1 - Méthodes de mesure de la dilatation du col
2 - Description clinique
3 - Mécanisme de la dilatation
4 - Régulation de la dilatation
5 - Conclusion
La dilatation du col est l'aboutissement de la grossesse et son aspect le plus
visible a lieu pendant le travail de l'accouchement.
L'accouchement met en présence :
Le principal obstacle à l'accouchement est le col, organe spécifique
de l'espèce humaine.
Pendant la grossesse et pendant l'accouchement des interactions constantes se
produisent entre les phénomènes de maturation qui précèdent habituellement les phénomènes
de dilatation, et la dilatation provoquée essentiellement par l'action
des CU sur un col normal, par l'intermédiaire du Segment Inférieur
(courroie de transmission entre la contraction utérine et le col utérin)
et du mobile fœtal.
1 - Méthodes de mesure de la dilatation du col
Mesure clinique
En pratique quotidienne LA MESURE EST ESSENTIELLEMENT CLINIQUE.
Exprimée habituellement en centimètre, la précision de
la mesure est peu importante.
Des planchettes percées de trous calibrés (De 1 à 10 cm)
permettent d'améliorer la précision clinique et constituent un
bon instrument pédagogique.
La mesure digitale peut être effectuée, par voie rectale (KRŒNIG)
dans le but d'éviter l'infection Cependant, la voie vaginale semble plus
facile si les précautions répétées sont prises pour
éviter le risque d'infection (MANNING), cette voie est d'ailleurs préférée
par les femmes et est plus précise.
Pour être appréciée efficacement la dilatation doit être
reportée sur une courbe appelée partogramme.
Si sur le plan clinique l'appréciation digitale de la dilatation est
largement suffisante, quand on compare une mesure, à l'autre des écarts
extrêmement important d'un observateur à l'autre (variation inter-observateurs)
ont été observés (TUFFNELL) : la variation intra-observateur
peut aussi atteindre pratiquement un à deux centimètres.
Mesure paraclinique
Une revue de la littérature très importante a été effectuée par VAN DESSEL.
Trois types d'instruments ont été utilisés :
Cervicotomètre mécaniques ou électromécaniques
Le cervicotomètre mécaniques : celui de FRIEDMAN utilise un clamp
bull-dog fixé sur le col et relié à une pince ou un calibreur
la précision est de l'ordre de 0,5 mm mais l'enregistrement est discontinu
et difficile à effectuer.
Plus tard, les cervicomètres furent électromécaniques,
le principe de base est à peu près le même, les pinces ou
les clamps sont fixés sur le col et reliés à des potentiomètres
qui traduisent la dilatation sous forme de courbe. Enfin, certains cervicomètres
consistent en des fils reliés à des agrafes attachées sur
le col. Les changement de la dilatation provoque un changement dans la longueur
des fils qui sont transmis à un enregistreur par des systèmes
mécaniques ou électriques.
Cervicomètres électromagnétiques
Décrit par WOLF, ils consistent en deux bobines d'inductions attachées sur les berges cervicales, un courant électrique appliqué à une des bobines crée un champs magnétique qui est détecté dans la bobine opposée et enregistré. Il ne me semble pas qu'il y ait eu des études très prononcées avec ce système.
Cervicomètre ultrasonique
On a visualiser la dilatation du col par voie périnéale (LEWIN).
Par la suite, la voie vaginale a permis de mesurer la dilatation de l'orifice
externe et de l'orifice interne au cours de la grossesse et puis au cours de
l'accouchement. Cependant, ces méthodes n'ont pas été appliquées
de manière systématique pendant le travail.
La plupart des mesures ont été effectuées par la méthode
directe : deux capteurs à ultrasons sont attachés de part et d'autre
des lèvres du col, la distance séparant les deux est mesurée
de manière électronique.
Les problèmes pratiques sont importants : les capteurs se déplacent
au cours de la dilatation et le signal émis par l'un est alors perdu
par l'autre. L'autre problème essentiel est la fixation du capteur, sur
le col, l'on est obligé de le visser pour qu'il tienne bien.
Ces techniques n'ont jamais été utilisées en routine mais
ont fait l'objet d'un certains nombre de travaux dégageant la relation
entre la pression intra-utérine et la dilatation (ZADOR, KOK, LEWIN,
MOSS).
Effacement
L'effacement du col est le phénomène le plus facile à observer
chez la primipare. Le col se raccourci tout d'abord, alors que l'orifice interne
et l'orifice externe restent fermés puis il s'efface totalement. Cet
effacement peut se
produire en fin de grossesse ; il fait passer le col d'une longueur de 30 à
43 mm à une longueur de l'ordre de 5 mm ou moins.
Ce phénomène est concomitant à celui de la maturation et
les deux phases : effacement et dilatation sont souvent télescopés,
en particulier chez la multipare.
L'effacement du col est lié, en fait, à l'incorporation de l'orifice
interne à la partie inférieur du segment inférieur.
Quand l'effacement est terminé, la dilatation peut commencer.
Dilatation
Elle succède à l'effacement et peut lui être parallèle
en particulier chez la multipare.
La première phase est assez longue, elle coïncide, habituellement,
avec le début du travail (plus de 2 contractions utérines pour
10 min), mais parfois le précède.
Les mesures manuelles (FRIEDMAN) ou électromécanique ou ultrasonique
ont permis de mieux précises l'allure de cette courbe de dilatation.
La courbe de FRIEDMAN fait actuellement autorité bien qu'elle soit encore
discutée dans la totalité de son aspect. La courbe de dilatation
revêt une allure sinusoïde avec une première phase de latence jusqu'à,
environ, 2 à 3 cm. Cette phase de latence est la plus longue, lui succède
une phase active beaucoup plus rapide où la vitesse de dilatation du
col se situe au maximum à 3 cm à l'heure puis une phase de décélération
au delà de 8 cm, précédent la période d'expulsion.
Le tableau 1 reproduit les chiffres que FRIEDMAN a publié en 1969, affiné en 1978 puis en 1987 et la figure 1 montre l'allure de cette courbe de dilatation chez la primipare et chez la multipare. Cette courbe de dilatation est un repère important pour évaluer l'allure clinique du travail. Ce guide a été codifié dans les travaux de O’DRISCOLL. On peut retenir que la dilatation est de l'ordre de 1,5 cm à l'heure et plus dans la phase active et qu'elle ne doit pas descendre en dessous de 1 cm/heure chez la primipare et en dessous de 1,5 cm chez la multipare.
Tableau 1 : chiffres de FRIEDMAN
Nullipare |
Multipare |
|
phase
de latence (heure) |
8,6
± 0,27 |
5,3
± 0,19 |
phase
active (heure) |
4,9
± 0,13 |
2,2
± 0,07 |
phase
de décélération (heure) |
0,90
± 0,33 |
0,23
± 0,01 |
premiere
phase (heure) |
13,5
± 0,33 |
7,5
± 0,24 |
deuxième
phase (heure) |
0,95
± 0,04 |
0,24
± 0,01 |
durée
totale du travail |
14,5
± 0,31 |
7,7
± 0,23 |
vitesse
de dilatation : cm /h phase de pente maximum |
3,0
± 0,08 cm/h minimum : 1,2 cm/h |
5,7
± 0,16 cm/h minimum : 1,5 cm/h |
La courbe de FRIEDMAN est cependant
discutée, en particulier dans sa dernière partie. Le ralentissement
pourraient être un artéfact liés au mode de présentation
et en particulier aux présentations postérieures : pour HENDRICKS
si cette phase décélération existe, c'est qu'il y a une
anomalie du travail. La dilatation du col commence d'ailleurs dans les quatre
dernières semaines de la grossesse, augmentant progressivement de 1 cm
à plus de 2 cm, trois jours avant le travail. Il y a peu de différence
entre la primipare (1,8 cm) et la multipare (2,2 cm). L'effacement du col est
progressif aussi pendant les quinze dernières semaines sans que cela
veuille dire qu'il y a risque d'accouchement prématuré. A cette
dilatation de fin de grossesse succède une dilatation de pré-travail,
tout à fait au début du travail 2,5m chez la nullipare et 3,5
cm chez la multipare, puis la courbe décrite par HENDRICKS rejoint celle
de FRIEDMAN.
Enfin chez la multipare comme chez la nullipare la dilatation est à peu
près aussi rapide au delà de 4 cm.
Sur le plan pratique il faut retenir l'importance du diagramme de dilatation (partogramme) dans la surveillance du travail. Beaucoup de programmes de surveillance du travail informatisé en permettent la réalisation automatique, facilitant ainsi la surveillance en faisant référence constante à la courbe de FRIEDMAN. Dans la technique d'accouchement dirigé (augmented labor) prônée systématiquement par O'DRISCOLL, le partogramme est assimilé à une droite. La vitesse de dilatation doit toujours être supérieure à 1 cm/h chez la nullipare et 1,5 cm/h chez la multipare. Dans le cas contraire une correction doit être appliquée.
3 - Mécanisme de la dilatation
Facteurs intervenants
Contraction utérine : le moteur
Les contractions utérines ont trois effets :
LINDGREN (1973), a montré que la dilatation du col ne débutait que si les contraction avaient une intensité supérieure à 30 mm de Hg et si leur fréquence dépassait 11 à 12 par heure. La progression du travail normale est la meilleure, lorsque la fréquence se situe entre 21,3 et 23,5, contractions normales par heure avant rupture des membranes chez la primipare et entre 20,9 et 22,8 contractions par heure après rupture des membranes.
La relation directe entre la contraction utérine et la dilatation du col a bien été montrée par les cervicométries :
Cependant dans certains cas (LEWIN), le col semble montrer une rétraction au moment de la contraction utérine.
L'enregistrement polygraphique, par cervicométrie comparé à la pression intrautérine effectué par EIJSKOOT montre bien la relation : contraction et dilatation.
Col : l’obstacle
2 propriétés sont importantes :
Mobile fœtal
Il joue avec la poche des eaux un rôle important par une sollicitation directe de l'orifice interne du col. Ce rôle est encore plus important après rupture des membranes où seul l'appui direct de la présentation sur le col provoque la dilatation. D'où la perturbation de la dilatation en cas de présentation du siège (surtout complet), de présentation postérieure persistante, de face ou de front.
Théories explicatives
Théorie mécanique
Le col est un organe passif : la dilatation résulte de tractions internes exercées sur les bords de l'orifice cervical et transmises par le segment inférieur. Le processus essentiel est l'augmentation de la pression intra-utérine. Quand les membranes sont intactes, le volume ovulaire est constant, les contractions distendent d'abord le segment inférieur puis agissent aux endroits de moindre résistance : l'orifice interne du col. Elles finissent par vaincre la résistance de cet orifice interne, le col s'efface, s'incorpore au segment inférieur, la transmission peut se faire directement à l'orifice externe qui se dilate.
Quand les membranes sont rompues, le volume amniotique diminue : il y a rétraction du myomètre, les contractions deviennent plus efficaces. Ceci explique l'amélioration du col après les ruptures des membranes. La présentation joue le rôle du coin dilatateur à qui s'opposent la résistance et l'élasticité du col. La rupture des membranes, en l'absence de présentation, crée des conditions défavorables car l'élément mécanique manque alors.
Cette théorie est intéressante. Elle repose sur des fondements certains, en particulier, des prises de pression locale et la relation étroite démontrée par la cervicométrie entre pression intra-utérine et dilatation du col, l'importance du facteur mécanique dans la dilatation et en particulier celui du mobile foetal, meilleure dilatation quand le mobile est harmonieux (présentation antérieure) que quand le col est moins bien sollicité (présentation postérieure, présentation autre que sommet, siège).
Cela n'explique cependant pas les phénomènes observés en clinique tel le "spasme du col", ou les contractions enregistrées simultanément au niveau du col et du corps observé lors de prise de pression par capteurs multiples.
Théorie de la contraction harmonieuse
Développée par CALDEYRO-BARCIA en 1966.
La contraction utérine normale est l'objet d'une double coordination : harmonie contractile entre les deux parties droite et gauche de l'utérus (qui traduisent l'ancienne fusion des deux corps utérin) et les territoires moyens et inférieurs. Il y aurait un véritable stimulateur utérin. Actuellement, cette théorie n'a plus cours car elle n'a pu être démontrée et la présence de nœuds stimulateurs n'est plus retenue.
Cependant, cette théorie met bien en évidence la réalité d'une prédominance de la contraction du fond utérin sur la contraction du segment inférieur du col et la nécessité d'une topographie de contraction suffisamment étendue pour vaincre les résistance du col. MISRAHI en 1977 a bien montré par la mise en place dejauges de contraintes multiples que la force de la contraction utérine du fond utérin est très supérieure à celle du segment inférieur.
Par ailleurs les études d'électro-hystérographie ont montrées certaines propagations de l'onde électrique du fond utérin vers le col.
Théorie de la dualité col-corps et homogénéité corporelle
Cette conception est bien classique en France depuis DEMELIN.
Des phénomènes corporéaux sont important mais le comportement
du col est original et important par sa formation musculo- fibreuse.
Col
Il constitue un système contractile faible mais autonome (démontré
par l'observation quotidienne) " spasme du col", "syndrôme
de SCHICKELE" et d'autre part par certains enregistrements de cervicométrie
ultrasonique (LEWIN).
Ce spasme peut être vaincu par une action locale d'infiltration anesthésique
(paracervicale, péridurale).
L'idée montrait aussi que certains ocytociques ont une action plus marquée
sur le col et le segment inférieur, (methylergométrine) (MAC KENZIE,
1965).
Segment inférieur
Il constitue un système tampon situé entre le corps et le col.
Pour transmettre facilement les forces exercées par le fond utérin
au col, il doit avoir une certaine rigidité, il doit donc se contracter.
Si il se contracte trop la transmission est trop brutale ce qui peut aboutir
à un blocage du col.
Si le segment inférieur est trop mou, il amortit la contraction utérine
et la dilatation ne se produit pas. Ceci peut expliquer certaines dystocies
dynamique dans les accouchements après césarienne (zone non extensible
par sclérose au niveau du segment inférieur) ou le retentissement
de la péridurale par le biais d'une hypotonie du segment inférieur.
Rôle de la contraction utérine
Il n'y a pas de centres inducteurs, de la CU le corps utérin et la partie
supérieure sont un ensemble contractile. Plus la contraction intéresse
un territoire important plus sa puissance est grande et plus la dilatation du
col progresse.
L'effacement et la dilatation dont liés à la diminution de la
résistance cervico-segmentaire (maturation puis contraction utérine)
L'évolution anormale du travail peut être due soit à l'augmentation
de la résistance cervicale par spasme, soit à une Activité
Utérine insuffisante.
Cette théorie reconnait donc un rôle certain au col d'où
la possibilité d'agir sur celui-ci, sans nier les phénomènes
mécaniques prépondérants.
4 - Régulation de la dilatation
Facteurs indirects
Contraction utérine
Le contrôle de la contraction utérine constitue l'élément
principal de la direction du travail.
L'ocytocine augmente les contractions utérines ainsi que les prostaglandines.
Leur action directe sur le col n'est pas prouvée en dehors du facteur
de maturation apporté par les postaglandines E2 très probablement
avant 3-4 cm de dilatation.
La méthylergométrine entraîne un "spasme du col",
c'est pourquoi il est contre indiqué pendant l'accouchement et conseillé
après la délivrance.
Fœtus
La présentation fœtale joue un rôle par l'intermédiaire de l'appui sur le col, stimulant indirectement la contraction utérine et jouant le rôle du coin dilatateur. Quand la présentation est de mauvaise qualité (présentation postérieure, présentation de la face, siège) la dilatation du col est de moins bonne qualité.
Facteurs directs
Le rôle du système nerveux central sur le col n'a jamais bien été élucidé. Il pourrait entraîner un "spasme du col" mais la réalité de celui-ci n'est pas démontrée.
Rôle de l'innervation périphérique loco-régionale
Son rôle est certain, démontré par l'effet de l'analgésie
péridurale : le renforcement de l'analgésie, en particulier, dans
sa variante "dose-col" permet obtenir un assouplissement du col, et
la levée du spasme. Le rôle propre de l'action cervicale est difficile
à dissocier de l'effet bénéfique analgésique, supprimant
les phénomènes nociceptifs.
Ce rôle pourrait être le même que celui de l'analgésie
paracervical directe qui a été actuellement abandonnée
en raison de ces effets fœtaux;
Facteurs pharmacologiques
De très nombreux antispasmodiques ont été utilisés
pour favoriser la dilatation du col : antispasmodiques type atropiniques. En
fait leur action n'a jamais pu être démontrée.
L'action directe sur le col est très difficile à mettre en évidence
et très probablement indissociable de celle indirecte par l'intermédiaire
de la contraction utérine.
Rôle de l'anesthésie générale
L'anesthésie générale, en particulier par le nesdonal avait été pronée dans les techniques de dilatation artificielle du col en fin de travail (technique Toulousaine). Il est difficile de dissocier dans cette technique l'effet antispasme, de l'effet général de l'AG (qui coupe les réflexes nociceptifs) et de l'effet mécanique lié à l'augmentation importante de l'AU.
Les phénomènes de dilatation du col sont essentiellement liés
à la structure du col (élasticité, résistance) confrontés
avec la puissance de la contraction utérine par l'intermédiaire
du mobile fœtal et du segment inférieur.
Cependant, de nombreux mécanismes restent encore inconnus et il est souvent
difficile de séparer les phénomènes mécaniques liés
à la contraction utérine et les phénomènes propres
à l'autonomie du corps.
La théorie de différenciation col-corps conduit cependant à
une conduite thérapeutique plus nuancée que la théorie
purement mécanique pour résoudre les phénomènes
dystocie "cervicale".