Dossier clinique : 0007 - Auteur : - Faculté de médecine Nice

Monsieur D., 69 ans, est adressé aux urgences pour dyspnée aiguë. Il se sait hypertendu mais ne prend plus aucun traitement depuis des années. Son médecin lui a parlé d’ « insuffisance rénale » et lui a prescrit des examens qu’il n’a jamais réalisés. Il pèse 87 kg pour 165 cm, et a subi 3 interventions chirurgicales (diverticules coliques, 2 éventrations). Il se sentait essoufflé depuis quelques jours. Il a revu son médecin qui lui a fait pratiquer les examens que son épouse vous présente. La dyspnée s’est brutalement aggravée en pleine nuit. À l’entrée, il est très dyspnéique, et ne supporte pas le decubitus. Vous notez des râles crépitants bilatéraux, remontant au tiers supérieur du thorax. La TA est à 220-120 mm Hg. Il présente des œdèmes modérés des chevilles. Les résultats des analyses pratiquées il y a 48 heures sont les suivants : Na+ : 138 mmol/l, K+ : 5,6 mmol/l, Cl- : 102 mmol/l, CO2T : 14 mmol/l, protéines : 62 g/l, Ca++ : 2,03 mmol/l, urée : 32 mmol/l, créatinine : 556 µmol/l, GR : 3,26 1012/l, GB : 16,5 109/l, Hb : 5,6 mmol/l, Hte : 0,28 l/l, plaquettes : 223 109/l. L’ECG inscrit une tachycardie régulière à 120/min, avec une hypertrophie ventriculaire gauche systolique.
 
Sommaire du dossier 0007

Question 1
Quels traitements débutez-vous ? Quels en sont les éléments de surveillance, cliniques et para cliniques ? (neuf en tout)
    Réponse :

    • Voie veineuse [1], dosage de ionogramme sanguin, protidémie, créatinine, calcémie, glycémie, hémogramme, gazométrie artérielle [1], marqueurs d’insuffisance coronarienne (CPK massique ou myoglobine, troponine I) [1]
    • position demi assise, jambes pendantes hors du lit [1]
    • O2 au masque haute concentration [2], à débit suffisant pour obtenir une SpO2= 92 p. cent [1], CPAP ou VNI éventuellement [1]
    • diurétique de l’anse [2] à forte dose compte tenu de l’insuffisance rénale [1] : 125 à 250 mg du furosémide (Lasilix®) ou l’équivalent en bumétamide (Burinex®)
    • dérivés nitrés injectables [2] administrés en bolus IVD (par exemple Risordan® : 3 mg) ou/et à la seringue auto pousseuse (par exemple Risordan® : 3 à 6 mg/h en fonction de la TA)
    • garde veine [1], restriction hydrosodée [1]
    • héparine non fractionnée [1] à dose iso coagulante [1]. Les HBPM sont contre indiquées en raison de l’importance de l’insuffisance rénale [1]
    • surveillance [2] : - constantes vitales [1] - auscultation pulmonaire [1] - gazométrie artérielle [1] - ionogramme sanguin [1], glycémie, créatinine plasmatique [2]
    • dès qu’amélioration : transfert en USIC ou réanimation [1], médicalisé si transfert inter hospitalier.

    Total des points de la question : 28
Question 2
La troponine est à 0,6 ng/ml. Que pouvez-vous en conclure ?
    Réponse :

    Rien [1]. Il y a 2 raisons d’observer une élévation de la troponine I : poussée d’insuffisance cardiaque [1] et insuffisance rénale [1]. Rien ne permet de retenir (ou d’éliminer) une insuffisance coronarienne. Le dosage est à recontrôler ultérieurement [1]. L’insuffisance rénale modifie également les taux de BNP (l’obésité aussi, mais en sens inverse).

    Total des points de la question : 4
Question 3
Votre traitement permet de soulager rapidement Monsieur D. D’autres examens sont-ils nécessaires dans les heures qui suivent ? Si oui, lesquels ?
    Réponse :

    • Bilan cardio vasculaire :
    - échocardiographie avec doppler [1] : retentissement fonctionnel de l’HTA [1]
    - FO [1] : rétinopathie hypertensive ? [1]
    • Bilan rénal :
    - phosphorémie [1], uricémie [1]
    - bandelette urinaire [1] : leucocyturie, hématurie, protéinurie
    - ECBU [1]
    - Echographie [1] : détermination de la taille des reins [1], recherche de résidu post mictionnel [1] (si pas de sondage), taille et structure de la prostate [1]
    - dosage de PSA [1] si pas de sondage
    - recherche de dysglobulinémie monoclonale [1], systématique devant une insuffisance rénale après 50 ans [1].

    Total des points de la question : 15
Question 4
Le diagnostic d’insuffisance rénale chronique sévère (ANAES 2002) est finalement retenu. Quels sont les éléments du traitement symptomatique au long cours (posologies non demandées) ? (neuf en tout).
    Réponse :

    • 2 facteurs majeurs de progression de l’insuffisance rénale : TA = 130-80 mm Hg [1], et protéinurie = 0,5 g/24 h [1]
    • contrôle de l’HTA : IEC à posologie progressive [1], par paliers de 4 semaines [1], avec contrôle de la créatinine et de la kaliémie 1 à 2 semaines après modification posologique [1]. En cas d’intolérance (ex. toux) : passage aux AA2 [1]. Si TA < 130-80 : continuer avec surveillance [1]. En cas d’HTA non contrôlée : vérifier l’observance [1]. Si correcte : addition de furosémide ou bumétanide [1]. Si échec, addition de Ca bloquant ou ß blocant [1] et avis néphrologique [1]. Si protéinurie = 0,5g/24h : augmenter l’IEC à posologie maximale [1] ; si insuffisant, rajouter un AA2 [1]
    • traitement des facteurs de risque vasculaire [2]: obésité [1], éventuel tabagisme [1], éventuelle dyslipidémie [1], éventuelle hyperuricémie [1]
    • apport protidique : 0, 8 g/kg/24h [1], pour albuminémie = 35 g/l [1]
    • apport sodé : 6 g/24h [1] (plus si fuite urinaire [1]). Apports réduits de K+ pour kaliémie = 5,5 mmol/l [1], CO2T à maintenir entre 23 et 27 mmol/l [1]
    • contrôle de l’ostéodystrophie rénale [2] : apport de carbonate de calcium (Calcidia®) [1] qui a aussi un effet alcalinisant, de vitamine D (Unalpha®) [1], maintien d’une phosphorémie < 1,3 mmol/l [1]
    • anémie [1] : dépister et traiter toute carence [1], en particulier martiale. En cas d’anémie sévère ou persistante : érythropoïétine (Eprex®, NéoRécormon®) [1] pour maintenir une hémoglobine à 12 g/100ml [1]
    • éducation +++ [2] :
    - pas d’auto médication [1]
    - éviter tout traitement (ex. AINS) [1] ou procédure (ex. injection de produit de contraste iodé) [1] néphrotoxique [1]
    - éviter ou traiter précocement toute circonstance d’aggravation [1] : ex. déshydratation
    - adaptation posologique des médicaments à élimination rénale [1]
    • suivi régulier [1], fonction de l’importance de l’insuffisance rénale [1]

    Total des points de la question : 44
Question 5
Sous l’effet de ce traitement, l’évolution est favorable, permettant de stabiliser la créatinine à 360 µmol/l. Il est ré adressé aux urgences 6 mois plus tard pour aggravation de sa fonction rénale. Il présente un bilan réalisé la veille en clinique montrant une créatinine à 510 µmol/l. Il y avait été admis pour un syndrome abdominal douloureux avec diarrhées et vomissements, pour lequel avait été réalisé un scanner abdominal injecté. Il avait également reçu 3 jours d’antibiothérapie (amoxicilline – acide clavulanique + nétilmicine). Vous confirmez la dégradation de la fonction rénale. Vous discutez trois mécanismes possibles de cette dégradation ; quels sont-ils ?
    Réponse :

    Combinaison [2] de :
    • deshydratation [1] par diarrhées et vomissement
    • produit de contraste [1]
    • Aminoside (nétilmicine) [1]

    Total des points de la question : 5
Question 6
La créatinine est désormais stabilisée à 470 µmol/l (clairance calculée : 15 ml/min), et impose le recours à un traitement de suppléance à court terme. Quelle(s) nouvelle(s) mesure(s) devrez-vous proposer à Monsieur D. dans cette optique ? (deux en tout).
    Réponse :

    • Vaccination anti HBs [1] (si pas déjà fait)
    • épargner le capital veineux [1], mise en place d’une fistule artério veineuse [1]
    • hémodialyse [1]
    • la dialyse péritonéale est contre indiquée par les antécédents de chirurgie abdominale.

    Total des points de la question : 4
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