier le contrôle de l’ECBU 4-6 semaines après la fin de l’antibiothérapie.
    - Prévoir une consultation avec un urologue pour prendre en charge l’éventuel adénome.
    - Surveiller la diurèse et l’apparition d’un globe vésical.
    - On peut prescrire des alpha-bloquants.

    Total des points de la question : 15
Question 7
Quel est le mécanisme de résistance vis à vis des pénicillines ? Quelle en est la fréquence ?
    Réponse :
    Production d’enzyme (3) détruisant l’antibiotique ; il s’agit ici d’une pénicillinase (2) (l’acide clavulanique restaure l’activité, partiellement ou totalement selon le niveau de production de la bêtalactamase).
    - Fréquence élevée : 30-40% (2)
    -
    - NB : pas de cotrimoxazole ni d’amoxicilline ni d’amoxicilline – acide clavulanique en probabiliste devant une infection urinaire, car les fréquences de résistance dépassent largement les 20%.

    Total des points de la question : 7
Question 8
Quels points essentiels rappelez-vous au patient concernant la prévention des infections sur sa prothèse valvulaire ?
    Réponse :
    - consulter un médecin immédiatement en cas de fièvre (3) , ne pas s’automédiquer
    - traitement précoce de toutes les portes d’entrée infectieuses possibles : désinfection soigneuse des plaies cutanées (1), hygiène bucco-dentaire (2) et consultations dentaires régulières…
    - antibioprophylaxie (3) lors des gestes à risque de bactériémie
    - port d’une carte (3) de porteur de prothèse valvulaire, et carnet de suivi (gestes à risque de bactériémie + antibioprophylaxie prise)

    Total des points de la question : 12
Question 9
Quelle est l’explication la plus probable de ce déséquilibre ?
    Réponse :

    - interaction médicamenteuse (3) entre le Préviscan® et le traitement antibiotique (3) (fluoroquinolone) avec potentialisation (2) de l’AVK.
    -
    - NB : il aurait fallu prévenir le patient et réaliser des contrôles plus fréquents de l’INR.
    - La ceftriaxone peut également potentialiser un traitement AVK.

    Total des points de la question : 8
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