Sommaire

1 - Définition
2 - Etude clinique
3 - Dystocie d’engagement

 


 

1- Définition

C'est le premier temps de la traversée de la filière pelvienne.
C'est le franchissement du détroit supérieur par le plus grand diamètre de la présentation.
Une présentation est dite engagée lorsque sa plus grande circonférence a franchi le détroit supérieur.
Pour la présentation céphalique, il s'agit du plan passant par les 2 bosses pariétales.
L'engagement résulte du mouvement imprimé à la présentation, appuyée sur l'arc pubien, par une force de glissement, composante efficace de la poussée utérine.
L'essentiel est la concordance des axes de poussée utérine et de franchissement du détroit supérieur.
L'accommodation de la tête fœtale au détroit supérieur se fait dans le même temps, grâce à son orientation en oblique et à sa flexion.

Concordance des axes

L'axe de la poussée utérine est incliné vers l'avant par rapport à l'axe du détroit supérieur qu'il croise sous un angle de 30 à 50°.
La force engendrée par la poussée utérine va donc appliquer la présentation fœtale contre la symphyse pubienne. L'axe de la poussée utérine est modifiée par l'antéversion et par la latéroposition de l'utérus.

L'axe de franchissement du détroit supérieur peut être modifié par l'hyperlordose lombaire maternelle.

Mécanisme général de l'engagement

La non-concordance des axes de poussée utérine et du détroit supérieur explique que l'engagement exige du mobile fœtal des mouvements compliqués.
Les dimensions du détroit supérieur les plus utilisables sont les diamètres obliques, le sommet doit orienter en oblique ses diamètres prédominants.

Les dimensions de la tête fœtale les plus favorables à l'engagement étant le sous-occipito-bregmatique et le bipariétal, le sommet doit se fléchir.

L'axe du détroit supérieur étant oblique en arrière et en bas (ligne ombilico-coccygienne) le sommet doit cheminer dans cette direction pour pénétrer dans la filière pelvienne.

L'accommodation de la tête fœtale au détroit supérieur comprend 4 opérations :

Ces 4 opérations sont réalisées simultanément, elles ne sont pas toutes obligatoires : l'asynclitisme et les déformations plastiques sont facultatifs.

Flexion céphalique

Avant l'engagement, la tête fœtale reste mobile au-dessus du détroit supérieur en position oblique gauche ou droite et en attitude indifférente (ni fléchie, ni défléchie).
Cependant un certain degré de flexion est l'attitude normale du fœtus "tassé" à l'intérieur de la cavité utérine.

Loi de PAJOT énoncée par PINARD :

"Quant un corps solide est contenu dans un autre, si le contenant est le siège d'alternatives de mouvement et de repos, si les surfaces sont glissantes et peu anguleuses, le contenu tendra sans cesse à accommoder sa forme et ses dimensions aux formes et à la capacité du contenant".

L'utérus est plus large en haut qu'en bas : le siège et les membres inférieurs du fœtus vont se placer en haut et la tête en bas, elle se fléchira pour occuper un minimum d'espace.
La flexion complémentaire à l'engagement peut s'expliquer par 2 théories :

Théorie des leviers

La force de propulsion des contractions utérines est transmise à la tête fœtale par l'articulation atloïdo-occipitale. Sur une tête modérément fléchie : cette articulation occupe une position excentrique ; elle est à peu près 2 fois plus éloignée du front que de l'occiput. On peut alors assimiler la tête à une balance à 2 bras asymétriques, le plus long côté est situé vers le front du fœtus. La tête en prenant contact avec le détroit supérieur subit les réactions que lui offre la résistance passive des surfaces osseuses. Le bras frontal plus long est plus sensible aux contre-pressions que le bras occipital. Les contre-pressions agissent sur le bras frontal et vont fléchir la tête.

Théorie de JARROUSE

Dans la variété de position OIGA la poussée utérine appuie l'occiput fœtal sur l'arc antérieur du bassin. Il en résulte une force qui aura tendance à fléchir la tête et qui sera freinée par les frottements de l'occiput sur l'arc antérieur du bassin.

Cas particuliers de l'engagement des variétés postérieures

Le type décrit sera l'OIDP.
L'orientation met l'occiput en arrière en regard du sinus sacro-iliaque droit, l'occiput est au large, tandis que le front a une courbure qui s'adapte moins bien que celle de l'occiput à l'arc antérieur du bassin avec lequel il prend contact.
La flexion habituelle du fœtus in-utero est moins importante dans les variétés postérieures : en effet le dos fœtal est en regard du rachis maternel et la convexité de celui-ci tend à défléchir la tête fœtale.
De plus la flexion complémentaire contemporaine de l'engagement est moins bonne. L'occiput descend dans le sinus sacro-iliaque où il ne rencontre pas de point d'appui : la tête a tendance à se défléchir. Mais le front fœtal butant contre la symphyse pubienne en avant, la tête fœtale va cependant se fléchir. Le contact du front avec l'arc antérieur du bassin s'effectuant lorsque la tête est descendue dans son ensemble, on aboutit à une flexion de la tête fœtale plus tardive et moins complète que dans les variétés antérieures.

MERGER : "Flexion imparfaite, et partant, présentation de diamètres plus grands, voilà le caractère essentiel des occipito-postérieures".

Orientation en oblique

Rappel : définition des présentations (tableau 1)

Tableau 1 : définition des présentations

La présentation est la partie du fœtus qui prend contact avec le DS, s'y engage (ou tend à s'y engager) et évolue dans l'excavation pelvienne selon un mécanisme qui lui est propre jusqu'à l'expulsion du fœtus

Présentations

longitudinales :
- tête :
* sommet
* face
* front
* bregma

- siège :
* complet
* décomplété
* semi-décomplété

transversale :
- épaule

Repères



occiput (lambda)
menton
nez
bregma


sacrum
sacrum
sacrum


acromion

On appelle position, l'orientation à gauche ou à droite (relativement à la mère) du dos du fœtus.
Les variétés de position sont déterminées par la situation du repère de la présentation par rapport au bassin maternel (pour le sommet dont le repère est l'occiput : OP, OIGA, OIGT, OIGP, OS, OIDP, OIDT et OIDA).

L'orientation directe de la tête fœtale en antérieure (OP) ou en postérieure (OS) est impossible au moment de l'engagement du fait de la saillie du promontoire.
Ainsi la tête fléchie va faire correspondre ses deux plus grands diamètres avec les deux plus grands diamètres du détroit supérieur qui sont les diamètres obliques.
On va donc observer 4 variétés principales de position d'engagement :

Et 2 variétés accessoires :

OIGT
OIDT

On constate une nette prédominance des positions gauches explicables par la dextro-position physiologique de l'utérus gravide et par la dimension légèrement supérieure (quelques millimètres) du diamètre oblique gauche par rapport au diamètre oblique droit.

Asynclistisme

Du grec klinein : incliner

L'asynclitisme est le degré d'inclinaison latérale de la tête fœtale par rapport au plan du détroit supérieur. Le repère est la suture longitudinale de la tête fœtale.
Si la suture se projette dans l'axe du détroit supérieur :

la présentation est dite synclite.

Si la suture est déplacée latéralement par rapport à cet axe, elle est asynclite. L'asynclitisme est antérieur (rare) si la suture longitudinale est proche du sacrum ;

il est postérieur (le plus souvent) si la suture longitudinale est proche du pubis.

Pour RHENTER et pour MERGER (4), l'engagement se fait habituellement en synclitisme dans les bassins normaux, l'asynclitisme n'est nécessaire qu'en cas de disproportion fœto-pelvienne.
Pour VARNIER (1) et pour LACOMME (3), la non-concordance des axes utéro-pelviens amène la présentation au contact de l'arc antérieur qui va retenir quelque peu le pariétal antérieur tandis que le pariétal postérieur plonge dans le vide, d'où un certain degré d'asynclitisme postérieur même dans les bassins normaux.

Déformations plastiques

Elles sont variables selon la malléabilité des os, la partie qui se présente et les nécessités.

En présentation du sommet, la voûte se déforme facilement. On observe une augmentation de sa longueur et une réduction de ses 2 grandes dimensions (le bipariétal et le sous-occipito-bregmatique). Ceci explique le crâne en "pain de sucre" des nouveau-nés.
Pour les présentations céphaliques en variété de présentation postérieure la déformation du crâne est plus accentuée. Le chevauchement des pariétaux est considérable. La tête se trouve allongée verticalement de bas en haut.

Engagement proprement dit

Grâce à ces phénomènes préparatoires, l'engagement devient aisé. Les dimensions de l'ovoïde céphalique fœtal étant parfaitement acceptées par l'aire d'engagement.
La direction du mouvement est l'axe d'engagement (perpendiculaire à l'aire d'engagement) qui suit sensiblement la ligne ombilico-coccygienne.

La force mise en jeu pour provoquer l'engagement est la même qui a permis la flexion de la tête fœtale. Le sommet fléchi est appliqué sur la margelle du bassin.

La poussée utérine (P) peut alors être décomposée en 2 forces perpendiculaires (2) :

A l'extrême, si le bassin est très antéversé (hyperlordose) la composante (G) peut devenir nulle et l'engagement sera impossible par le seul jeu de la poussée utérine.

Importance de la nutation

La flexion des cuisses sur le bassin (le sacrum restant fixe) entraîne la mobilisation de l'os coxal par mise en tension des adducteurs : c'est la nutation.

La symphyse pubienne va se déplacer en arrière et en haut. La distance qui sépare la promontoire du pubis diminue mais le plan du détroit supérieur se rapproche de la verticale et l'axe du détroit supérieur s'incline vers l'horizontale. L'angle entre l'axe du détroit supérieur et l'axe de la poussée utérine diminue.

Donc la nutation tend à faire coïncider l'axe de la poussée utérine et l'axe du détroit supérieur que le fœtus doit emprunter pour pénétrer dans la filière pelvienne.
La nutation améliore la flexion du sommet en favorisant la coïncidence entres les axes de la poussée utérine et du détroit supérieur. La flexion une fois réalisée, la nutation, par le même mécanisme, va faciliter l'engagement proprement dit. Enfin, la nutation en augmentant le volume du cylindre d'engagement va agrandir l'espace disponible pour le pariétal postérieur et favoriser le phénomène de l'asynclitisme.
Lors du mouvement de nutation, le sacrum tourne autour de l'axe constitué par la tubérosité ischiatique, de telle sorte que le promontoire se déplace en avant et en bas et que la pointe du sacrum avec le coccyx se déplace en arrière.
La nutation est obtenue par la flexion des cuisses sur le bassin. Si le sacrum reste fixe, les adducteurs entraînent la mobilisation des os coxaux et la symphyse pubienne se déplace en arrière et en haut.
Lors du mouvement de contre-nutation, le sacrum tourne autour de l'axe constitué par la tubérosité ischiatique, de telle sorte que le promontoire se déplace en arrière et en haut et que la pointe du sacrum avec le coccyx se déplace en avant.
La contrenutation est obtenue par l'extension des cuisses sur le bassin. Si le sacrum reste fixe, les abducteurs entraînent la mobilisation des os coxaux et la symphyse pubienne se déplace en avant et en bas.

 

2 - Etude clinique

Une tête est dite engagée quand sa plus grande circonférence (plan passant par les bosses pariétales) a franchi le plan du détroit supérieur, se trouvant alors au-dessous du diamètre promonto-rétropubien et par conséquent dans l'excavation pelvienne.
La notion d'engagement est fondamentale, car de son existence dépend, le plus souvent la possibilité d'un accouchement par les voies naturelles.
Contrairement aux données classiques, l'engagement ne précède pas toujours le travail chez la primipare.


Avant d'envisager l'engagement, on retiendra les notions de :

La descente de la tête fœtale se fait dans l'excavation pelvienne qui peut être assimilée à un cylindre (cylindre de descente de HODGE) limité, en haut par le diamètre promonto-rétropubien ou premier parallèle de HODGE et en bas par le deuxième parallèle de HODGE qui passe par le bord inférieur de la symphyse pubienne.

L'engagement est effectif quand le sommet dépasse le deuxième parallèle de HODGE.

L'engagement est diagnostiqué grâce à l'interrogatoire, à l'inspection, à la palpation abdominale et au toucher vaginal.

Interrogatoire

La femme respire plus librement mais par contre la gène s'accentue du côté des organes pelviens.

Inspection

La hauteur utérine est réduite de quelques centimètres

Palpation abdominale

FAVRE se fondant sur le palper de l'épaule décrit par PINARD, a démontré l'intérêt de la mesure de la distance qui sépare l'épaule du bord supérieur du pubis.
FAVRE : “la distance qui sépare l'épaule du diamètre bipariétal dans une tête moyennement fléchie, est de 7 cm. Quand la hauteur de l'épaule (par rapport au bord supérieur du pubis) est de plus de 7 cm, la tête n'est pas engagée. Quand elle est de moins de 7 cm, l'engagement est fait”.

Ce signe, que nous retiendrons sous le nom de signe de FAVRE, est un des meilleurs signes d'engagement, c'est celui qui emporte la conviction quand une bosse séro-sanguine fausse les résultats du toucher vaginal.
N.B. : Le palper du pôle inférieur de l'utérus apprécie le volume de la tête fœtale et se situation par rapport au détroit supérieur. Il est fréquent chez la multipare que la tête ne soit pas située dans l'axe du détroit supérieur, mais un peu excentrée en direction d'une fosse iliaque : on dit que la présentation est mobile. Si la tête est dans l'axe médian, mais aisément mobilisable par une pression douce des deux mains guides, on dit qu'elle est mobilisable. Et enfin, si la tête ne peut être mobilisée latéralement, elle est dite fixée.

Toucher vaginal

Signe de FARABEUF (1) : quand la tête est engagée, 2 doigts trouvent place entre le pôle fœtal descendant et le plan sacro-coccygien.

Signe de DEMELIN : “Introduisons dans le vagin l'index dirigé perpendiculairement à la face antérieure de la symphyse pubienne et au ras de son bord inférieur ; il occupera le deuxième parallèle de HODGE. Le doigt ainsi poussé dans le vagin, passe-t-il au-dessous de la tête (ou de la présentation quelle qu'elle soit) ? C'est que l'engagement est nul ou peu avancé (tête qui pointe, qui s'amorce,…).
Le doigt dirigé suivant le deuxième parallèle affleure-t-il le point déclive de la présentation ? C'est que la grande circonférence de celle-ci est au voisinage et encore un peu au-dessus du détroit supérieur.
Enfin, le doigt (toujours dans le deuxième parallèle) bute-t-il contre la présentation qui arrête sa pulpe ? C'est que l'engagement est avancé, c'est que la grande circonférence de cette présentation a franchi le détroit supérieur.”

On peut aussi déterminer la position de la présentation par rapport au plan passant par les épines sciatiques. Lorsque le sommet atteint le niveau des épines, la tête fœtale est engagée, on dit qu'elle se trouve au niveau 0.

Si la présentation se trouve 1, 2, 3, 4 ou 5 cm au-dessus du niveau des épines, on dit qu'elle se situe au niveau -1, -2, -3, -4 ou -5. Lorsque la présentation est à plus de 5 cm des épines, le fœtus est "mobile", c'est-à-dire qu'aucune partie fœtale n'est vraiment eu contact avec le détroit supérieur.
Lorsque la présentation est descendue sous le plan des épines, on dit que le niveau est +1, +2, +3, +4 ou +5. Lorsque la présentation est au niveau +5, la tête fœtale est sur le périnée et à ce niveau le fœtus commence à distendre la vulve et devient visible.

 

3 - Dystocie d’engagement

L’absence d’engagement de la présentation dans le détroit supérieur, la dilatation cervicale étant complète, définit la dystocie d’engagement (5, 6, 7, 8).
Cette pathologie est rare : environ 1 % des accouchements en présentation céphalique.

Les étiologies de la dystocie d’engagement, sans obstacle osseux évident, sont multiples et souvent intriquées :

Toutes ces étiologies peuvent se résumer à 2 causes : la non-concordance entre l’axe de poussée utérine et l’axe du détroit supérieur et les mauvaises flexions de la tête foetale.

Nous nous sommes tout particulièrement intéressés à l’étude de l’hyperlordose lombaire (9) : 42 primipares, ont eu dans le post-partum immédiat et avec leur consentement, 2 radiographies de la colonne lombo-sacrée de profil, une en position debout et une en position couchée.
22 ont accouché spontanément (groupe témoin) et 20 ont présenté une dystocie d’engagement nécessitant l’emploi de la ventouse obstétricale afin d’engager la présentation (groupe “ventouse”).

2 mesures de la lordose lombaire semblent importantes :

L’amplitude du dièdre lombo-sacré a varié de la position debout à la position couchée de 14,13° à 11,31° dans le groupe témoin.
L’amplitude du dièdre lombo-sacré a varié de la position debout à la position couchée de 13,15° à 15° dans le groupe ventouse.
La différence était significative entre les 2 groupes en position couchée.

L’angle sacré a varié de la position debout à la position couchée de 37,04° à 34,72° dans le groupe témoin.
L’angle sacré a varié de la position debout à la position couchée de 31,1° à 34,95° dans le groupe ventouses.
La différence était significative entre les 2 groupes en position debout.

Le groupe témoin a présenté une hyperlordose qui a été améliorée par le passage de la position debout à la position couchée, ceci a été montré par la diminution du dièdre lombo-sacré et de l’angle sacré.

Le groupe ventouse a présenté une hyperlordose qui a été aggravée par le passage de la position debout à la position couchée, ceci a été montré par l’augmentation du dièdre lombo-sacré et de l’angle sacré.

Ces parturientes pourraient accoucher spontanément en position debout ou en position dite “de relaxation” obtenue grâce à des coussins ou à certains sièges spéciaux.