Sommaire :

Introduction

1 - Pathologies obstructives
2 - Ascite

 


 

Introduction

La visualisation de la paroi et du contenu abdominal est réalisée systématiquement dès le premier trimestre. L'estomac, la vésicule biliaire, le foie sont détectables tôt dans la grossesse : l'estomac est visualisé dès la 11ème SA, car c'est la date à laquelle l'embryon déglutit déjà 7ml/24H. L'intestin grêle n'est normalement pas visible alors que le colon apparaît au 3e trimestre. Le méconium transite au niveau iléo-colique dès 16-18 SA, et au niveau rectal dès 20 SA. Les anomalies de la paroi et du tube digestif sont habituellement facilement détectables à l'échographie et forment en fréquence le 3e groupe d'anomalies après les malformations rénales et du système nerveux central.

 

1 - Pathologies obstructives

Généralités

Les pathologies obstructives du tube digestif sont caractérisées par une dilatation en amont, conséquence de la contractilité des muscles lisses de la paroi. Leur fréquence globale est de l'ordre de 1/3000.

Les obstructions sont de deux types :

Lorsque les obstructions sont hautes, elles sont fréquemment associées à un hydramnios, habituellement important. L'utilisation du doppler couleur permet parfois de constater des phénomènes de régurgitation mais leur caractère fugace en rend l'observation difficile.

Les pathologies obstructives sont généralement découvertes tardivement, car ce qui est visible n'est pas la lésion primitive mais les conséquences physiologiques qu'elle entraîne. Leur diagnostic exact et la connaissance la plus exhaustive de l'étendue des lésions s'avèrent indispensables, dans le cadre d'une collaboration avec les chirurgiens pédiatriques. L'échographie conditionne en effet souvent le mode et le lieu d'accouchement, ainsi que la nécessité d'une intervention chirurgicale précoce ou différée dans le temps. Les anomalies chromosomiques sont fréquentes :

Le bilan d'une dilatation digestive comprend habituellement :

A. Obstructions organiques

Les obstructions hautes (œsophage, duodénum), sont dues à des accidents embryologiquement précoces et volontiers associées à d'autres anomalies. Par contre, les obstructions basses (intestin grêle et en dessous) sont des accidents tardifs, avec peu d'anomalies associées.

A.1. Atrésie de l'oesophage

1. Définition et étiologie

L'atrésie de l'oesophage est l'absence congénitale d'un segment de l'oesophage. Dans la plupart des cas, il existe une fistule trachéo-oesophagienne associée. Plusieurs variantes peuvent être rencontrées, la plus fréquente (80%) étant un oesophage borgne avec fistule trachéo-oesophagienne. L'atrésie oesophagienne associée ou non à une fistule se rencontre à la fréquence de 1 pour 5000 naissances vivantes.

2. Anomalies associées

Elles sont rencontrées dans 40 à 60 % des atrésies. Les plus fréquentes sont cardiaques, anorectales, génito-urinaires et vertébrales. D'autre part, elles rentrent souvent dans le cadre de syndromes dont le VACTERL (Vertébral defects, Anorectal anomalies, Tracheo oesophageal fistula, Renal anomaly and Radial dysplasia). Des anomalies chromosomiques sont possibles et doivent être recherchées (28% des cas, Tri 18 et 21). La plupart des atrésies sont cependant sporadiques et le risque de récurrence est faible.

3. Diagnostic

Le diagnostic des atrésies oesophagiennes doit être évoqué quand en présence d'un hydramnios, l'estomac n'est pas visualisé à deux examens différents. Fréquemment, l'estomac est cependant visible suite au remplissage passif par la fistule trachéo-oesophagienne, ou par les sécrétions de la paroi gastrique, ce qui rend le diagnostic prénatal difficile et peu fréquent. Il devra être évoqué quand l'estomac n'est pas visualisé au cours d'échographies itératives.

4. Attitude

Il dépend de l'âge gestationnel à l'accouchement, du type anatomique et des anomalies éventuellement associées. Il est très bon en cas de lésion isolée, qui bénéficie, en général avec une bonne récupération fonctionnelle, d'une correction chirurgicale

A.2. Obstructions duodénales

1. Définition et étiologie

L'atrésie duodénale ou sténose est la plus fréquente des anomalies obstructives de l'intestin. La fréquence est de 1 pour 5000 grossesses. Le blocage est occasionné par une membrane qui traverse la lumière intestinale. A noter l'existence d'une compression extrinsèque, type pancréas annulaire dans 20 % des cas.

2. Anomalies associées

30 à 50 % des obstructions duodénales sont isolées. Les associations malformatives les plus fréquentes sont cardiaques (20%, CAV, transposition des gros vaisseaux), vertébrales, squelettiques, génito urinaire et digestives (atrésie œsophagienne associée à une atrésie duodénale). 30 % des obstructions duodénales sont associées à une trisomie 21.

3. Diagnostic

Les obstructions duodénales se distinguent échographiquement par une image caractéristique en "double bulle", qui correspond à la dilatation de l'estomac et du duodénum en amont de la sténose entre D1 et D2. La découverte de cette image est difficile avant 18-20 semaines mais elle devient bien visible quand l'hydramnios est constitué.

4. Prise en charge et pronostic

Le bilan doit comporter une échographie détaillée à la recherche de malformations associées, une écho cardiographie ainsi que la réalisation d'un caryotype pour exclure en particulier une trisomie 21.
Le pronostic est excellent quand l'anomalie est isolée (97% de survie). La prématurité est fréquente, conséquence du polyhydramnios.
La prise en charge pédiatrique et chirurgicale précoce est indispensable.

A.3. Obstructions de l'intestin grêle

1. Incidence et étiologie

Les atrésies du jéjunum et de l'iléon sont moins fréquentes que celles du duodénum et surviennent dans moins d'une grossesse sur 10 000. Elles sont occasionnées par une fibrose conséquence d'un accident vasculaire. Une autre origine fréquente est l'iléite méconiale, liée à la mucoviscidose, qui se caractérise par une accumulation de méconium épais qui obstrue l'iléon distal. Il y a 95% d'atrésies et 5% de sténoses.

2. Anomalies associées

Les obstructions intestinales sont habituellement isolées et le risque de récurrence est faible. Les anomalies du caryotype sont rares. L'association avec la mucoviscidose est par contre fréquente.

3. Diagnostic

Il est évoqué en présence d'images liquidiennes multiples dans la cavité abdominale qui sont des boucles intestinales distendues. L'activité péristaltique est normalement visible. Le polyhydramnios n'est pas constant, surtout en présence d'une obstruction distale. En cas de Mucoviscidose, les anses intestinales sont habituellement plus hyperéchogènes.
Les dilatations physiologiques, moins nombreuses, moins volumineuses et inconstantes à deux examens différents, constituent un diagnostic différentiel.

4. Attitude

L'évolution de la pathologie sera évaluée par des échographies itératives régulières, si nécessaires hebdomadaires. L'augmentation du diamètre des anses et l'apparition d'une ascite constituent deux critères de dégradation. Une prise en charge chirurgicale sera effectuée rapidement, dès que l'état hémodynamique de l'enfant est stabilisé.

5. Pronostic

En cas d'anomalie isolée le pronostic est très bon (plus de 95% de survie.) Une dilatation étendue assombrit le pronostic. En présence d'une dilatation liée à une iléite méconiale, outre les problèmes liés à la dilatation intestinale, l'évolution est très dépendante de l'évolution de la maladie.
Les complications s'installent lorsqu'une péritonite méconiale se constitue, que le péristaltisme diminue, que la dilatation se majore, et que l'ascite apparaît. Faut-il alors extraire le fœtus pour souffrance digestive?

A.4. Obstructions coliques

1. Incidence et étiologie

Les atrésies et sténoses coliques sont rares et comptent pour moins de 10% de toutes les atrésies intestinales. La plupart sont la conséquence d'un accident vasculaire, d'un volvulus ou d'une invagination. Une atrésie anale peut provoquer le même tableau, tout comme la maladie de Hirschprung.
Le risque de récurrence d'une atrésie du colon est estimé à 1%. Les atrésies anales comportent également un haut risque de récurrence.

2. Anomalies associées

Les atrésies coliques sont habituellement isolées. Les atrésies anales sont par contre fréquemment associées (70%) à d'autres anomalies. ex : VATER : Vertèbres, Anus, Trachée, Œsophage, tractus Rénal ; ou syndromes ex: syndrome de régression caudale. En cas d'anomalie réno-urinaire associée, l'oligoamnios est fréquent. Une trisomie 21 est retrouvée dans 2% des cas de Hirschprung.

3. Diagnostic

Le diagnostic est difficile, contrairement aux obstructions du grêle. La muqueuse colique reste en effet active et résorbe les sécrétions intestinales. La localisation précise de la lésion peut être évaluée par la découverte des haustrations coliques mais elles ne sont pas toujours visibles. En cas de sténose anale, on découvre parfois une image liquidienne rétrovésicale isolée. Le diagnostic de Hirschprung doit être évoqué en présence d'une histoire familiale. Il est cependant souvent une découverte postnatale.
Diagnostic différentiel: le kyste du mésentère, la duplication digestive.

4. Prise en charge et pronostic

Les anomalies associées seront soigneusement recherchées. La réalisation d'un caryotype est indispensable.
Le pronostic d'une dilatation isolée ou d'une sténose anale isolée est bon. Par contre en cas d'association polymalformative, les anomalies associées conditionnent généralement le pronostic.

B. Obstructions fonctionnelles

1. Mucoviscidose et anomalies digestives

Le diagnostic anténatal de Mucoviscidose est actuellement réalisable et doit impérativement être effectué en cas d'antécédent familial.

Les images échographiques, variables et inconstantes sont de 2 ordres :

1. L'iléus méconial, caractérisé par des dilatations intestinales (cf. supra),
2. La péritonite méconiale. Elle est causée par une perforation conséquence de la surdistension intestinale. Elle apparaît sous forme d'une masse abdominale hyperéchogène, habituellement associée à de l'ascite et un hydramnios,
3. Les simples dilatations du grêle.

Le diagnostic de mucoviscidose peut être réalisé précocement par ponctions de villosités choriales (dès 12 semaines.) Il n'est bien sur effectué qu'en présence d'antécédents familiaux. En cas de découverte de dilatations digestives, rarement avant 20 semaines de grossesse, le diagnostic de mucoviscidose doit être exclu, malgré l'absence de tout antécédent. Le bilan comporte une amniocentèse qui permet de doser les enzymes digestives (gamma GT, LAP, Phosphatases alcalines) qui seront diminuées. Dans le même temps sera effectuée une ponction de sang foetal, pour rechercher les mutations les plus courantes (delta F 508 sur le chromosome 7, et les 11 autres exons les plus courants, pour éviter les faux négatifs, et les variations liées à l'ethnie,..).
Une étude multicentrique sur la mucoviscidose, concernant 197 grossesses à risque de 1/4, il s'avère que 35 fœtus sur 48 atteints présentaient un intestin hyperéchogène, mais que 25% des fœtus atteints ne l'avaient pas.

Le taux de mortalité des péritonites méconiales oscille autour de 60% malgré les traitements chirurgicaux qu'il convient d'établir dès que l'état général de l'enfant le permet.

2. Anomalies chromosomiques et hyperéchogénicité digestive

Selon une étude de Bahado-Singh, en 1994, 167 caryotypes fœtaux ont été réalisés pour âge maternel et hyperéchogénicité des anses intestinales (ralentissement du transit) ; 22 anomalies chromosomiques ont été dépistées, dont 15 trisomies 21.

3. Diagnostic différentiel

Si le fœtus déglutit du sang présent accidentellement dans la cavité amniotique, des images d'anses hyperéchogènes sont construites transitoirement.

Le risque de mort fœtale in-utéro serait plus élevé chez les fœtus ayant présenté des anses hyperéchogènes : l'hypothèse avancée est celle d'une ischémie digestive responsable de l'hyperéchogénicité et d'une plus forte mortalité.

 

2 - Ascite

La visualisation d'ascite abdominale est très fréquente. L'interface constituée de liquide permet d'individualiser les organes de la cavité abdominale. Les anses digestives sont visibles ainsi que le colon. Les limites du foie, les reins, la vessie peuvent être facilement observés. Les facteurs déclenchants sont multiples. Le diagnostic étiologique en est indispensable, afin d'apprécier le pronostic vital.

Les causes principales sont :

1. Infectieuses : Toxoplasmose, CMV, rubéole, parvovirus B19, etc,
2. Cardiaques : en cas de défaillance cardiogénique (malformation, fibroélastose,...),
3. Immunitaires : Isoimmunisation Rhésus, Kell, etc,
4. Digestives (dilatations sur atrésie ou mucoviscidose,..), rénales (mégavessie avec ascite urineuse,...), etc.

La mise au point comporte la réalisation d'un caryotype rapide le plus souvent par ponction de sang foetal, qui permet dans le même geste d'effectuer une numération formule sanguine, une biologie et les sérologies infectieuses. L'amniocentèse permet la recherche d'anticorps, la PCR et la mise en culture du liquide. L'étude du liquide d'ascite complète le bilan, par l'analyse des enzymes digestives et la culture virale.