Dossier clinique : 0105 - Auteur : C Pulcini - Faculté de médecine Nice

Aude, 19 ans, est amenée aux Urgences le 11 octobre par sa mère pour fièvre et somnolence.
L’interrogatoire de la jeune patiente est impossible du fait d’une obnubilation majeure. La mère vous apprend que sa fille a séjourné au Burkina-Faso (zone 2) du 3 au 25 août dans le cadre d’un stage avec les scouts. Elle a pris l’association chloroquine-proguanil (Savarine®) 1 comprimé/jour du 2 août au 25 septembre. Ses vaccinations diphtérie-tétanos-poliomyélite, hépatite B, hépatite A, fièvre jaune et typhoïde étaient à jour. Aude n’a pas d’antécédents particuliers, prend la pilule et n’est pas allergique. Elle est étudiante à la faculté de lettres.
Depuis le 4 octobre, Aude présente une fièvre élevée (39 voire 40°C), avec une fatigue majeure et une absence d’appétit, associés à des maux de têtes intenses. Les signes ne disparaissant pas sous paracétamol, la patiente consulte son généraliste le 9 octobre. Celui-ci fait réaliser un bilan biologique qui montre :
- Hb 8,1 mmol/l, 4.109/l polynucléaires neutrophiles, 0,8.109/l lymphocytes, 76.109/l plaquettes
- VS 23 mm à la 1ère heure
- Na 138 mmol/l, K 4,1 mmol/l, créatininémie 65 µmol/l, ALAT 98 UI/l et ASAT 78 UI/l
- Frottis paludisme négatif
Le médecin poursuit donc le traitement symptomatique.

Votre examen clinique montre :
- température 39,7°C, pouls 100/mn régulier, tension artérielle 130/60 mm Hg, glycémie capillaire 5,2 mmol/l
- obnubilation marquée avec score de Glasgow à 11, pas de signe de localisation neurologique, pas de syndrome méningé
- splénomégalie, pas d’hépatomégalie, abdomen souple, dépressible et indolore
- examen cutanéo-muqueux sans particularité
- auscultation cardio-pulmonaire normale
- aires ganglionnaires libres
- bandelette urinaire : négative
 
Sommaire du dossier 0105

Question 1
Quelles sont vos 2 hypothèses diagnostiques principales ? justifiez les.
    Réponse :
    Paludisme (3) grave (2) ou méningoencéphalite (3).
    Paludisme grave :
    - argument de fréquence (1)
    - toute fièvre au retour d’une zone tropicale (2) est un paludisme jusqu’à preuve du contraire
    - incubation compatible (1) < 2 mois (1)
    - clinique : asthénie, anorexie, céphalées (1), splénomégalie (1)
    - paraclinique : thrombopénie (2), lymphopénie, cytolyse hépatique (1)
    - signes de gravité : troubles de conscience (1) avec score de Glasgow < 12
    - la chimioprophylaxie antipalustre a été correctement prise, mais elle ne protège pas à 100%
    - un frottis paludisme négatif n’élimine pas le diagnostic
    Méningoencéphalite devant la triade céphalées (1), fièvre (1) et troubles de conscience (1). L’absence de syndrome méningé est classique.
    Les autres diagnostics sont moins probables :
    - typhoïde : durée d’incubation trop longue > 15 jours, la vaccination protège à 60%
    - arbovirose : durée d’incubation trop longue > 15 jours
    - thrombophlébite cérébrale éventuellement possible (contraception orale chez une femme jeune)
    - pas d’argument pour une prise de toxiques

    Total des points de la question : 22
Question 2
Quelle est votre prise en charge diagnostique et thérapeutique immédiate ?
    Réponse :
    Au plan diagnostique :
    - rechercher un paludisme : frottis sanguin paludisme (3) en urgence
    - refaire un bilan biologique pour l’évolutivité et pour éliminer les causes métaboliques : ionogramme sanguin (1), glycémie (1), calcémie (1), créatininémie (1), transaminases (1), phosphatases alcalines (1), bilirubine (1), NFS plaquettes (1), TP TCA (1), CRP
    - hémocultures
    - si le frottis paludisme est négatif, faire une ponction lombaire (3) (en l’absence de troubles de la coagulation)
    Pas d’indication d’imagerie cérébrale en 1ère intention, car pas de signes de localisation neurologique.

    Au plan thérapeutique :
    - voie veineuse périphérique (1)
    - antipyrétique : paracétamol (1) IV (1)
    - assurer la liberté des voies aériennes, oxygénothérapie (1)
    - surveillance (2) continue : pouls, tension artérielle, conscience
    - transfert rapide médicalisé (1) en réanimation (2)

    Total des points de la question : 24
Question 3
Détaillez les principes du traitement spécifique (sans la surveillance).
    Réponse :
    Confirmation du diagnostic de paludisme grave.
    Hospitalisation en réanimation. Urgence (2) thérapeutique.
    Traitement antipalustre après un bilan pré thérapeutique (bêta HCG (1), électrocardiogramme (1)) :
    - quinine (3) par voie parentérale IV (2)
    - dose de charge (1) puis dose d’entretien
    - avec un apport de soluté glucosé (3)

    Total des points de la question : 13
Question 4
Quelles en sont les modalités de surveillance ?
    Réponse :
    Surveillance de l’efficacité :
    - clinique : température (1), conscience (1) , examen neurologique
    - paraclinique : parasitémie (1) , quininémie

    Surveillance de la tolérance :
    - clinique :
    - paraclinique : pouls (1), tension artérielle (1), glycémies (1), électrocardiogramme (1) ou scope, quininémie (1)

    Total des points de la question : 8
Question 5
Expliquez brièvement les mécanismes physiopathologiques à l’origine des anomalies du bilan hépatique
    Réponse :
    Cytolyse hépatique :

    multiplication (1) intra-hépatique (1) des sporozoïtes (1) qui conduit à la lyse cellulaire (1).

    Total des points de la question : 4
Question 6
Comment expliquez-vous que le 1er frottis était négatif ?
    Réponse :
    On peut formuler deux hypothèses :
    - faible parasitémie (3)
    - manque d’entraînement du biologiste (2) qui a lu la lame

    Un frottis paludisme négatif n’élimine donc pas le diagnostic. Il faut refaire un nouveau frottis, et on peut également utiliser d’autres techniques diagnostiques plus sensibles.

    Total des points de la question : 5
Question 7
Comment expliquez-vous que la patiente ait contracté un paludisme alors qu’elle a pris de la Savarine® ?
    Réponse :
    On peut faire deux hypothèses :
    - une chimioprophylaxie antipalustre adaptée (c’est le cas de la Savarine® en zone 2) et bien prise (le cas ici : veille du départ jusqu’à 4 semaines après le retour) ne protège pas du paludisme à 100% (3) , même en cas de souche plasmodiale sensible. Il est donc indispensable de bien se protéger des piqûres de moustiques.
    - la patiente peut avoir également été contaminée par une souche plasmodiale chloroquinorésistante (2)

    Total des points de la question : 5
Question 8
Citez les molécules qui vous pouvez lui proposer comme chimioprophylaxie antipalustre
    Réponse :
    Le Congo étant une zone 3, la Savarine® n’est de toute façon pas indiquée.
    On peut proposer au choix :
    - l’association atovaquone – proguanil (3) (Malarone®)
    - ou la méfloquine (3) (Lariam®)

    Les deux produits nécessitent une contraception efficace.

    Total des points de la question : 6
Question 9
Elle aimerait connaître la fréquence des rappels des vaccins hépatite B et typhoïde. Renseignez-la.
    Réponse :
    Hépatite B : pas de rappel (3) car la patiente a été vaccinée avant l’âge de 25 ans (1).
    Typhoïde : tous les 3 ans (3).

    Total des points de la question : 7
Question 10
Une de ses amies lui a conseillé de se faire vacciner contre la varicelle et la coqueluche. Certes, Aude ne se souvient pas d’avoir fait une varicelle, et sa vaccination coqueluche remonte à il y a 8 ans. Donnez-lui votre avis
    Réponse :
    Vaccin varicelle : pas d’indication (3) car la patiente n’exerce pas une profession à risque et n’est pas en contact a priori avec des personnes immunodéprimées.

    Vaccin coqueluche : indiqué dans 2 ans (3) , en association avec le rappel diphtérie-tétanos-poliomyélite.

    Total des points de la question : 6
Question 11
    Réponse :


    Total des points de la question :
↑ Remonter