SCENARIO CLINIQUE
Un homme de 74 ans est hospitalisé en urgence en réanimation pour une hyperkaliémie sévère, découverte en ville à l’occasion d’un ionogramme plasmatique demandé par son médecin du fait d’une asthénie. Dans ses antécédents, on retrouve un diabète non insulinodépendant apparemment non compliqué traité par régime seul, et une hypertension artérielle (chiffres inconnus) traitée par un inhibiteur de l’enzyme de conversion (doses inconnues). Récemment est survenue une crise de goutte du gros orteil pour laquelle il a reçu de la colchicine. Ce médicament ayant entraîné une diarrhée profuse, il a été remplacé par un anti-inflammatoire non stéroïdien.
L’examen clinique est sans particularité (il n’existe notamment aucun signe d’insuffisance cardiaque, ni de signe clinique évident de déshydratation extracellulaire), en dehors d’une pression artérielle à 90/50 mmHg et d’une fréquence cardiaque à 110/min. Le malade n’urine pas et il n’a pas de globe vésical.
Les examens biologiques sanguins à l’entrée montrent : Na = 133 mmol/L, K = 8,3 mmol/L, Cl = 110 mmol/L, protéines = 68 g/L, urée = 47 mmol/L, créatinine = 370 µmol/L, pH artériel = 7,36, PaCO2 = 28 mmHg, bicarbonates = 15 mmol/L. Un ECG est pratiqué en urgence (Fig. 4).
Question 1
Décrivez l’ECG.
(Renvois au livre : Chapitre 16, p184 : Signes électrocardiographiques)

Question 2
Comment analysez-vous cette hyperkaliémie ?


Question 3
Quelles mesures thérapeutiques prenez-vous en urgence ? Justifiez-les.

Question 4
Après une heure, sous l’effet du traitement entrepris en urgence, la kaliémie est à 7,1 mmol/L et la durée des complexes QRS est de 80 ms. Quel traitement proposez-vous ?

EN SAVOIR PLUS

(Renvois au livre : Chapitre 21, p219-224 : Diagnostic étiologique)

Enquête étiologique initiale d’une IRénA.

Anamnèse : Recherche de prise de médicaments
Examen clinique :
Poids, état d’hydratation, pression artérielle, température, état lombo-abdomino-pelvien
Examens de laboratoire :
Composition de l’urine sur échantillon (natriurèse, osmolalité, protéinurie, hématurie, leucocyturie)
Rapport urine/plasma de l’urée, de l’osmolalité et de la créatinine
Rapport urée/créatinine plasmatique
Protéinurie des 24 heures
Numération-formule sanguine avec plaquettes
Protidémie
Haptoglobine, hémoglobinémie, LDH, recherche de schizocytes en cas de suspicion d’hémolyse
Créatine phosphokinase (CPK)
Acide lactique
Gaz du sang, trou anionique
Imagerie :
Échographie abdominale et rénale
Abdomen sans préparation
Échographie cardiaque si suspicion d’insuffisance cardiaque

Distinction entre une IRénA fonctionnelle et organique.

IRénA fonctionnelle IRénA organique
Natriurèse < 20 mmol/L
Non fiable si diurétiques
> 20 mmol/L
FeNa (U/PNa/U/Pcréatinine) < 1 % > 1 %
Osmolalité urinaire/osmolalité plasmatique > 1,5 1
Créatinine U/créatinine P > 40
(témoin de la réabsorption tubulaire)
< 20
Urée U/urée P > 8 < 3
Urée P/créatinine P > 100 50-70
(rhabdomyolyse < 50)
U = urinaire ; P = plasmatique ; Fe = fraction éliminée.
Principales causes des néphropathies tubulaires aiguës.

États de choc
Hémolyse aiguë intravasculaire : incompatibilité transfusionnelle, septicémie à C. perfringens, accès pernicieux palustre, toxines hémolysantes (chlorates, hydrogène arsenié)
Rhabdomyolyse
Coagulation intravasculaire disséminée
NTA micro-obstructives : syndrome de lyse tumorale aiguë, précipitation intratubulaire de médicaments (amoxicilline, aciclovir, acétazolamide, adiazine)
Produits néphrotoxiques : médicaments (AINS, dextrans, IEC, aminosides, cisplatine, vancomycine, ciclosporine, rifampicine, amphotéricine B, foscarnet), produits de contraste iodés, toxiques industriels (chlorure de mercure, plomb, tétrachlorure de carbone, ethylène glycol, méthanol)
Pancréatite aiguë hémorragique
Champignons (cortinaires)
Venins de serpent

Question 5
Huit heures après l’admission, la diurèse reprend. Le bilan sanguin montre : Na = 140 mmol/L, K = 5,9 mmol/L, Cl = 112 mmol/L, bicarbonates = 18 mmol/L, urée = 42 mmol/L, créatinine = 273 µmol/L. Le bilan urinaire montre : Na = 70 mmol/L, K = 30 mmol/L, urée = 236 mmol/L. Comment interprétez-vous l’insuffisance rénale ?